L'avocate et membre du comité de défense des détenus politiques dans le cadre de l'affaire de complot contre la sûreté de l'Etat, Dalila Ben Mbarek Msaddek a accusé l'ancien ministre de l'Intérieur Taoufik Charfeddine d'avoir monté le dossier de l'affaire de toute pièce. Elle a mis le ministère public au défi de présenter une seule preuve de l'existence d'un complot. Invitée le 22 août 2023 à Midi Show de Elyes Gharbi sur Mosaïque Fm, Dalila Ben Mbarek Msaddek a indiqué qu'après six mois rien n'a changé au niveau de l'affaire. Il n'y a pas eu, selon elle, d'avancement de l'enquête. Elle a affirmé que les détenus ont été arrêtés dans l'espoir de trouver des preuves d'accusations potentielles durant l'enquête. Elle a insisté sur l'absence de preuve dans le dossier de l'enquête. L'affaire, selon elle, a été initiée par le ministère de l'Intérieur. Par la suite, des témoignages anonymes ont été créés afin d'inculper les accusés. Elle a indiqué que ces témoignages ne s'appuyaient sur aucune preuve. Il s'agit d'un récit sans photos ou enregistrements prouvant leur authenticité. Un témoignage peut représenter une preuve complémentaire et ne suffit pas à lui seul. « Je pense que ce dossier a été monté dans les couloirs du ministère de l'Intérieur durant les mois de janvier et février. Il s'agit d'une période durant laquelle la relation entre le président de la République (Kaïs Saïed) et le ministre de l'Intérieur (Taoufik Charfeddine) était très tendue. Le ministre de l'Intérieur était absent du paysage. Il a fait son retour avec ce dossier qu'il a monté de toute pièce », a-t-elle déclaré. Dalila Ben Mbarek Msaddek a indiqué que Taoufik Charfeddine avait imaginé le scénario du complot et choisi lui-même ses victimes, à savoir, les détenus dans le cadre de cette affaire. Elle a révélé qu'il s'était rendu à une prison afin de convaincre une personne de jouer le rôle d'informateur anonyme. Il a fait croire aux Tunisiens et à l'opinion publique en un complot contre la sûreté de l'Etat. Elle a appelé à l'ouverture d'une enquête visant Taoufik Charfeddine et à le poursuivre en justice. L'avocate a rappelé que les arrestations, les fouilles et les raids ont été exécutés par les équipes du ministère de l'Intérieur. Le dossier de l'affaire a, par la suite, été transféré aux mains du juge d'instruction. C'est à ce moment-là qu'on a découvert que le dossier était vide. Dalila Ben Mbarek Msaddek a indiqué que l'affaire de complot était devenue une source d'embarras, de gêne et de problèmes pour la Tunisie à l'échelle nationale et internationale. La membre du comité de défense a indiqué qu'une plainte avait été déposée contre Taoufik Charfeddine par les avocats des détenus. Une autre plainte a été déposée à l'encontre de la ministre de la Justice, Leila Jaffel. Mme. Msaddek a critiqué le non-traitement des plaintes. Selon elle, les affaires ont été laissées de côté. Elle a considéré qu'une personne ayant occupé un poste aussi sensible que le ministre de l'Intérieur et ayant fait croire à l'Etat en l'existence d'un complot devait être traduite en justice. Dalila Ben Mbarek Msaddek a indiqué que l'Etat tunisien ne voulait pas reconnaître l'absence de preuve et assumer les conséquences de l'ouverture de cette enquête. Elle a rappelé que 21 autres personnes ont été auditionnées dans le cadre de la même affaire après l'arrestation des premiers accusés. Ils ont été remis en liberté en raison de l'absence de preuves. Tous les accusés ont été interrogés au sujet de liens entre eux. Ils ont, aussi, été auditionnés au sujet de leur relation avec les diplomates étrangers. L'avocate a affirmé que Issam Chebbi avait été arrêté alors qu'il n'avait pas rencontré de diplomate. Il a, seulement, participé à des réunions organisées dans les locaux d'Al Joumhouri et à la résidence de Khayma Truki. On reproche aux accusés d'avoir organisé des réunions et d'avoir débattu des moyens permettant de mettre fin au coup d'Etat du 25 juillet 2021. Elle a expliqué que les diplomates avaient l'habitude de contacter des politiciens et de demander à les rencontrer et non l'inverse. Dalila Ben Mbarek Msaddek a critiqué la mobilisation du Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme pour la poursuite en justice de personne ayant appelé à sa création et pour porter atteinte à l'opposition. Elle a, aussi, expliqué que la détention de Ridha Belhadj, Jaouhar Ben M'barek, Abdelhamid Jlassi, Khayam Turki, Ghazi Chaouachi et Issam Chebbi, initié le 25 février 2023, a été renouvelée sans que ces derniers ne soient auditionnés par le juge d'instruction. « Le juge d'instruction a choisi de fuir et de ne pas faire face… La détention doit durer six mois. La prolongation est possible à deux fois de quatre mois… Ceci doit avoir lieu en cas d'enquête en cours, d'examen en cours ou de nouvelles pièces à conviction. Rien de cela n'a eu lieu… Les ordinateurs et téléphones des détenus ont été fouillés et on n'y a rien trouvé… Les détenus font face à 17 accusations. Chacune d'entre elles est passible de la peine de mort », a-t-elle ajouté. Dalila Ben Mbarek Msaddek a indiqué que le comité de défense a fait appel à la décision de renouvellement de la détention des accusés de quatre mois émise par le juge d'instruction. Elle a expliqué que la chambre d'accusation se penchera sur le recours dans les prochaines semaines. Pour ce qui est de l'interdiction de traitement médiatique de l'affaire, l'avocate a expliqué qu'une note a été adressée à la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica). Celle-ci avait été appelée à surveiller les médias et à leur interdire la chose. Or, la Haica s'est opposée à cette décision et a refusé d'informer les télévisions et les radios de la chose. Elle considère la décision comme étant illégale.