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La traque à l'argent sale
Commission nationale d'investigation sur les questions de corruption et de malversation
Publié dans La Presse de Tunisie le 05 - 02 - 2011

• Plus de huit cents dossiers déjà soumis à la commission
• «Le but est d'envisager un système de prévention par des mécanismes efficaces, des procédures précises et des règles contraignantes»
Comme son nom l'indique, la Commission nationale d'investigation sur les questions de corruption et de malversation a pour principale mission de faire toute la lumière sur les faits avérés de corruption et de malversation. Des affaires qui ont sérieusement handicapé l'économie nationale, tout en constituant un facteur de dégradation morale.
Le travail méthodique de ladite commission consiste à reconstituer la genèse des faits, à débusquer les auteurs de ce genre d'actes, identifier les victimes et comprendre les mécanismes de ces pratiques mafieuses.
Avant de remettre les données dont elle dispose entre les mains de la justice.
Pour en savoir plus, La Presse a approché M. Abdelfattah Amor, président de la commission. Entretien.
D'abord, et pour fixer un peu les concepts, quelle est la définition précise des faits qui entrent dans le cadre de votre travail d'élucidation ?
La corruption est définie notamment par la convention internationale de 2003, que la Tunisie a ratifiée en 2008 : il s'agit, pour simplifier les choses, de dire que c'est un procédé qui permet à certains de se faire payer des services auxquels ils n'ont pas droit. Exemple très simple : un citoyen s'adresse à un «omda» pour lui demander un papier auquel il a droit mais qui se voit obligé de monnayer ce service de manière indue. Les malversations, elles, renvoient à une notion très générale mais qui couvre toutes les opérations financières (y compris bancaires), administratives et autres qui attestent d'un comportement anormal de tricherie, de pression, de chantage ou de tout autre phénomène annexe.
La mission de la commission consiste, d'une part, à recueillir l'information, à l'analyser et à l'apprécier, étant précisé que, lorsque des faits sont suffisamment crédibles, ils font l'objet d'une transmission au parquet qui est appelé à exercer les compétences qui sont les siennes. Mais, au-delà des faits, il semble y avoir tout un système de corruption et de malversations dont les éléments sont multiples et interdépendants. Ce système doit être saisi et analysé, le but étant d'envisager un système de prévention contre la corruption et les malversations dans lequel doivent être prévus des mécanismes efficaces, des procédures précises et des règles contraignantes.
Peut-être faut-il ajouter que le système semble avoir gangrené — le mot est fort mais il est quand même à sa place — un certain nombre d'institutions de l'Etat, d'entreprises mais également des secteurs entiers de la société, tant et si bien que la corruption et les malversations semblent être banalisées, au point d'être intériorisées par certains et contribuer à l'apparition d'une mentalité particulière.
On a établi une sorte de lien dans les esprits entre les faits de corruption et de malversation et la famille élargie du président déchu comme si ce phénomène se limitait à cette sphère. Est-ce que vous allez, pour votre part, vous concentrer sur ces affaires-là ?
Il y a des affaires qu'il faut soumettre à la justice, sans empiéter sur son fonctionnement. Toutefois, il est normal que la commission s'en préoccupe et fasse ses investigations. Par ailleurs, il est vrai qu'il y a des dossiers particulièrement importants et urgents, mais il y a aussi des dossiers très nombreux venant notamment des citoyens et qui concernent des responsables et des individus soupçonnés de malversations ou de corruption. Ce que je dois dire, c'est que l'ampleur des demandes des citoyens est telle qu'il ne faudrait pas s'arrêter au caractère plutôt limité de la plainte, car lorsque vous avez un phénomène dénoncé de partout, par de très nombreuses personnes, et qui concerne ce qui peut paraître a priori un détail, comme le fait par exemple qu'un omda ou un délégué se livre à telle ou telle pratique illicite, cela doit être pris en compte de façon appropriée. Il s'agit de rassurer les gens, de leur dire que tant qu'il y a des affaires de corruption et de malversation, bien évidemment, on s'en occupe. Le problème, je ne vous le cache pas, c'est qu'il y a beaucoup de citoyens qui aimeraient qu'on s'occupe d'eux sur des affaires qui ne sont pas de la compétence de la commission. On a ainsi eu quelqu'un qui s'est présenté pour obtenir un sursis à l'exécution d'un jugement, un autre qui demandait un travail, un autre qui se plaignait pour une histoire de promotion… Il y a de tout et, malgré cela, il y a lieu de faire preuve de patience, d'essayer de comprendre ces gens et de les orienter.
L'ampleur des faits dont on a reçu l'écho suggère qu'il y a un «déficit immunitaire» dans notre système juridique : c'est votre avis ?
La législation est plutôt assez avancée. La pratique ne semble pas se faire conformément à la législation. Et, donc, il faudrait peut-être prévoir quelque chose de plus conséquent, de plus décisif.
Est-ce qu'il y a dans votre démarche une logique dans le démantèlement du système de la corruption et de la malversation, de manière à ne pas créer de rupture brutale ?
