La Tunisie, qui avait toujours eu par le passé des relations paisibles et fraternelles avec ses deux voisins immédiats, algérien et libyen, connaît depuis plusieurs mois des rapports autrement plus complexes avec la Libye de l'après-Kadhafi. Une situation vécue notamment depuis quelques jours avec l'annonce fracassante de la présence du mouvement terroriste Daech dans les zones toutes proches de nos frontières du Sud. La menace s'est , toutefois, faite encore plus précise depuis dimanche 15 février 2015 avec la diffusion d'une vidéo insoutenable montrant les bourreaux de Daech en train d'égorger, de sang froid, pas moins de 21 otages égyptiens. Un crime barbare contre d'innocents travailleurs de confession chrétienne. Un fait est bien là, désormais : Daech, un groupe sans le moindre scrupule, se trouve bel et bien à quelques kilomètres de nos frontières. Comment la situation sera-t-elle gérée par les nouvelles autorités tunisiennes ? Ainsi, au lieu de se décanter, la scène libyenne est devenue potentiellement dangereuse. L'armée tunisienne est en train de mettre en place un dispositif de défense selon les moyens et les équipements dont elle dispose. Un imposant rideau s'est, donc, déployé tout le long des frontières terrestres et maritimes avec la Libye. Un rideau impliquant les troupes militaires et celles de la Garde nationale sans oublier les agents et cadres de la Douane. Mais est-ce suffisant en cas de détérioration de la situation et d'escalade de la violence, notamment avec l'entrée en scène de l'armée égyptienne qui, à peine quelques heures après l'exécution des otages, a lancé des frappes aériennes hautement meurtrières dans les rangs des terroristes de Daech, de l'aveu même de sources militaires libyennes. Or, il semble que l'armée du Caire ne va pas s'arrêter là et pourrait multiplier les bombardements, ce qui pourrait entraîner une réaction de la part des « dawaech » et leurs sympathisants parmi les forces de « Fejr Libya » Que peuvent faires nos troupes militaires et sécuritaires ? Il est bon de rappeler qu'elles n'ont jamais mené une véritable guerre, à part les quelques participations à des missions onusiennes de paix, principalement au Congo et au Cambodge. Forte de 27 mille hommes en infanterie, 4 mille pour l'armée de l'air et 4500 autres pour la marine, notre armée passe pour être bien entraînée, disciplinée et bien opérationnelle grâce à des exercices réguliers avec des unités militaires de pays frères et amis. Le dernier en date vient de se dérouler au Maroc avec des armées de plusieurs pays dont notamment la France, l'Allemagne, les USA et, bien entendu, le Maroc. D'autre part, aux dernières nouvelles, on apprend que notre « Muette » s'est dotée, dernièrement, d'équipements et de matériels modernes de la part de l'Italie et des Etats-Unis d'Amérique. Sans oublier que d'autres sources évoquent un prochain traité de défense commune avec l'Algérie, notamment avec l'évènement du nouveau pouvoir conduit par Béji Caïd Essebsi. En effet, les observateurs s'accordent à dire qu'en cas de débordement du conflit en Libye, il impliquerait bien d'autres pays, plus précisément ceux voisins dont l'Algérie, le Mali, le Niger et le Tchad. Et il est bien évident que la Tunisie et l'Algérie seraient placées cote-à-cote dans une même tranchée, surtout après le départ de la troïka. Certains vont, d'ailleurs, jusqu'à prévoir une implication, d'une manière ou d'une autre, de pays de l'Union Européenne qui ne laisseront pas tomber la Tunisie, seul pays arabe à avoir réussi « sa » révolution en parvenant à réussir une véritable transition démocratique. Autrement dit, la Tunisie demeure optimiste même si la vigilance doit rester de mise. D'autres risques sont, toutefois, bien réels dans le sens où ce qu'on appelle une « cinquième » colonne peut voir le jour chez nous, ce qui pourrait causer de graves préjudices à tout système de défense en cas de confrontation armée. D'ailleurs, des symptômes étaient bien visibles, ces derniers temps avec le déclenchement des perturbations à Dhehiba et Ben Guerdane. Sinon, comment interpréter les propos tenus par des hommes politiques, dont l'un est même député à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). En effet, les Imed Daïmi et Riadh Chaïbi (un ex-Nahdhaoui pur et dur) n'ont pas hésité à appeler le nouveau pouvoir en place à avoir une « politique neutre et objective vis-à-vis des différents belligérants en Libye » tout en insinuant qu'il fallait avoir de meilleures relations avec les forces détenant les zones proches de notre pays et, plus particulièrement, les passages frontaliers. On citera, aussi, un autre Nahdhaoui. Il s'agit de l'ancien ambassadeur tunisien à Tripoli, dont les relations « trop » amicales avec les intégristes libyens et, à leur tête, Abdelhakim Belhaj sont plus que notoires. Plus encore, on parle de nombreuses communications effectuées, ces derniers temps, par ledit ambassadeur avec des leaders islamistes libyens Sans parler de certains sites et autres pages dont le plus célèbre est celui d'Essada, qui multiplient les publications des messages privilégiant les théories de complot. Certaines pages sur la toile, tout en faisant l'éloge de toute action terroriste comme étant une « victoire de l'Islam contre les mécréants», nient l'existence même de l'organisation Daech. Les analystes estiment, dans ce contexte, qu'il est temps pour l'Etat de droit de se manifester en faisant appliquer la loi dont notamment celle de lutte contre le terrorisme. En France, la justice n'a pas hésité à condamner plusieurs personnes accusées d' « apologie » du terrorisme. Or, chez nous, ceux qui font l'apologie de ce fléau, parfois par médias et plateaux radiotélévisés interposés, sont légion. Et dire que des politiciens, des élus par-dessus le marché, ont eu l'audace de dire que « Daech n'existe pas, que c'est un simple fantôme dont on prétend l'existence en Irak ou en Syrie ». N'est-ce pas Mme Samia Abbou ? On aurait bien aimé voir sa tête après la dernière horreur perpétrée par les « Dawaech » dans une ville proche de nos frontières ! En tous les cas, après l'allégeance faite par le chef des Ansar al Chariâa à l'Emir de Daech, Aboubakr El Baghdadi, et la révélation du ministère de l'Intérieur quant à l'existence de certaines cellules dormantes de l'organisation terroriste en Tunisie, le phénomène est désormais bien une réalité que seuls les borgnes s'obstinent à ne pas voir. Autrement dit, il est plus que jamais temps de se serrer les coudes et de réunir tous les atouts de notre côté en vue de faire face aux divers aléas et d'affronter les dangers que nous aurons à affronter.