La Banque mondiale, dans la dernière édition de son rapport intitulé "Economic Developments and Prospects", explique que «la poursuite des troubles politiques en 2013 a pesé de son poids sur l'activité économique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA)», notamment en Tunisie. Ainsi, la croissance économique de la région MENA en 2013 s'établira à 2,8% en moyenne, soit un taux inférieur de moitié par rapport aux 5,6% estimés en 2012. Dans les pays importateurs de pétrole, la croissance devrait demeurer faible alors que persistent les déficits budgétaires et extérieurs. Dans les pays en développement exportateurs de pétrole, le rythme de l'expansion économique se ralentit considérablement en raison d'une évolution peu favorable. Comparées à 2012, les économies du Conseil de coopération du Golfe connaîtront un ralentissement, bien qu'affichant les taux de croissance les plus élevés de la région. Si la situation politique évolue vers davantage de stabilité et de clarté, la croissance devrait rebondir et atteindre en moyenne 4% en 2014. Cependant, divers risques menacent cette perspective, notamment sur le front intérieur et au plan de l'instabilité politique. «Les pays en développement de la région ne peuvent pas se permettre de continuer de négliger les obstacles économiques de longue date», affirme Shanta Devarajan, économiste en chef à la Banque mondiale pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. «L'absence de réformes économiques significatives, couplée à l'instabilité politique et macroéconomique, en particulier dans les économies en transition, contribuera à freiner le potentiel d'investissement et de croissance, non seulement à court terme, mais également au cours des années à venir, à moins que des mesures correctrices ne soient prises». Le rapport Middle East and North Africa: Investing in Turbulent Times cible principalement les investissements directs étrangers (IDE). Si au cours des années 2000 les flux d'IDE en direction de la région ont suivi la tendance du reste du monde, il est à constater que la situation a changé au lendemain du «Printemps arabe». Alors que les IDE destinés au reste du monde ont augmenté après 2010, les flux vers MENA ont poursuivi leur mouvement baissier à mesure que s'exacerbaient les conditions économiques et politiques. Le rapport indique que les troubles politiques ont affecté le niveau et la composition des IDE et créé un biais des flux en faveur des industries extractives relativement moins créatrices d'emplois. Parallèlement, ces troubles ont contribué à réduire les IDE de qualité en direction des industries de la transformation et des services à forte intensité de main-d'œuvre. «En décourageant les investissements axés sur la recherche d'efficacité, les chocs préjudiciables à la stabilité politique accentuent la concentration des IDE dans les industries extractives et les secteurs non commerciaux, exacerbant un problème lié aux distorsions induites par l'action publique et à l'emprise politique, qui date d'avant le Printemps arabe», soutient Elena Ianchovichina, économiste principale à la Banque mondiale pour la région MENA et principal auteur du rapport. Le rapport souligne plusieurs priorités stratégiques et difficultés pour la région. Il invite à la prudence, indiquant que les pays de la région MENA courent le risque de se retrouver pris dans le piège des ressources, à moins de renforcer les institutions et d'améliorer le climat de l'investissement, en particulier la stabilité politique et macroéconomique. Pour M. Devarajan, «La solution à la création d'emplois et à la transformation structurelle dans la région passe nécessairement par la protection de l'Etat de droit et des droits de propriété, ainsi que par l'engagement envers des politiques stables et transparentes». Une autre priorité a trait aux réformes concernant les problèmes qui existent de longue date, notamment les règles et réglementation appliquées de manière discrétionnaire et inégale, les faveurs faites aux entreprises privilégiées, le coût élevé des subventions, la fourniture inadéquate et irrégulière des services d'infrastructure, la qualité de l'éducation, le renforcement des compétences et le mauvais fonctionnement des marchés.