Le pari sur le rail peut être, facilement, relevé. Il suffit d'une bonne dose de volonté politique de la part des décideurs et la mobilisation d'un budget conséquent. L'opiniâtreté de l'époque a payé. Aujourd'hui on récolte les fruits de ce projet en avance sur son temps. L'opinion publique s'était interrogée sur l'opportunité d'une telle réalisation alors que d'autres grandes villes comme Tunis ou Sfax avaient le plus besoin d'une ligne de métro. D'ailleurs ce ne sera qu'en 1985 que la ligne Tunis-Ben Arous sera mise en service, soit un an après celui du Sahel. Toujours est-il que, même après, la polémique suscitée par la ligne du métro du Sahel à son lancement semble lointaine et sans utilité. Aujourd'hui, cette ligne apporte une grande contribution au transport et participe de façon très efficace au développement de la région. L'idée de prolonger l'itinéraire jusqu'à Sfax, en desservant comme elle le fait actuellement Mahdia et Sousse, est à l'ordre du jour. On sait que cette ligne est totalement électrifiée et qu'elle s'étend sur plus de 70 km. Cette extension probable l'allongera d'une cinquantaine de km supplémentaires. 9 millions de voyageurs La part de ce moyen de transport n'est pas négligeable. On compte près de 9 millions de voyageurs par an, dont 60 % environ sont des élèves et des étudiants. Cette performance n'aurait pu jamais être réalisée par des bus. Cela montre, si besoin est, que l'avenir est au rail. Durant les années qui précédaient, et jusqu'en 2000, la politique menée dans ce domaine n'accordait aucun intérêt à la question. Pourtant, de nombreux responsables savaient pertinemment que ce créneau ne pouvait être négligé. Heureusement que maintenant les mentalités sont en train de changer. Les décideurs sont convaincus de la nécessité de réexploiter l'infrastructure héritée de la colonisation et qui a subi beaucoup de dommages en raison de l'abandon total de plusieurs tronçons et plusieurs dessertes. Tout le monde est d‘accord pour affirmer qu'il y a des dessertes qui seraient rentables économiquement et socialement si elles venaient à être remises en service. Les lignes non exploitées se trouvent, comme par hasard, dans les zones déshéritées du Centre et du Nord-Ouest. Le Trans-Maghreb est en panne. La liaison Tunis-Alger-Casablanca est en hibernation et le projet de la ligne qui la reliera à Tripoli est à l'état de balbutiements. La situation, normalement, ne devrait plus perdurer. La Tunisie devrait réaliser sur son sol l'équivalent de 780 km de voie pour la réalisation de la ligne ferroviaire rapide transmaghrébine. Il s'agit d'une option stratégique car ce programme facilitera le transport de passagers mais aussi de marchandises, ouvrant la voie à une intégration plus rapide des économies de l'Afrique du Nord. Désenclavement des régions intérieures Si cela est vrai pour l'ensemble des pays du Maghreb, il l'est d'autant plus pour les régions de l'intérieur. La liaison de certaines régions par le rail s'impose de plus en plus. Le rail est devenu une option incontournable et économique pour désenclaver les économies régionales et favoriser l'investissement. Bien d'autres avantages peuvent en découler, à l'instar du contre-exode et du développement des zones urbaines autour des axes desservis, évitant, ainsi, la surpopulation dans les grandes villes côtières. On remarque, en outre que le réseau ferroviaire national dépasse les 2.000 km et qu'il est divisé en deux modes. Le premier comprend des voies normales (notamment dans le Nord et le Nord-Ouest) et des voies métriques (dans le reste du pays). Cette configuration n'est pas sans laisser des faiblesses au niveau d'une exploitation optimale. Toutefois, on peut composer avec cette réalité pour atteindre les objectifs fixés en vue de connecter toutes les régions où on dispose d'une infrastructure ferroviaire, de réhabiliter d'autres lignes et consolider celles qui existent. Il est vrai que la plus grande ligne est celle de Tunis-Gabès (415 km). Elle est très active avec 8 navettes quotidiennes. Mais il y a, aussi, d'autres liaisons moins longues qui peuvent s'avérer d'un grand apport si on leur réservait un meilleur sort. On pense aux lignes Kalaâ Sghira-M'Saken (21 km), Bir Bou Rekba-Nabeul (17 km), Fej Ettameur-Tajerouine (18 km), Bir Kassaa-La Goulette (9 km), Tinja-Menzel-Bourguiba (4 km), Sidi Smail-La Merdja (18 km)... Il n'est pas besoin d'insister sur l'impact certain que pourraient avoir de telles réalisations sur les conditions de vie des Tunisiens si des projets d'envergure venaient à voir le jour à ce niveau. Les cheminots authentiques et plusieurs responsables du domaine le savent et en sont convaincus.