Nous sommes au début du travail. Ce qui est patent, c'est qu'il y a des données sérieuses. Mais il y en a qui, peut-être, ne présentent pas un caractère d'urgence suffisant et qu'il faudra traiter de manière conséquente avec le temps. Donc, sur tout cela, il faut analyser les choses de manière approfondie. Et je crois que même s'il n'y avait pas de stratégie assumée, il y a une conscience de l'apparition de ce phénomène, de son développement et de l'absence d'obstacles… Car le système n'a pas fonctionné : vous avez une règle, ou une procédure, et il y avait la conscience qu'on la détournait de manière irrégulière, ou immorale je dirais. Très souvent, vous trouvez des situations juridiques correctes. Par exemple, il y a des contrats établis en bonne et due forme. Mais il faut voir ce qu'il y a en dessous. Et, bien évidemment, il ne s'agit pas de faire un travail à la légère : chaque chose sera pesée correctement.
Je crois que le travail qui sera fait sera salutaire pour l'économie tunisienne, pour la société, et je ne pense pas que cela soit de nature à bloquer quoi que ce soit ou à déstabiliser. Il s'agit de faire un travail d'investigation et de moralisation.
La composition de la commission a suscité des critiques, notamment de la part des avocats. On a fait remarquer qu'il y a eu manque de consultation…
Cette commission n'est pas une commission politique, elle ne représente pas une juridiction et ce n'est pas non plus une commission représentative. Elle n'entend pas représenter la société civile. C'est une commission critique, formée d'experts, même si son travail est à portée politique. Et puis, la nature de cette commission et celle du travail à réaliser ne permettent pas d'entrer dans la préoccupation légitime de la représentation.
Mais toutes les informations, tous les dossiers, tous les témoignages, toutes les idées venant de la société civile ou des organisations professionnelles ou catégorielles seront les bienvenues : la commission est ouverte à tous. J'ajoute que, bien évidemment, la commission rendra publics ses rapports, aussi bien préliminaires que final, dans la transparence absolue, mais aussi dans le respect des personnes et de leur sécurité, qu'il s'agisse de témoins ou de personnes entendues à un autre titre… Le travail sera fait dans la confidentialité. Et nous voulons faire un travail objectif, pas dans la passion. Nous allons œuvrer afin que des preuves soient établies… Un simple témoin qui comparaît devant la commission peut s'exposer à une atteinte à sa réputation, à sa sécurité aussi. Il peut en être de même pour des personnes qui sont appelées uniquement aux fins d'éclairer.
Voulez-vous dire que le choix des personnes qui composent la commission a obéi au critère du sens de la confidentialité ?
Les personnes qui ont été sollicitées sont des personnes remplissant un certain nombre de critères, dont l'indépendance, l'intégrité et la compétence. Des propos ont été tenus au sujet d'un membre ou d'un autre : il n'est pas question d'entrer dans des polémiques. Mais si quelqu'un a un quelconque élément de preuve, qu'il le présente, parce que l'accusation est facile. J'ajoute que les personnes dont les noms ont été évoqués ont présenté au président de la commission des déclarations écrites, précises, qui ne permettent pas de douter d'elles. Comme je l'ai dit, il s'agit de la réputation des personnes et de leur place dans la société et nous devons faire attention à cela.
Mais, encore une fois, si quelqu'un dispose du moindre élément de preuve pour appuyer ce qu'il dit, qu'il m'en tienne informé. Si on me dit que X a été l'avocat de la famille des Trabelsi ou des Matri, je signale qu'il y a une déclaration de démenti formelle. Je ne voudrais pas procéder par publication, parce que les membres ne sont pas accusés. Mais il y a les racontars…
Est-ce que la réception des informations s'effectue dans de bonnes conditions sur le plan technique ?
Nous venons juste de nous installer. Nous sommes en train de monter toute une logistique et nous avons été, il est vrai, ces derniers jours, immergés par le nombre de personnes voulant déposer des dossiers ou apporter des informations. Nous essayons de gérer cela au mieux et je voudrais dire que les personnes concernées peuvent évidemment déposer leur dossier directement mais elles peuvent également l'envoyer par voie postale, surtout si elles habitent à l'intérieur du pays. Ce qui est demandé, c'est que l'intéressé présente une lettre explicative appuyée par un minimum d'éléments de preuves. Jusqu'à hier, plus de 800 dossiers ont été déposés et, évidemment, les administrations, les corps de contrôles, les entreprises et autres institutions sont appelés à apporter leurs contributions en déposant leurs dossiers concernant les questions qui sont de la compétence de la commission. Le président de la commission est habilité à demander des informations complémentaires ou supplémentaires.
S'agissant des personnes qui sont à l'intérieur du pays et qui pourraient en outre avoir des difficultés à mettre par écrit ce qu'elles savent, il faut rappeler d'abord qu'il y a un numéro vert qu'on peut appeler pour avoir des éclaircissements sur la procédure. Si elles ne peuvent pas se déplacer, il est envisagé qu'elles soient contactées sur place.


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