L'octroi de cette licence marque le passage des clubs en Afrique à un palier professionnel où l'administration, le technique et l'infrastructure comptent pour critères La licence CAF est aujourd'hui au cœur de l'actualité du football africain. C'est un processus institué par la CAF depuis plus de deux ans par alignement à l'exemple européen où l'Uefa a «imposé», depuis une dizaine d'années, aux clubs affiliés de disposer d'une licence Uefa pour pouvoir participer à ses compétitions. La CAF le fait avec le retard habituel pour une institution encore à court de réactivité et de souplesse. L'essentiel est que le processus de la licence CAF a été lancé et notre championnat et nos clubs, bien sûr, sont concernés. A partir de la saison prochaine, les clubs tunisiens engagés dans les compétitions africaines inter-clubs (la Ligue des champions et la Coupe de la CAF) doivent disposer d'une licence CAF ou s'aligner sur un cahier des charges qui prend en charge les critères énoncés dans la licence CAF. C'est une obligation, donc la participation peut être compromise si le club n'adhère pas à cette démarche, on va dire «révolutionnaire» pour notre football. Trois critères... La majorité des clubs en Afrique ne répondent sûrement pas aux critères du professionnalisme, y compris les nôtres, qui vivent un paradoxe entre les textes (ils sont professionnels) et entre la réalité (ils gèrent n'importe comment). Cela fait des années qu'on appelle à revoir et restructurer cette expérience. Maintenant, nous sommes à la croisée des chemins : ou nous devons comprendre et adhérer au vrai professionnalisme, ou c'est l'adieu aux compétitions africaines. La démarche ne va sûrement pas être intronisée d'une façon verticale par la CAF qui a laissé une certaine marge de manœuvre aux fédérations locales vis-à-vis des clubs retenus pour les compétitions africaines. Qu'est-ce qu'une licence CAF? C'est tout simplement une licence délivrée par la CAF, à travers les fédérations locales et qui exige trois critères : le technique, l'administratif et l'infrastructure. Côté technique, la licence CAF oblige les clubs candidats à disposer d'une structure technique efficace et où les postes de directeur technique des jeunes et les conditions de travail des sections jeunes surtout sont validées. Chaque club doit avoir une entité technique moderne, efficace dans le sens que les catégories d'âge sont respectées et répondent aux normes internationales. Ce ne sont pas uniquement les seniors qui doivent se doter d'organisation technique, mais les jeunes aussi. Il faut que le club soit doté d'une structure technique où le directeur technique peut planifier et gérer les affaires des jeunes. Deuxième critère fondamental pour l'octroi de la licence CAF, c'est l'administration. C'est-à-dire que le club doit être muni d'une structure administrative claire et qu'il utilise des outils de management qui permettent au club d'optimiser ses ressources et de gérer via une stratégie et des objectifs préfixés. Ce domaine veut dire aussi que le club doit être quitte avec l'Etat en ce qui concerne la fiscalité et qu'il doit respecter les normes de gouvernance et de transparence. Ce critère suppose que le club est une société sportive qui doit délivrer des états financiers à ses actionnaires et à l'Etat. Troisième critère, c'est l'infrastructure, élément incontournable pour le développement du football. Si un club n'a pas une infrastructure (terrain, vestiaires, éclairage, entretien périodique...), adéquate et digne d'une compétition continentale de valeur, et si ses footballeurs ne s'entraînent pas dans des conditions respectables, il n'aura pas la licence CAF. Ce critère est expliqué par la détérioration de la plupart des stades sur lesquels se jouent les matches de la Coupe de la CAF et de la Ligue des champions. Un club professionnel est un club qui doit alors développer une infrastructure sportive de qualité, comme c'est le cas des clubs européens. Projet pratique ou pas ? Nos clubs sont-ils en mesure de remplir les conditions de la licence CAF ? Si sur le plan technique, nos clubs sont plus ou moins bien présents avec des directeurs techniques et des sections jeunes plus ou moins bien organisés (on parle bien sûr des clubs engagés en Afrique), les deux autres critères sont loin d'être respectés. Pour l'administration, on a certainement des clubs qui ont un staff administratif spécialisé, mais ces clubs ne sont pas encore au stade de sociétés sportives qui gèrent les différents aspects du management, comme le marketing (communication, vente des accessoires, sponsoring...), la fiscalité, la comptabilité selon les normes retenues, la GRH, etc. On n'est pas encore arrivé à ce stade de statut pour nos clubs. Dans ce cas, comment la CAF va-t-elle trancher par rapport à nos clubs ? Par exemple, nos clubs ne paient pas d'impôts, faute de cadre juridique adéquat et en attendant toujours cette loi des structures sportives encore en phase de réflexion et qui ne fait pas l'unanimité. Si la FTF veut que les clubs obtiennent la licence CAF, il faut passer à une approche de sensibilisation et de formation pour les dirigeants des clubs. Il faut que ces dirigeants comprennent ce qu'est le critère administration et quels sont les outils de gouvernance et de contrôle qu'il faut satisfaire. Pour ce qui est de l'infrastructure, quels terrains avons-nous, quel entretien se fait sur nos terrains de moins en moins praticables. Une chose est sûre, nos clubs qui jouent les compétitions africaines peuvent facilement remplir ce critère. Radès, El Menzah, Sousse ou Sfax sont des sites où l'on peut jouer des matches dans des conditions très confortables. La licence CAF est donc une option qui va faire basculer nos clubs vers le palier des clubs professionnels. Cela ne va pas être facile ce passage vers la licence CAF du moment que les clubs sont encore mal organisés et qu'on est loin de disposer d'une infrastructure moderne au sens général (la logistique et le complexe sportif plutôt que le terrain de jeu). Avant tout cela, la FTF doit expliquer minutieusement ce concept à nos clubs. Si cela ne se fait pas, on sera toujours dans l'incompréhension et dans un flou qui va nous faire perdre beaucoup de temps et des chances d'être à la page sur le plan africain.