NANTES (Reuters) — Les risques d'inondations à La Faute-sur-Mer (Vendée), où sont mortes noyées 26 personnes lors du passage de la tempête Xynthia, étaient connus mais n'auraient pas été suffisamment pris en compte par les autorités locales. Cette petite localité recense la moitié des victimes de la tempête qui a balayé samedi et dimanche la France. Or, un rapport de la Direction départementale de l'Equipement (DDE) de la Vendée rendu public en octobre 2008 appelait à «raviver la mémoire du risque dans les consciences collectives» sur cette zone de marais asséchés gagnée sur la mer, à la manière des «polders» hollandais. «La conjonction de deux phénomènes, de crue dans l'estuaire du Lay (la rivière qui sépare L'Aiguillon-sur-Mer de La Faute-sur-Mer) et de submersion marine, pourrait avoir un impact très important sur les zones densifiées à l'arrière d'un réseau de digues vieillissant», écrit son auteur, Stéphane Raison. Selon cet ingénieur des Ponts et Chaussées, à l'époque chef du service maritime et des risques à la DDE de Vendée, plus de 3.000 maisons auraient été construites dans les années 1980, derrière une digue en terre créée après de précédentes tempêtes en 1926 et 1929. «Elle a été entretenue dans le temps par apport de matériaux divers, sans contrôle de leur qualité ni de leur provenance», poursuit Stéphane Raison, désormais directeur de l'aménagement du port de Dunkerque (Nord). «Cet ouvrage n'a jamais fait l'objet d'un diagnostic approfondi de la part du maître d'ouvrage», ajoute-t-il. «La rupture des digues sur ce secteur engendrerait des dégâts majeurs aux biens et aux personnes en regard de la carte des aléas», est-il encore indiqué dans son rapport. Forte pression touristique et immobilière Reste que les mises en garde des services de l'Etat n'ont pas forcément été suivies par la petite station balnéaire, où la pression immobilière et touristique est très forte. Le maire de La Faute-sur-Mer avait ainsi obtenu gain de cause devant la cour administrative d'appel de Nantes (Loire-Atlantique) face à la préfecture de Vendée, pour avoir accordé un permis de construire à un camping en bordure de l'estuaire de la rivière Le Lay. «S'il a pu être constaté au cours du siècle écoulé, d'une part, l'ouverture de brèches dans le massif de dunes (...) et d'autre part, la rupture, en 1999, d'une autre digue en terre de l'estuaire, il est constant que la conjonction de ces deux risques ne s'est jamais réalisée», justifiait la juridiction dans un jugement en date de décembre 2003. «Tout ce qui a été construit l'a été en zone constructible avec l'accord des services de l'Etat», affirmait pourtant lundi René Marratier, maire de La Faute-sur-Mer, lors de la venue de Nicolas Sarkozy auprès des sinistrés de la baie de L'Aiguillon. Le Président de la République a annoncé à cette occasion une aide de trois millions d'euros, une double inspection sur les causes de la catastrophe avec un premier rapport dans les dix jours, un plan de renforcement des digues et des aides pour les agriculteurs. «Il faut qu'on s'interroge pour savoir comment en France au XXIe siècle des familles peuvent être surprises dans leur sommeil et être noyées dans leurs maisons», avait ajouté Nicolas Sarkozy plus tard, lors d'une table ronde à la préfecture de La Rochelle avec élus locaux et les services de l'Etat. «Nous devons faire de toute urgence toute la lumière sur ce drame inacceptable et incompréhensible», avait-t-il souligné.