Côté couverture sociale et sécurité tout court, les marins-pêcheurs ne sont nullement à envier. Ils sont même à plaindre, tant leurs vieux jours sont durs, à l'image du métier qu'ils ne cessent d'exercer au-delà de leur retraite fort attendue. Il faut dire que leurs pensions sont dérisoires et fort maigres. Certains ont bien voulu apporter leur témoignage sur la dure vie qu'ils mènent et le danger auquel ils s'exposent pour un gagne-pain de misère. Pour peu qu'on prête une oreille attentive aux propos des marins-pêcheurs, l'on découvre que cette corporation endure des difficultés énormes, tant lors de l'exercice de leur métier qu'après,lors de retraite. Cette dernière est loin d'être dorée. Déjà, leur métier à risques est loin d'être une sinécure. A chaque instant ,ils sont exposés aux multiples dangers de la mer. Le dernier drame survenu à Mahdia, ne constitue, en fait, qu'un exemple parmi tant d'autres. Mais l'on reste tout de même ahuri quand on apprend que les pensions des retraités oscillent entres 100 et 300 dinars, après tant d'années passées à affronter la mer, les rigueurs des intempéries, l'humidité et la salinité corrosive et aux imprévus. Romdhane Zaouali, marin-pêcheur, âgé de 63 ans, se confie à nous. Attablé à la terrasse d'un café, près du port, le visage buriné, un bonnet bien vissé sur la tête, tirant sur sa cigarette avec délectation, il s'est frotté à la mer, depuis l'âge de 13 ans, soit 50 années de métier sans discontinuer. Il précise : «J'ai cotisé, en versant à la Cnss, la somme de 67 dinars, tous les trois mois. Une fois passé à la retraite, je touche 153 dinars ,chaque mois. Inutile d'ajouter que cette somme ne suffit même pas à mes besoins personnels, sans parler de ceux de la famille. J'ai perdu toutes mes dents au cours de l'exercice de ce métier, et j'ai changé deux fois mon dentier. Je refuse de faire la manche, c'est pourquoi je me suis remis au boulot, après la retraite, en m'adonnant à la pêche côtière.» Forcés de reprendre le métier après la retraite Pour en savoir un peu plus, La Presse s'est déplacée chez certaines familles des victimes du naufrage du chalutier «El Baraka». De ces visites, une impression se dégage : toutes ces familles éplorées, très affectées et inconsolables, font preuve de beaucoup de dignité, de force d'âme, voire de courage. Il faut mentionner aussi cet élan de solidarité pour leur assurer réconfort et soutien. Feu Ahmed Hafsi, victime du dernier naufrage, avait 61 ans. Il a exercé durant 40 ans le métier de pêcheur professionnel. Il touchait une pension fort maigre, d'autant qu'il était diabétique et le traitement nécessitait des dépenses au-dessus de ses moyens. Il était obligé de reprendre le travail, surtout que ses enfants poursuivent encore leurs études. Feu Hassen Sfar, une autre victime du dernier naufrage, a été pêcheur durant 35 ans. Un voisin à lui assure que le défunt souhaitait, à chaque sortie en mer, arrêter le travail, tant il se sentait exténué. Il a laissé 3 filles et un jeune garçon. Sa maigre pension ne lui permettait pas d'entretenir sa famille. Feu Mohamed El Mehdi, avait, lui, 50 ans, il a travaillé durant 22 ans en tant que pêcheur. Aucune ressource pour la famille. Le geste du gouvernement C'est là une dure réalité partagée par les autres familles affectées. Un état de dénuement total,de détresse aussi, mais une grande dignité. Ce qui rassure un peu, c'est le geste du gouvernement fort apprécié et consistant à assurer un emploi à un membre de chaque famille des victimes du naufrage du chalutier naufragé. Outre le soutien moral, psychologique et matériel qui fait chaud au cœur, de la part de tous.