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Des droits de l'Homme comme droit à la culture
Tribine : Par Pr Mohamed ZINELABIDINE, directeur général de la Cité de la culture (UGPO)
Publié dans La Presse de Tunisie le 12 - 12 - 2010

Voltaire disait : «Le présent est affreux s'il n'est point d'avenir»
Cette citation de Voltaire serait-elle l'acception même de la modernité qui fait du travail, de la foi en l'avenir et du progrès ses lettres référentielles ? Nul doute que le paradigme de la modernité occidentale est variable, selon les contextes sociaux qui le portent. Il a même cultivé, au fil du temps, ses propres réticences et résistances. Toute culture sociale et politique s'en accommode à sa façon, ayant une mémoire, une histoire et un habitus propres. L'universalité de ces droits porte en effet l'aspiration de l'homme à être réactif par rapport à sa citoyenneté, participatif quant aux modes de sa représentativité sociale, dans les deux systèmes législatif et exécutif. Force est quand même de constater que le schéma théorique voulu par les lumières et l'Occident est à admettre selon des niveaux de variabilité et échelles d'interprétation en Occident comme par ailleurs. D'où ce constat exprimé par Jean Jacques Rousseau pour qui : «On jouit moins de tout ce qu'on obtient que de ce qu'on espère».
Si la modernité occidentale est entendue comme modèle généralisable, transposable et réalisable partout au sceau des droits universels, la réalité renvoie néanmoins à bien plus de précaution, nuance et relativité. Et si les droits universels sont à l'ordre du jour, n'omettons pas les devoirs de l'Etat à circonscrire leurs champs et latitudes sur le terrain. Et pour mémoire, cette citation du Général de Gaulle, détournée de son contexte, et pour qui : «l'Etat n'a pas de sentiment, il n'a que des devoirs». Entre droits génériques et devoirs ou raisons d'Etat, il convient peut-être de resituer le débat sur les droits de l'Homme. Je prendrai pour cela l'exemple de la culture, et plus particulièrement le droit à la culture comme paramètre de confirmation ou d'infirmation des thèses précédentes.
Les transmutations sociales et politiques de la culture se déclinent aujourd'hui comme un fait au cœur même des relations internationales. En exergue, sa cristallisation au-devant de la considération géostratégique occidentale avec l'exacerbation de l'islamophobie, à titre d'exemple, le retour de l'identitaire et du néo-conservatisme judéo-chrétien nourri au choc des civilisations comme affront entre religions et congrégations humaines. Où en sommes-nous donc du droit humain à la diversité et au respect des religions et des civilisations ? Nous pensions nous départir définitivement des thèses de Huntington, de Fukuyama de Brezinski ayant entaché l'Islam de toutes sortes de confusions et d'amalgames entre le politique et le symbolique. Mais les écrits de Sylvain Gouguenheim et son livre paru en 2008 autour d' : « Aristote au Mont-Saint-Michel: les racines grecques de l'Europe chrétienne » réintroduisent un véritable pamphlet d'une rare violence, contre cette religion encore une fois malmenée, un réquisitoire loin de réconcilier les réfractions. Mais où va-t-on ? De quel droit devrions-nous nous réclamer? Cette escalade idéologique d'essence culturelle n'est pas sans nous rappeler à quel point il devient problématique d'appréhender la culture dont les déclinaisons se pervertissent en devenant aussi incertaines que tendancieuses.
Autre fait saillant, c'est que la culture se décline, de surcroît, comme forme d'homogénéisation et de modélisation par les grandes puissances mondiales aux prises avec leurs progrès scientifiques, technologiques et industriels. De quoi bannir les mémoires culturelles et le cumul des histoires individuelles et collectives. Les « cultures de terroir » sont menacées par les stratégies commerciales référées à la production de masse qui use du sensible et de l'émotionnel au grand bonheur des rares multinationales disposant abusivement de l'économie du jouissif, du spectaculaire et du récréatif. Au-delà des croîts technologiques en la matière et le perfectionnement des supports interactifs de la création artistique, la chute du mur de Berlin, la fin du communisme et l'avènement de la globalisation depuis 1989 ont été autant de facteurs catalyseurs du fossé séparant les cultures, au regard du libre-échange, de l'économie de marché et l'impact des réseaux jumelés de la télécommunication et de l'industrie audiovisuelle. Voilà qui ne dément pas sur une réalité qui subordonne l'affect au profit du quantitatif, apprivoisant au passage l'inconscient et le privatif. Si tel est le cas des pays les plus industrialisés ayant misé sur la culture pour privatiser l'entreprise créationniste, libérer les investissements et convaincre de leurs contingences, qu'en est-il des droits ou devoirs de certains pays quant à la sauvegarde de leurs cultures et patrimoines millénaires, menacés dans leurs existence et survie ? Où en sommes-nous du processus Unesco de la Déclaration universelle de 2001 sur la diversité culturelle puis la Convention de 2005 sur "la diversité des expressions artistiques et culturelles" ? La mondialisation peut-elle vraiment rimer avec les droits à la culture, les principes de diversité et les droits de la culture ?
