« C'était un vrai challenge d'expliquer aux gens que l'ATI est un point d'échange de trafic. Nous devons communiquer, et l'ATI n'est pas une institution qui était habituée à communiquer auparavant. Nous avons dû ouvrir nos portes aux organisations non gouvernementales et aux blogueurs », a indiqué M. Moez Chakchouk, directeur de l'Agence tunisienne de l'Internet. Dans une interview accordée à la chaîne Al Jazeera, le directeur de l'ATI, a précisé que son rôle est de défendre la transparence et la neutralité de l'ATI, quel que soit le contenu qui y transite : « Nous voulons changer. Nous avons d'ailleurs déjà commencé à changer notre équipement. Nous avons déjà commencé à mettre fin aux investissements destinés aux équipements de censure. Nous ne pouvons plus faire machine arrière », a-t-il précisé. Concernant le problème de la pornographie, M. Chakchouk, a précisé qu'il peut être enrayé de différentes façons : les FAI (Fournisseurs Acces Internet) peuvent par exemple proposer des logiciels de contrôle parental, mais l'ATI ne peut pas censurer directement : « En outre, sécurité nationale ne signifie pas censure. Nous aidons le tribunal à faire appliquer la loi. Nous le faisons tous les jours, d'une façon transparente et en accord avec la loi. Internet doit avoir une législation spécifique, car ce n'est pas un média. Tous ces problèmes devront être traités de manière différente dans le futur. Les utilisateurs d'Internet qui souhaitent bloquer la pornographie pourront choisir cette option auprès de leur FAI, mais en tant qu'option et non comme la réponse généralisée qui était employée auparavant. Les équipements de censure dont nous disposons ne permettent plus aujourd'hui de censurer. Tous les sites sont aujourd'hui ouverts, malgré les ordres du tribunal militaire. Nous n'avons pas les moyens d'obéir aux ordres du tribunal ». Quant au problème de la surveillance, M. Chakchouk a expliqué que l'ATI ne surveille pas les internautes : « Ce n'était pas l'ATI qui en avait la charge. Nous ne disposons pas de l'information nous permettant de le faire. Les blogueurs disent que c'était la cyberpolice. Mais je n'en sais rien. Nous savons que certaines personnes en avaient la charge. Ils utilisaient notre équipement ». La Tunisie est-elle un terrain d'expérimentation des technologies de censure et de surveillance étrangère ? A cette question, Moez Chakchouk a précisé que notre pays a été le premier à mettre en place ces systèmes : « Nous avons beaucoup d'équipements ici qui ne sont pas à nous. Qui est venu les installer ? C'était un partenariat entre l'ATI et des entreprises. La technologie elle-même est fantastique, mais vous devez l'utiliser d'une façon juste ». Il a expliqué que l'agence dispose de l'équipement de censure habituel qui a été développé dans notre pays avec cette entreprise de test du Deep Packet Inspection. Il y avait de nombreux bugs, mais ils ont été corrigés au fil des années : « Je peux, également, vous parler de SmartFilter, parce que SmartFilter a été acheté indirectement à McAfee, une entreprise américaine. SmartFilter a été acheté en 2002 et nous l'utilisons toujours. Nous avons renouvelé notre contrat avec SmartFilter, mais à travers d'autres entreprises. La compagnie qui nous fournit l'équipement de Deep Packet Inspection a elle-même un contrat avec SmartFilter. C'est pour cela que je n'ai pas de contrat de confidentialité avec SmarFilter. L'équipement a évolué. Ils ont commencé avec des systèmes de cache et développé ensuite des technologies plus sophistiquées ». Et M. Chakchouk de conclure : « Nous avons renouvelé ce contrat parce que nous filtrons toujours les accès des institutions gouvernementales. Si vous tapez « pornographie » ici à l'ATI, vous serez bloqué. Pour les écoles, les hôpitaux, les institutions gouvernementales et les cybercafés, nous filtrons. Nous utilisons juste des filtres locaux avec une capacité réduite. Pour la totalité du pays, nous aurions besoin d'un équipement plus important, et cet équipement n'a pas été maintenu ».