Le monde sportif est en émoi : la raison est toute simple et essayer d'en faire une exception est une faute encore plus grave que de shunter le problème, passant outre toutes les recommandations qui s'imposent lorsqu'on veut faire du sport de haute compétition pour lequel il faudrait consacrer des moyens. Une internationale, une championne de lutte a profité, de son passage en France pour fausser compagnie à la délégation. C'est grave et inacceptable. Parce que cette fugue est le fait d'une jeune fille, notre fille, âgée de dix-huit ans. Que va-t-elle devenir dans le cas où cette fugue est née d'un simple coup de tête, non préparée et qu'elle se lance dans le vide sans parachute ? On n'a pas précisé si elle avait de la famille et si elle allait la rejoindre ou rallier un club qui la prendra en charge, la couvera, jusqu'à ce que les choses se décantent. Comme nombre de ses camarades boxeurs et autres, on lui offrira la nationalité du pays où elle compte résider et le tour est joué. Bien entendu, c'est exactement ce qui se passe avec nos médecins, ingénieurs, informaticiens et autres hauts cadres que les pays du nord de la Méditerranée attirent pour pallier les insuffisances de ces pays. Dans sa déclaration à une station de la place, le directeur technique a reconnu que la famille de cette internationale, sur «laquelle nous fondons beaucoup d'espoir, perçoit une bourse de cent dinars» : "La fédération a parié sur elle : on lui a accordé une bourse mensuelle de 100 dinars. Son dossier de résidence a également été traité favorablement au Centre de préparation de l'élite, vu sa situation sociale difficile", a-t-il ajouté. Nous l'invitons de se munir de cent dinars et d'aller faire le marché : A moins qu'il ne l'ait jamais fait, il s'en sortira avec une botte de persil, quelques patates et des déchets de viandes blanches. Le fait même de déclarer ce genre d'insanités prouve que cette personne vit en dehors de son siècle. Il y a quand même des fondamentaux à respecter, surtout lorsqu'il s'agit de pratiquer un sport (de combat en l'occurrence), non pas pour le plaisir mais pour combattre sur les arènes internationales. Il s'agit de s'entraîner des heures et des heures souvent deux fois par jour, de souffrir dans sa chair. Alors que l'athlète se doit de payer de sa personne, il a parfois le ventre vide ! Voilà la vérité que l'on a escamotée, sciemment ou par inadvertance cela revient au même. Il est heureux que le ministère de la Jeunesse et des Sports vient de se doter d'un nouveau directeur général rompu aux compétitions de haut niveau, et d'une responsable du sport féminin qui en connaît un bout sur cette question de jeunes de grande valeur qui se débattent dans des problèmes sans fin. A l'occasion d'un rendez-vous avec un athlète, nous avons eu la surprise de notre vie en voyant de quelle manière vivent les jeunes du Lycée Sportif. C'est une honte avec cette «administrite» qui leur pourrit la vie et ces conditions anormales dans lesquelles se trouvent ces jeunes filles et garçons. A voir ce spectacle, cette situation intenable, nous ne pouvons conclure qu'une seule chose : ce que rapportent nos jeunes champions tient du miracle. Et dire que cela ne coûte que cent dinars par mois ! Nous sommes absolument contre ces escapades qui portent atteinte au prestige du pays, mais cette jeune lutteuse a rendu service au sport, en déclenchant une enquête pour voir, dans sa globalité, les problèmes de cette élite qui mérite plus d'égards, plus de moyens et plus de compréhension. Il est peut-être possible de rentrer en contact avec cette championne pour la raisonner, mais en se munissant d'arguments convaincants pour la faire revenir, car c'est elle qui a fini par se décourager et de décider qu'elle se doit de prendre le risque de sa vie. Cela nous rappelle l'aphorisme philosophique de Blaise Pascal : «Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point». Si la situation ne change pas et que le sport demeure une simple occasion de se pavaner devant les caméras, la situation est appelée à empirer. Il faut réagir et vite !