L'Occident continuera sans doute de louer la prépondérance du droit, de la démocratie, de la bonne gouvernance, mais devrait-t-il en rester là ? Quel impact en recueillir sur le terrain lorsqu'on mesure toutes les inégalités, les deux poids deux mesures, les grands écarts de développement entre les pays du sud et les pays du nord ? Qu'en est-il du droit à la mobilité et à l'échange interculturel devant les barrières, les douanes, et le climat de suspicion qui défavorisent artistes, jeunes et moins jeunes et les empêchent de partager leur savoir et savoir-faire sans tabous, sans réserves ni phobie. Le droit à la culture devrait être pourtant inaliénable et l'Occident qui s'en prévaut tarde hélas à l'accorder, privilégiant l'option sécuritaire à ce qui aurait pu raffermir des liens, consolider des actions communes et œuvrer pour le respect des différentes cultures et religions pour un monde vivable et mieux partageable.
En dépit de cette triste réalité géopolitique, la Tunisie peut s'enorgueillir de plaider pour une politique de droit à la culture et au savoir culturel. D'autant que le droit est plus appréciable lorsqu'il émerge de la difficulté, de la rareté des moyens, du désir de servir l'autre, d'assurer l'équité sociale. C'est de cet esprit de liberté et d'ouverture que la culture tunisienne parvient à traduire son ingéniosité, son élan et sa renaissance. Et pour cause, le Président Ben Ali fait sienne une politique initiatique d'aide à la création, d'édification d'institutions référentielles en fonction des secteurs d'activités (la Bibliothèque nationale, le Théâtre national, le Centre des musiques arabes et méditerranéennes, le Centre national de traduction, le Centre national de la danse..…), une généralisation des lieux de médiation et de création artistiques autour des festivals locaux, régionaux et internationaux (dépassant les 350 festivals), encouragement de la société civile à exercer un rôle associatif dans les domaines de l'art et de la culture par l'octroi de subventions annuelles, établissement des structures de formation nationales et régionales, la prise en charge des créations artistiques indépendantes dans des lieux d'accueil et de résidence mis à la disposition des artistes, en plus de la mise en place de régimes sociaux spéciaux venant en aide aux artistes nécessiteux. Ce n'est donc pas un hasard si le budget alloué à la culture en Tunisie, au titre de 2010, avoisine les 1,3% du budget national, ce qui témoigne de la vivacité d'un secteur culturel propulsé au cœur de l'œuvre du Changement et du développement. L'artiste en est à la fois vecteur et dépositaire. Si les instances internationales s'accordent aujourd'hui à reconnaître les droits accordés en Tunisie à la culture à travers toutes sortes de mérites politiques, économiques, sociaux, comme en témoignent la Banque mondiale, le FMI, le FAO, l'OMS, l'Unesco, l'Isesco, l'Alecso… c'est qu'une raison d'Etat y préside, faisant du citoyen une aspiration au quotidien et un engagement renouvelé.
Les droits à la culture sont des droits de démocratie culturelle et le Président Ben Ali ne cesse de plaider pour une meilleure répartition des richesses et des ressources culturelles matérielles et immatérielles entre la capitale et les régions intérieures pour inculquer aux Tunisiens le sens inclusif et porteur d'une culture intégrale source et vecteur vivifié du changement social et économique, de tous pour tous. Il considère que la culture est au cœur de tout apprentissage, celui de l'enseignement, du droit à l'informatique et aux multimédias, celui des femmes à émuler avec l'homme dans l'ensemble des registres de la vie citoyenne. C'est le droit à l'art et à la connaissance sensible, le droit à la création artistique, à l'identité enracinée et entrouverte aux perspectives du dialogue interculturel et aux échanges interhumains dans le respect de la différence et l'initiation au rejet de la xénophobie, du repli sur soi et l'extrémisme sous quelque forme que ce soit. La culture intègre, selon lui, le droit au travail dans le dessein d'assurer la dignité de l'homme, en ce que la culture peut ou doit remplir et accompagner sa vocation de médiatrice pour créer des emplois et générer des volontés. C'est de surcroît le droit à l'exercice économique dans ce qu'il peut apporter au pays de renouveau et de croît à l'échelle nationale et internationale. C'est en même temps un devoir de stigmatiser une image valorisée de la Tunisie à l'échelle du monde, en rappelant ses référents historiques, ses racines plurielles, ses fondements faits d'arabité et d'Islam réceptif et réactif dans l'universalité des valeurs de l'humanité au XXIe s. Un devoir de reconnaissance de l'histoire sédimentée de notre pays à travers la sauvegarde et la valorisation de son patrimoine naturel et culturel, un devoir de civisme et de recherche pour les créateurs.
La réalité des droits de l'Homme se mesure aux réalisations et non aux lettres d'intention. La Tunisie continuera donc de mûrir ses acquis en termes de droit à la culture et œuvrera sans doute à les ouvrir encore plus aux vérités et besoins en cours. La conscience qu'elle en fait, pour paraphraser Confucius : «C'est la lumière de l'intelligence pour distinguer le bien du mal» dans la mesure où l'art autant que la culture sont à la fois aspiration et inspiration quotidiennes de l'homme et des valeurs humaines pour un monde de partage, de diversité et de pluralité.


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