Il y a, bientôt, deux ans, les fameux « Panama Papers » avaient mis au jour plus de 11,5 millions de documents confidentiels classés pour longtemps « top secret ». Fuitées d'un cabinet d'avocats suisse en 2015, déjà reconnu comme un véritable carrefour des paradis fiscaux, ces indiscrétions, remontant même aux années 70, avaient mis à nu des affaires de fraude et de blanchiment d'argent liées à des monarques du Golfe, chefs d'Etat, politiques, hommes d'affaires, milliardaires, sociétés écrans et d'autres célébrités du monde entier. Sous nos cieux, leur divulgation, le 3 avril 2016, sur le site tunisien « Inkyfada » avait, alors, défrayé la chronique, provoquant ainsi une vive polémique. D'après la même source, se souvient-on encore, une dizaine de politiques, d'anciens ministres et d'avocats d'affaires tunisiens y ont été gravement impliqués. Le secrétaire général de Machrou Tounès, Mohsen Marzouk fut le premier à être nommément accusé par ledit site, pour avoir tenté de créer, en décembre 2014, sa propre société offshore aux îles Vierges. Mais, l'homme avait, en réponse, démenti toute intention de placements financiers à l'étranger. Réagissant à ces informations livrées par un Consortium international de journalistes d'investigation (ICIJ) basé à Washington, le procureur de la République près le Tribunal de première instance de Tunis avait, le lendemain, ordonné l'ouverture d'une enquête judiciaire sur l'affaire « Panama Papers ». De même, une commission d'enquête a été, parallèlement, constituée à l'ARP. Jusque-là, même pas un mot sur la question. Silence Radio ! Un livre de Hichem Allam, journaliste égyptien Pas plus tard qu'hier, Hichem Allam, journaliste égyptien, membre du ICIJ, est revenu sur le côté invisible de l'iceberg. « Panama Papers, ce qui n'a pas été dit », tel est l'intitulé de son livre d'investigation, paru en 2ème édition. Maintes fois primé, ce livre a été présenté dans une conférence de presse, tenue, hier matin, au siège du Snjt à Tunis. Soit, la suite de ce qui a été évoqué en 2016, dont l'effet était, de par le monde, retentissant. « Sauf en Tunisie, où il y a encore silence strident », dénonce, dans un bref mot d'ouverture, le président du Snjt, Neji Bghouri. Pourtant, ajoute-t-il, plusieurs personnalités tunisiennes ont été pointées du doigt. Pour l'auteur du livre, de tels documents reflètent bel et bien l'apport de ce genre journalistique dans la lutte anticorruption. « Un plus qui s'ajoute au journalisme arabe », dit-il. Comment savoir exploiter à bon escient un tel flux d'informations documentées ? Tel un marin-pêcheur dans une mer poissonneuse, il sait ce qu'il veut chasser, compare-t-il. « Pour nous, dans le cadre du ICIJ, nous avons possédé des « Panama Papers » tout au long d'une année avant de les croiser avec d'autres documents y afférents», relève-t-il, notant, ici, que les 200 journalistes adhérents audit Consortium international s'étaient, d'ailleurs, accordés sur la date du 3 avril 2016 pour publier des articles sur le sujet. « Une sorte d'unanimité étroite pour ne pas déroger aux règles professionnelles», ainsi justifie-t-il. En une vingtaine de chapitres, le livre vient remettre à la surface une multitude de scandales de corruption dans lesquels sont impliqués les gros poissons du marché financier dans le monde. Il y cite des sociétés offshore servant d'écran face au blanchiment d'argent et à l'évasion fiscale, des rois et émirs saoudiens corrompus, « Alâ Moubarek, l'homme de l'ombre », « le trésor perdu de Kaddafi », les espions et les hommes forts des renseignements, les scandales de la FIFA, « les amis riches de Poutine », les tableaux d'art volés et bien d'autres affaires qui traînent encore dans les coulisses du pouvoir.