Les défaillances défensives ne peuvent constituer une excuse à certains comportements. Par rapport au système de jeu et aux schémas tactiques préconisés par Kasperczak lors de la dernière prestation de la sélection face au Liberia, de sa tendance à chambarder d'un seul coup l'ossature de l'équipe, des associations improvisées à l'occasion, la formation alignée avant-hier contre le Gabon, du reste devant un adversaire de grande envergure, a laissé entrevoir certains motifs de satisfaction. Dans certaines phases abouties, les joueurs ont donné l'impression de respirer le même jeu, la même ligne de conduite, avec des principes collectifs et facilement identifiables. Il faut dire que tous ces motifs de satisfaction n'étaient justifiés et suffisamment argumentés que lors de la première période de jeu. En deuxième mi-temps, nous étions en présence de joueurs ordinaires, ou presque, qui avaient beaucoup perdu de leur éclat au point qu'ils n'arrivaient plus à soutenir le rythme imposé par l'équipe adverse. Nous pensons qu'il y a un grand décalage entre ce qui a été présenté au début et tout ce qui a été concédé par la suite. Certains, notamment en défense, ont participé au développement d'un certain malaise au sein de l'équipe. Nous sommes conscients du fait que le football est aussi fait d'erreurs et de maladresses parfois inévitables, mais toutes les défaillances défensives accusées lors de ce match ne peuvent constituer une excuse à certains comportements. Plus que des histoires de résultats ou de buts encaissés, le rendement de la défense offre les contours de plusieurs interrogations. Joueurs, mais aussi staff technique, voici qu'apparaît devant chacun une marge de responsabilité évidente dans chaque but essuyé. En l'absence de stratégie défensive, de complémentarité et d'homogénéité, les travers étaient nombreux et bien désormais bien connus en sélection: incompétence, inconstance morale et physique, et dans tous les cas de figure fragilité de ceux qui veillent à l'arrière-garde de l'équipe. Il y a certainement des leçons à retenir du rendement de la sélection face au Gabon. On ne saura, en effet, ignorer le fait d'avoir fait un fort mauvais usage des notions défensives. Elle peut résister quelque temps, mais pas en permanence. La défense avancée, on peut l'utiliser de temps en temps, mais pas au point d'en créer un système. L'on remarquera en passant qu'on ne fait pas disparaître magiquement le cumul d'un héritage très lourd. La sélection a quelque peu progressé, mais elle devrait le faire encore davantage et avec les moyens et les arguments les plus adéquats et les plus convaincants. Ce n'est pas encore le rendement idéal, mais nous osons penser qu'à travers les buts marqués et la formule d'attaque adoptée, elle est quelque part formatée pour la gagne. Il lui reste cependant à découvrir sa nature profonde au fil des matches et de la compétition. Les fantômes du passé D'autres étapes sont d'ores et déjà exigées pour vérifier que ce grand bouleversement ne deviendra ni le grand tonneau des Danaïdes pour les uns, ni la boîte de Pandore pour tous ceux qui graviteront tout autour. Car malgré la rigueur et les moyens de lutte que l'on se donne, on sait que derrière toute action de remise en cause et de reconstruction se cachent toujours des dangers. Les trois buts marqués et certaines phases de jeu offensives ne doivent pas d'ailleurs constituer l'arbre qui cache la forêt. Certains problèmes, manquements et défaillances ne rassurent pas sur l'avenir de la sélection. On ne peut pas exiger de certains joueurs tout ce dont ils sont incapables de faire, ni d'obtenir. Evoquer aujourd'hui les problèmes de la défense, c'est provoquer les fantômes du passé. La sélection a très longtemps cumulé les ennuis de ce genre. Cela a dépassé largement le débat autour d'un compartiment en pleine perdition. Mais c'est aussi le devoir de pointer ce que nous considérons comme des erreurs, ou des dérives. Aujourd'hui, la question essentielle est de savoir si l'équipe a vraiment de l'avenir face à autant de défaillances défensives, à l'égarement de ses acteurs. Parfois, les difficultés permettent d'avancer, mais la sélection ne devrait en aucun cas céder aux aléas d'un football dénaturé. Entre l'essentiel et l'accessoire, la manière d'alterner temps de jeu, formules et raisonnement, on reconnaît ici l'impératif d'une mobilisation et d'une adhésion inconditionnelle à tout ce qu'il y a de mieux pour l'ensemble. Pour l'équipe. En somme, personne ne peut aujourd'hui pavoiser. Le chemin est encore long et les écueils sont nombreux. Il faudra certainement du temps, encore du temps, beaucoup de temps, pour que la sélection puisse vraiment se remettre sur la bonne voie. Au point où elle en est aujourd'hui, il est vital d'abattre la forteresse de la nullité, de recomposer les priorités, de redéfinir les structures. Bref, de s'appuyer sur de vraies valeurs. Le mérite auquel peut aspirer la sélection ne peut pas être seulement lié aux résultats, ou encore à une régularité dans le rendement. C'est une philosophie de jeu. Une vocation. Un style plus qu'un mode de comportement. Une équipe capable d'épouser tous les styles, jouer tous les rôles. Que ce soit en match officiel, ou en amical, elle aurait toujours besoin de s'imposer sur le terrain. Plus que dans leurs clubs, les joueurs n'ignorent pas qu'au stade où ils en sont et à travers leur statut, ils sont constamment attendus. Chaque apparition constitue une perpétuelle remise en question et une nouvelle opportunité pour aller de l'avant. C'est une conscience au quotidien. Voilà en clair un exercice obligé pour l'équipe: promener à la fois d'encensoir autour de son cher passé et de télescope en direction de son avenir.