Caroline Fourest est journaliste, essayiste et écrivain. Très médiatisée depuis son débat télévisé avec Tarak Ramadhan, elle poursuit à coups de livres, d'émissions, d'articles et de pamphlets un combat engagé depuis longtemps contre tous les intégrismes. Cofondatrice de la revue féministe, antiraciste et laïque Pro Choix, elle a écrit de nombreux essais sur l'extrême droite, les intégrismes juifs, chrétiens ou musulmans. Elle a reçu le Prix de la laïcité en 2005, et le Prix du livre politique en 2008. Elle tient une chronique «Sans Détours», et a «Carte Blanche» sur France Culture. Elle enseigne les «Multiculturalisme et universalisme» à Sciences Po à Paris. Nous l'avons rencontrée en marge de la réunion du Réseau des femmes de la Méditerranée tenue récemment à Marrakech. «En fait, mon combat a commencé en tant que démocrate féminine, et contre l'extrême droite française chrétienne. Des amies algériennes me disaient que je devais m'intéresser à l'intégrisme musulman dans mes travaux. Mais à l'époque, j'avais une culture générale sur l'Islam à rattraper. De plus, il était difficile de se battre contre le Front National, et de s'intéresser à l'intégrisme musulman. Mais après le 11-Septembre, j'ai décidé de combattre les intégrismes d'où qu'ils viennent. Et j'ai commencé à travailler sur l'intégrisme musulman car c'était le seul qui ne me faisait pas traiter de christianophobe». Dans son dernier livre, «La dernière utopie», Caroline Fourest explique comment une mauvaise compréhension multiculturaliste au nom de laquelle on tolère l'intégrisme dans certains pays occidentaux est en train d'essouffler l'utopie universaliste. «Je crois qu'il faut l'idéal humaniste. La déclaration des droits de l'homme est le plus abouti des textes fondamentaux qui mérite d'être défendu à nouveau comme un idéal d'humanisme. Mon livre peut aider à éviter les deux tentations : tout pardonner aux intégristes au nom du multiculturalisme, et d'une forme de culpabilité ou, au contraire, réagir par la xénophobie et l'intolérance. Entre les deux, il y a de la place pour une société laïque, tolérante et égalitaire». De son débat télévisé avec Tarak Ramadhan, Caroline Fourest ne garde pas un bon souvenir «Cela a été l'aboutissement de cinq années de décryptage, d'analyses, et d'un livre à l'issue duquel j'exprime de nombreux doutes. Bien sûr, après, on m'a accusée d'islamophobie. Mais cela n'a trompé que ceux qui le voulaient bien. D'ailleurs, on m'a aussi traitée de «minariste» parce que je me suis battue en Suisse contre la droite populiste chrétienne qui a interdit les minarets». Elle parle de son prochain livre, celui qu'elle coécrit avec Talisma Nasreen : Libre de le dire, discours très franc sur la laïcité des femmes, et les religions. Et elle évoque le film documentaire qu'elle est en train de réaliser‑: cent portraits de femmes musulmanes à travers le monde qui se racontent. Des femmes exceptionnelles—astronomes, imams, ou sexologues — mais aussi des femmes de minorités opprimées qui n'avaient encore jamais parlé. A ce jour, soixante-dix témoignages sont enregistrés.