• Priorité d'embauche et de régularisation de la situation professionnelle pour les enseignants remplaçants et contractuels Emploi, liberté, dignité: trois droits des plus légitimes, censés être acquis, car fondamentaux dans une République se déclarant respectueuse des droits de l'Homme; trois revendications criées haut et fort durant la révolution populaire car manquantes d'une manière extravagante. L'emploi constitue la priorité absolue pour un peuple qui se heurte à des portes bien fermées et à des responsables qui font la sourde oreille, suivant une «logique» injuste, une politique fondée sur la corruption et l'égocentrisme. Le besoin d'une insertion professionnelle à même d'assurer au peuple, outre un revenu régulier et une sécurité sociale, la dignité et l'estime de soi a fini par exploser au grand jour tel un volcan qui gît depuis deux décennies. La revendication-clef de la population au chômage, notamment celle diplômée de l'enseignement supérieur, résonne désormais aux oreilles des responsables. Toutefois, et malgré les promesses faites par le gouvernement provisoire, cette résonance ne trouve pour l'instant pas d'échos palpables. C'est pourquoi une grande foule de citoyens diplômés de l'enseignement supérieur et supposés être embauchés dans les établissements de l'enseignement de base ( écoles, collèges et lycées) se sont regroupés, hier, devant le ministère de l'Education, revendiquant l'insertion professionnelle et l'annulation des mesures dont certaines ont été établies par l'ancien régime et d'autres prises récemment. Abdel Salem Marzouki est maîtrisard en géographie, diplômé depuis 2004, il n'a pas réussi à être recruté. «Nos revendications sont claires et nettes: nous demandons l'annulation du Capes ainsi que le nouveau concours proclamé récemment par le ministère. Nous demandons l'embauche immédiate de tous les diplômés qui ont enduré le chômage depuis des années; une embauche qui sera assurée par tous les ministères, sans exception», indique Abdel Salem, sur un ton furieux. Et d'ajouter que les diplômés au chômage réfutent l'allocation estimée à 150DT. «Cette allocation est synonyme d'aumône et d'indignation. C'est un calmant inefficace pour nos maux, d'autant plus qu'elle n'est pas récente mais date de plusieurs années», renchérit-il. La situation que vivent les diplômés du supérieur au chômage témoigne d'une injustice réelle et de l'incapacité à exploiter leurs potentiels, de servir le pays et de bénéficier de leurs droits en tant que citoyens cultivés, qualifiés et actifs. «Nous appelons le gouvernement à trouver des solutions radicales au problème du chômage. Munis de nos diplômes, le chômage et l'injustice nous ont réduits à des cas sociaux au vrai sens du terme», fait remarquer Jalel Mansour, professeur d'informatique originaire du Kef. A l'amertume due par tant d'années de chômage s'ajoute le sentiment d'impuissance et d'incapacité à faire pression sur le gouvernement pour que ce dernier ne relègue pas le problème du chômage au second plan. L'un des protestataires a mis le doigt sur un point sensible, qui n'a fait qu'accroître la colère des chômeurs : «La revendication-clé qui a été à l'origine de la révolution n'est autre que le droit à l'emploi. Or, ce problème a été relégué au second plan. Ceux qui ont contribué au massacre des civils durant la révolution ont réussi à mettre la pression sur les responsables et ont eu ce qu'ils voulaient. Ce n'est pas notre cas à nous, chômeurs. Nous ne pouvons user de quoi que ce soit pour faire pression sur les responsables. La preuve: nous n'avons rien vu de concret jusqu'à maintenant», souligne Ahmed Hamdaoui, diplômé en histoire géographie depuis 2000. Un avis que partage Walid Ben Saïd, angliciste diplômé depuis 2006. Pour sa part, Amira Ammar, professeur de mathématiques, recommande la transparence dans les concours de recrutement ainsi que dans l'information. Outre le déficit de recrutement, certains instituteurs contractuels ainsi que des professeurs remplaçants revendiquent la régularisation de leur situations. C'est le cas, à titre d'exemple, de Manel Saâdi, institutrice contractuelle. «Je travaille depuis 2009. Toutefois, je ne perçois pas de salaire. Puisque nous avons prouvé que nous sommes qualifiés et compétents, pourquoi on ne nous recrute pas ?», s'interroge-t-elle. Un avis que partage Abdelhamid Hajji, instituteur remplaçant originaire de Kasserine. Pour lui, la régularisation de leur situation est une urgence. Il trouve d'ailleurs qu'ils sont prioritaires par rapport aux autres.