Le professeur de droit constitutionnel, Kaïs Saïed, dans une interview accordée ce vendredi 8 janvier 2016 à l'émission Expresso de Wassim Ben Larbi sur Express Fm, est revenu sur la procédure à suivre légalement suite au dernier remaniement ministériel. Kaïs Saïed a estimé que selon la constitution, le vote de confiance doit être accordé au gouvernement dans sa globalité, suite à sa constitution, et non pas suite à un remaniement. Il souligne que le texte est clair dans son article 89 : le gouvernement présente son programme, suite à sa constitution, à l'Assemblée des représentants du peuple, pour obtenir à la majorité absolue un vote de confiance pour ses membres. Pour lui, il n'y a aucune ambigüité, la confiance est accordée au groupe : le gouvernement à sa constitution.
Le problème aujourd'hui se pose, selon lui, au niveau du règlement intérieur de l'Assemblée et dans son article 144 qui stipule que la confiance doit être accordée à chaque membre du gouvernement individuellement, après tout remaniement. M. Saïed considère que cet article est anticonstitutionnel, car le règlement intérieur doit organiser le travail à l'intérieur de l'assemblée, et ne peut être en aucun cas un cadre pour que le pouvoir législatif augmente ses prérogatives concernant la constitution du gouvernement. Pour lui, il s'agit d'une surenchère de la part de l'assemblée.
L'article de la constitution est en contradiction avec l'article du règlement intérieur, et donc quand il y a une contradiction entre deux textes de lois, il faut se référer au texte le plus haut placé et dans cette hiérarchie, la constitution prévaut vis-à-vis de tout autre texte de loi.
Kaïs Saïed a indiqué que pour exprimer son avis, l'assemblée dispose d'autres moyens, notamment à travers des questions écrites, une audition, une commission d'enquête, le retrait de confiance, etc. L'article 92 stipule que le chef du gouvernement est le seul apte à décider de la création, de la modification ou de la suppression de ministères et de secrétaire d'Etat. Il fixe également les missions et les prérogatives de chaque entité et de chaque personne. Ceci dit, M. Saïed a relevé qu'une procédure n'a pas été respectée : il fallait que les nouveautés du gouvernement soient soumises au Conseil des ministres, c'est ce que stipule la constitution. Autre violation constatée par le constitutionnaliste, la suppression du poste de secrétaire d'Etat n'est pas en accord avec l'article 89, qui stipule que le gouvernement est composé d'un chef de gouvernement, de ministres et de secrétaires d'Etat. Habib Essid pourrait, selon lui, gouverner uniquement avec des secrétariats d'Etat en supprimant le poste de ministre. Par conséquent, la suppression de poste est en opposition avec le texte de la constitution.