La gestion de plus en plus rigoureuse de nos frontières et le durcissement du combat mené par les pays d'accueil y sont assurément pour quelque chose, mais… Selon des sources policières et douanières concordantes, de moins en moins de nos compatriotes prennent la mer, comme en atteste le nombre de plus en plus réduit des «harragas» capturés, ces jours-ci, en ce sens que quelque 34 personnes le furent au cours des trois derniers mois. Loin, très loin des 124 arrestations enregistrées un trimestre auparavant. Parallèlement, révèlent les mêmes sources, le nombre d'aventuriers de la mer de nationalité tunisienne appréhendés par la marine italienne sur le chemin de l'île de Lampedusa, s'est également sensiblement rétréci au cours des cinq derniers mois, par rapport à la situation explosive qui prévalait jusque-là. Et c'est au moins ça de gagné, quand on sait que la Tunisie avait perdu, depuis la révolution, des milliers de ses jeunes, qui victimes de noyades, qui cloîtrés dans les prisons d'Europe, qui encore en vulgaires SDF dans les rues du Vieux continent. Les raisons d'une régression Il est donc clair que les temps sont aujourd'hui durs pour les candidats à l'émigration clandestine et que les tentations des embarcations de fortune partant des côtes ont beaucoup perdu de leur cote auprès des jeunes. Trois facteurs principaux y sont pour quelque chose. Premièrement : le regain de rigueur dans nos frontières maritimes. En effet, celles-ci, c'est nettement visible, sont devenues mieux gardées, moins poreuses, à la faveur des renforts (en hommes, en équipements et en logistique) acheminés dernièrement. Cela a donné lieu à une omniprésence des forces de la Police, de la Garde nationale et de l'Armée aussi bien le long du littoral que dans les eaux territoriales. Deuxièmement : la diminution du nombre d'organisateurs des traversées, et cela suite à l'arrestation, ces derniers mois, de plusieurs d'entre eux qui constituaient l'épine dorsale de ce trafic, particulièrement sur les côtes de Monastir, Mahdia, Kélibia et surtout Kerkennah par où transitaient plus de la moitié des harragas. Troisièmement : le durcissement des méthodes appliquées par la France, Malte, la Grèce et, plus fermement encore, par l'Italie dans leur combat contre les flux des migrants. Les autorités italiennes, sans doute lassées de voir leur pays continuer de payer le prix fort en termes de gestion des arrivées clandestines, ont fini récemment par opter pour la politique du bâton, en ordonnant la fermeture pure et simple de leurs ports aux embarcations de la mort. Celles-ci sont, de la sorte, condamnées à faire du… surplace en pleine mer, avec tous les risques qui en résultent (faim, soif, état de santé détérioré et, parfois, noyade…) à moins d'un… miracle, sous forme de l'intervention des bateaux de secours relevant des ONG internationales agissant dans le cadre de leurs œuvres humanitaires. Quant à ceux qui réussissent, d'une façon ou d'une autre, à brûler la politesse aux garde-frontières italiens, en gagnant le sol de la péninsule, leur joie sera de courte durée, car, une fois arrêtés, ils sont immédiatement incarcérés soit dans les centres de détention provisoire aux conditions de séjour très difficiles, voire insupportables, soit carrément dans une prison… avant leur extradition vers leurs pays d'origine. Et comme un malheur n'arrive jamais seul, voilà que l'Espagne, la… contamination aidant, décide, à son tour, d'emboîter le pas à l'Italie, après avoir, jusque-là, longtemps servi de refuge aux embarcations de la mort interdites d'accès aux côtes italiennes, françaises, grecques et maltaises. Adieu tentation ? Tout cela pour dire que le temps est désormais à la morosité, si ce n'est pas au désespoir pour les candidats à l'émigration clandestine qui, avec ces menaces grandissantes, signe du revers de la médaille, devront tourner leur langue sept fois dans la bouche avant de dire oui à l'aventure.