Par M'hamed JAIBI Un séminaire pluridisciplinaire vient d'inaugurer, hier, au siège de l'Assemblée des représentants du peuple et sous le patronage de son président, Mohamed Ennacer, l'analyse et l'évaluation des multiples clauses de la nouvelle Constitution qui ont des implications, directes ou indirectes, sur les orientations et le fonctionnement de l'économie nationale. Juristes et acteurs économiques Deux associations ont dû mettre la main dans la main pour faire que ce nécessaire débat soit enclenché, et qu'il le soit à l'Assemblée et avec l'active participation de députés de divers bords, celle que préside le Pr Iyadh Ben Achour, «pour la recherche sur la transition démocratique», et le Cercle Kheireddine, que préside le Pr Mohamed Dachraoui. Le but étant de lever le voile sur les insuffisances et les zones de brouillard que présente la Constitution en matière économique, à un moment crucial où le pays doit absolument trouver les voies d'une relance décisive de son développement. Et Iyadh Ben Achour n'a pas manqué de saluer ce brainstorming mettant enfin en présence juristes et décideurs et acteurs économiques. Au moment où, au nom du Cercle Kheireddine, Afif Chelbi en appelait à une approche critique quant à certaines formulations contraignantes dans le texte fondateur de la IIe République. Une lecture économique de la Constitution «Constitution et Economie : pour une lecture économique de la Constitution», thème officiel du séminaire, cache mal le fait qu'en réalité les rédacteurs de la Constitution, pris dans leurs luttes idéologiques et sur le projet de société, ont parfois oublié qu'il faudra d'abord nourrir le peuple, et que c'est dans ces sphères là que la Révolution a vu le jour. Et il n'y a pas que l'article 13 qui pose problème en suggérant que tout ce qui a trait aux contrats relatifs à l'exploitation des ressources naturelles du pays doit être avalisé par l'Assemblée. Notre Constitution ne dope en fait ni l'initiative ni l'investissement, et ne trace ni une voie, ni des orientations économiques ni un modèle de développement. Par contre, elle accorde, dans le texte, le droit de grève et insiste sur le développement durable, sur la justice fiscale et sur l'environnement. Définir le système économique et le modèle De ce fait, et par-delà les allusions de principe, parfois d'inspiration contradictoire, le système économique du pays reste à définir, ainsi que le modèle de développement qu'il faudra faire évoluer et qui se devra cependant d'obéir aux clauses constitutionnelles ordonnant justice et équité entre citoyens et entre régions. De même qu'il est question de préciser et d'articuler les questions relatives aux ressources naturelles, au développement durable, à l'environnement, à l'eau, au droit au travail et à la dignité...ainsi que de définir la décentralisation et la gouvernance régionale et locale, que recommande avec force la Constitution. Autant de thèmes que le séminaire a décortiqués tout en laissant la porte ouverte au débat. Présenté par Neïla Chaâbane, le rapport sur le thème impôts-finances a naturellement débordé sur les ressources du budget de l'Etat et sur l'assiette fiscale qu'offre un pays où l'on parle d'une économie parallèle qui dépasserait les 50%. Enfin, ont été effleurées les questions de la précarité au travail, de la protection sociale et de la santé, avant de faire quelques incursions dans le domaine du droit comparé, où l'on constate, à la fois, l'ampleur des insuffisances que l'on pourrait attribuer à notre Constitution, et l'universalité des constitutions perfectibles. Et qui se corrigent, grâce à la souplesse pratique du droit positif et à l'attachement au fonctionnement démocratique, soit par des interprétations consensuelles du texte, soit par des réformes constitutionnelles en bonne et due forme. Le débat est ouvert, mais le temps presse car l'économie n'attend pas. M.J.