Le président de la République, Kaïs Saïed, s'est rendu, tard dans la soirée de vendredi 24 novembre 2023, à l'entrepôt de la Société des transports de Tunis (Transtu) de Bab Saadoun. « Nous allons constater l'état des bus, du transport et de la corruption ayant détruit l'entreprise… Les bus sont présents… Il y a des épaves… Certaines lignes doivent être réinstaurées… Les pièces de rechange sont là, mais malheureusement, il y a des vols… Ici, c'est la Transtu, mais la même chose peut-être constatée au niveau des sociétés régionales de transports… On devrait la baptiser Société d'assassinat du Transport », a dit le Président. Le chef de l'Etat a critiqué la situation au niveau de la Transtu. Il a évoqué la question des retards et des disponibilités des bus. « Ni les élèves, ni les femmes se rendant à leurs emplois à l'aube n'arrivent à destination… C'est intentionnel… Les Tunisiens souffrent quotidiennement… Ils galèrent... Il n'y a pas de maintenance », a-t-il ajouté.
Le président de la République a constaté l'état de certains bus complètement détruits et inutilisables. Il a rappelé que certains véhicules avaient été acheminés en Tunisie récemment. « Pourquoi s'agit-il de ferraille ? On jette du fer… Qui va le récupérer ? Tous ces bus sont de la ferraille ! On a sûrement récupéré les pièces de ces véhicules… Prenez en photo la preuve qu'on gaspille l'argent du peuple…. Par la suite, on nous parle de faillite des entreprises et des sociétés… Des milliards sont gaspillés… Pourquoi n'y a-t-il pas de recyclage ? », a-t-il critiqué en se rendant dans l'entrepôt. Le chef de l'Etat a demandé à l'un des agents de la Transtu l'accompagnant sur les lieux le nombre de véhicules dans l'entrepôt. Ce dernier était incapable de répondre. Il lui a affirmé ne pas être en possession de l'information. Par la suite, Kaïs Saïed a critiqué les conditions de transport. Il a rappelé qu'on gardait les portes des bus ouvertes alors que les usagers étaient à bord. Il a qualifié la chose d'atteinte à leur dignité et de menace à leur sécurité.
Le président de la République a visité l'intérieur de plusieurs véhicules classés en tant que ferraille, mais aussi, exploités par la Transtu. Il a pointé du doigt les conditions déplorables des bus. Il s'est, également, rendu dans les vestiaires et dans l'atelier des pneus. Il a laissé entendre qu'il y avait un trafic de pneus. « J'ai constaté la même chose l'autre jour au sujet des trains à Nabeul… Des tonnes de ferraille… Il n'y a pas d'autres mots pouvant décrire la chose… Il s'agit d'un crime contre le peuple tunisien… Pourquoi amène-t-on des bus en panne ? », a-t-il déploré après avoir appris que des véhicules avaient été acquis alors qu'ils n'étaient pas opérationnels. Kaïs Saïed a indiqué que le premier métro devait être construit sous terre, mais que des personnes influentes ont empêché cela. Il a assuré qu'on avait commencé à creuser les tunnels en 1986. Néanmoins, un certain propriétaire d'hôtel et une dame ayant un réseau influent ont bloqué le projet, selon ses dires. Alors que le président continuait à sillonner les allées, le ministre du Transport, Rabie El Majidi, est soudainement apparu derrière lui. Il semble s'être rendu le plus vite que possible afin de rejoindre le Président dans sa visite. Il n'a sûrement pas été informé au préalable. Malheureusement pour lui, les choses ne se sont pas arrangées. Le président de la République a commencé à lui reprocher plusieurs choses et à lui parler sur un ton mécontent. Kaïs Saïed a interrompu Rabie El Majidi à plusieurs reprises alors que ce dernier essayait de lui expliquer qu'un appel d'offres a été lancé pour l'acquisition de la ferraille. « Cessez avec vos appels d'offres qui n'ont aucun sens alors que les citoyens souffrent ! La situation est inacceptable… Des appels d'offres durant des centaines d'années… Il faut passer la ferraille à El Fouladh (Société tunisienne de sidérurgie)… Certains exploitent les appels d'offres… Le citoyen subit la dégradation des transports… Plusieurs lignes ont été annulées ! Pour quelle raison ? Les lignes du Bardo, de Tunis ou de l'Ariana ont été supprimées… Des milliards sont jetés par terre… L'autre jour, j'ai vu le même spectacle », s'est-il exclamé. Le ministre du Transport a indiqué qu'il s'agissait d'un vieil entrepôt. Il a précisé que 134 bus étaient enregistrés au niveau de l'établissement, dont seulement soixante étaient opérationnels. Il s'est fait rapidement couper la parole par le président de la République qui a critiqué ces chiffres et a considéré qu'on était de retour au Moyen-Age. Kaïs Saïed a ordonné à Rabie El Majidi de réinstaurer les lignes de bus. D'un ton satirique et se positionnant devant un tas d'ordures, le Président s'est interrogé sur la présence de ces déchets et sur la nécessité de recourir à un appel d'offres pour résoudre le problème. « Les services se sont dégradés… Il y a des stations sans bus… Le transport est un droit humain… La situation financière de l'entreprise est le résultat de la corruption… Ce n'est pas nouveau ! On cherche à délaisser le secteur des transports publics… On dérobe les biens publics… La loi a été promulguée pour servir le peuple et non les intérêts des lobbies… Ceci ne doit pas continuer à avoir lieu… En regardant ce spectacle, je ne peux plus parler de procédures… Depuis combien d'années cela a eu lieu ? », s'est-il interrogé alors qu'il se trouvait devant une épave complètement délabrée.
Le président de la République a estimé que les instances de contrôle devaient, elles-mêmes, être contrôlées. Kaïs Saïed a insisté sur le déblocage rapide de la situation des transports et de la ferraille se trouvant à l'entrepôt de Bab Saadoun.