Est-on en train d'assister à l'implosion de Nida Tounès ? Hafedh Caïd Essebsi somme le bureau politique d'avaliser les décisions issues de la réunion de Djerba. Au cas contraire, il prendra les mesures qui s'imposent Quand beaucoup d'analystes et d'observateurs ont prédit que les divisions au sein de Nida Tounès mèneront le parti cher au président Béji Caïd Essebsi à l'implosion ou au moins à l'éclatement en deux partis, les nidaistes se sont mobilisés pour nous convaincre que leur parti est immunisé contre la division et qu'il ne connaîtra jamais le sort d'autres partis comme le CPR, éclaté en quatre petits groupes, ou Ettakatol, dont on n'entend plus parler, et les diverses formations destouriennes dont la plupart ne sont plus qu'un lointain souvenir. Qu'ils appartiennent au clan de Mohsen Marzouk, le secrétaire général accusé de nourrir des ambitions dépassant et sa taille et son envergure, ou qu'ils soutiennent Hafedh Caïd Essebsi, le vice-président à qui on reproche la volonté de confisquer le parti qu'il considère comme un héritage paternel dont il est le légataire exclusif, les nidaistes se sont passé le mot pour dire : «Le parti ne coulera pas et nous saurons sauver à temps la barque grâce au consensus et à notre haute conscience de l'intérêt supérieur du pays. Sauf que ce discours qui voulait calmer aussi bien les nidaistes inquiets que les Tunisiens refusant que le parti des Berges du Lac périclite semble ne pas avoir réussi à résister à la tentation de ceux qui veulent mettre un terme à l'attentisme prévalant au sein du parti et cherchent une solution définitive à la situation du «faux consensus qui y règne». Hier, les leaders nidaistes ayant pris part à la fameuse conférence des cadres tenue récemment à Djerba ont envoyé, par le biais d'un huissier de justice, une notification aux membres du bureau exécutif leur demandant de convoquer pour le mardi 3 novembre prochain une réunion urgente. Au cours de cette réunion, les signataires de la notification exigent la mise en application des recommandations issues de la conférence de Djerba. Fixation de la date définitive du congrès, création de la commission de personnalités neutres qui auront à préparer et à diriger le congrès et déclarer le bureau exécutif actuel dissous. Au cas où les membres du clan Mohsen Marzouk (la notification a été transmise à Mohsen Marzouk, Lazhar Akremi, Mohamed Ennaceur, Boujemâa Rmili, Lazhar Karoui Chebbi) rejetteraient la notification, les signataires de la même notification se réservent le droit de prendre les mesures qui s'imposent. En plus clair et même s'ils s'abstiennent de révéler les mesures qu'ils vont prendre, il n'est pas sorcier de comprendre qu'ils vont passer à l'étape que tous les nidaistes attendent ou redoutent, celle de prendre les choses en main et de s'emparer des structures dirigeantes du parti en préparant et en conduisant les travaux du congrès tant attendu. «Qu'ils exercent leur droit à l'échec» Lazhar Akremi, ministre démissionnaire du gouvernement Essid et l'un des fondateurs de Nida Tounès, confie à La Presse: «Nous n'assisterons pas à la réunion convoquée par Hafedh Caïd Essebsi and Co. Nous considérons que l'action menée par Hafedh et son clan est une action illégale, apolitique et amorale et elle n'aura aucune incidence sur l'avenir de notre parti. Actuellement, nous disposons d'un bureau politique élu en mars 2015. L'instance constitutive s'est intégrée dans le bureau politique et lui a transféré ses prérogatives conformément aux dispositions de l'article 14 des statuts du parti». A la question de savoir comment vont réagir les membres du clan Marzouk au cas où la réunion du 3 novembre prochain se tiendrait quand même sans leur présence, Lazhar Akremi souligne : «Nous observerons le coup d'Etat à distance et nous sommes sûrs qu'il échouera. Qu'ils exercent leur droit à l'échec. Et contrairement à ce que colportent Hafedh Caïd Essebsi et ses lieutenants, les structures et les militants de base soutiennent le bureau politique auquel revient le dernier mot». Les dés étant déjà jetés et les deux clans ayant décidé, semble-t-il, de se faire la guerre jusqu'au bout, certains observateurs croyant encore qu'il est possible de sauver la barque Nida se posent la question suivante : pourquoi ne pas répéter la solution consensuelle à laquelle on est parvenu au sein du bloc parlementaire nidaiste ? Et comme les nidaistes sont les champions des compromis qui contentent tout le monde et font ajourner les solutions, pourquoi ne pas continuer sur la même voie?