Adopter la loi d'urgence économique, réaliser les grandes réformes économiques, appliquer la loi sur l'enrichissement illicite, faire face à la contrebande et à l'évasion fiscale jusqu'à la confiscation des biens mal acquis de certains hommes d'affaires, interdire l'importation des produits de luxe, contrôler le commerce de franchise, inciter les Tunisiens à l'étranger à ouvrir, en Tunisie, des comptes épargne en devises… Le programme d'urgence que propose le Ftdes pour sortir de la crise. Le Forum préconise également un modèle alternatif du développement basé essentiellement sur la culture de l'économie solidaire Tant qu'il n'y a pas satisfaction, il y a toujours un sentiment de colère et de frustration qui se traduit par des tensions sociales en continu, sans relâche ni répit. Ainsi, le Ftdes, lors d'une conférence de presse, tenue jeudi à son siège à Tunis, a fait le point de la situation : plus de 6000 mouvements sociaux à caractère violent et protestataire ont été recensés au cours du premier semestre de l'année en cours. Ces données statistiques ont également fait montre de tendance assez grave au suicide, dépassant au bout de six mois 280 cas signalés. Kairouan, chiffres à l'appui, figure en tête des gouvernorats les plus chauds, avec plus de 800 manifestations de protestation, suivi de Tunis (554), Gafsa (552) et Sidi Bouzid (548). Cette tendance à la hausse des mouvements sociaux s'explique, selon M. Messaoud Romdhani, président du Ftdes, par la perte de confiance dans la politique sociale de l'Etat et par la non- tenue des promesses du gouvernement en place. Soit, la sourde oreille face aux demandes, aussi légitimes soient-elles, à l'emploi, au développement régional, à l'eau, à l'éducation et à un environnement sain est la cause de toute révolte populaire. Cette situation intenable voire chaotique est due, de l'avis de l'économiste Abdeljalil Bédoui, membre du Ftdes, à l'absence d'une vision globale qui tienne en compte des besoins et attentes d'une population longtemps marginalisée et privée des fruits de la croissance. Aujourd'hui, elle s'est sentie au même stade de l'exclusion, avec un ancien modèle de développement qui a atteint toutes ses limites. Un modèle socioéconomique qui a atteint ses limites depuis fort longtemps. Recettes exceptionnelles ! M. Bédoui a brossé un tableau noir, où les voyants économiques sont tous au rouge. Avec un faible taux de croissance, phénomène du chômage endémique situé à plus de 15%, endettement dépassant 70%, dépréciation du dinar, déficit de la balance commerciale et bien d'autres indicateurs revus à la baisse, il est question de réviser les comptes et parer au plus urgent. M. Bédoui a, récemment, publié un ouvrage intitulé: «Quel programme urgent de sauvetage et quel développement alternatif d'avenir ?», dans lequel il propose des solutions adaptées à l'état des lieux économique. Soit, à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles : «Adopter la loi d'urgence économique, réaliser les grandes réformes économiques, appliquer la loi sur l'enrichissement illicite, faire face à la contrebande et à l'évasion fiscale jusqu'à la confiscation des biens mal acquis de certains hommes d'affaires, interdire l'importation des produits non nécessaires dits de luxe (parfums et autres), contrôler tout commerce de franchise, inciter les Tunisiens à l'étranger à ouvrir, en Tunisie, des comptes épargnes en devises». Et M. Bédoui de recommander qu'il faut arrêter d'adopter des recettes toutes faites. Par ailleurs, l'auteur n'a pas manqué de schématiser les grandes lignes d'un modèle alternatif du développement basé essentiellement sur la bonne volonté politique, la culture de l'économie solidaire et sociale, l'initiative privée, la concurrence loyale et l'ouverture sur les marchés extérieurs. Sans pour autant retomber dans le piège du capitalisme sauvage qui nie toute approche humaniste. Seulement que ces solutions urgentes ne soient pas appliquées hors de leur contexte, cela veut dire qu'elles tiennent compte de toutes les réformes nécessaires suggérées. Mais, de tels choix économiques seraient-ils en mesure d'apaiser les tensions sociales ?