— Hier matin, le trafic était toujours considérable au poste frontalier de Ras Jedir, mais moins dense que les jours précédents. De l'autre côté de la frontière, nous avons appris que les forces fidèles au colonel Gueddafi ne laissent pas passer les Egyptiens, les Tunisiens, les Irakiens, les Soudanais et les Tchadiens. Ils sont bloqués, jusqu'à présent, dans la localité de Boukamèche. Ils sont bien nourris et logés. «Il va s'en servir pour préparer un coup diplomatique, en présence des médias», disent les commentateurs à Ras Jedir. Par contre, les autres nationalités, dont un grand nombre de Bangladais, affluent toujours. 586 réfugiés ont pu atteindre ce point de passage, en l'espace de 3 heures. Ils sont transférés aux camps d'Echoucha et Ezzekra. A noter que tous les Egyptiens qui étaient là ont été évacués vers Gabès et Djerba. D'autre part, nous avons remarqué l'entrée en Tunisie d'une cinquantaine de voitures libyennes qui font le commerce de carburant et qui ont vidé les réservoirs avant de rebrousser chemin. Quant au navire militaire égyptien qui a accosté au port commercial de Zarzis, il n'a pas trouvé de passagers. Les bus sont revenus vides de Ras Jedir. D'autres sont envoyés à l'aéroport Djerba-Zarzis pour ramener quelque 400 ressortissants égyptiens, la capacité d'accueil du navire dont le départ était prévu hier soir. La tension a donc baissé d'un cran et les convois de bénévoles ainsi que les aides humanitaires continuent à affluer aussi bien des quatre coins de la Tunisie que de l'étranger. «On n'a plus de place où stocker les grandes quantités de produits alimentaires et de médicaments qui nous parviennent à Ras Jedir. Même les dépôts militaires sont pleins et le lait risque de se périmer», nous dit le Dr Mohamed Regueï, coordinateur de plusieurs ONG qui se trouvent sur les lieux. Les Bangladais sont encore parqués à Echoucha et à Ezzekra en grand nombre et ils attendent d'être rapatriés dans les plus brefs délais. La grippe et d'autres maladies se répandent toujours malgré les gros efforts déployés par les militaires et les nombreuses équipes médicales. Echoucha, est-ce le moment ? A Zarzis, pour la deuxième journée consécutive, quelques manifestants ont observé un sit-in devant la municipalité pour protester contre «les travaux qu'effectuent actuellement les habitants de Ben Guerdane sur des parcelles de terrain alors qu'elles sont encore en litige», disent-ils. Toutefois, quelques jeunes du Conseil de la Révolution se sont opposés à ce comportement. «Ce n'est pas le moment. Ce sont des gens bien connus. Ils sont manipulés par des agents de l'ancien régime qui veulent semer la zizanie», commente Ezzeddine.