Barro Brava ou encourager les siens de la parole et du geste. Sans violence Le sport d'une manière générale et le football en particulier ont besoin de public. Le public cabiste groupe toutes les classes d'âge, catégories sociales et sexes. Le comité des supporters a la responsabilité de veiller à la bonne organisation dans les stades. Les tâches sont réparties afin d'assurer le bon déroulement des rencontres. Comment s'effectue cette répartition des rôles? A-t-on besoin de leaders? Quelles sont les mentalités? La révolution changera-t-elle les choses? Autant de questions auxquelles nous essayons d'apporter des éléments de réponse. Les plus indiqués à le faire, ce sont ces jeunes qui garnissent et enflamment les gradins à chaque sortie de leur équipe. Dans le chaudron du stade Ahmed-Bsiri dans les années 60, 70 et 80, des groupes de supporters étaient déjà constitués tout naturellement. Chacun d'entre eux représentait les quartiers respectifs des joueurs; la Ksibah, la Mdina, les Andalous, etc. Malgré cette «dispersion», l'union était sacrée! Chaque groupe se vantait du joueur de son quartier ou «wild el houma». Tout le monde avait le même objectif : soutenir le CAB et passer une bonne après-midi. On se respectait tous. On chantait à la gloire du CAB et on donnait des sobriquets aux joueurs, du style «Tête d'or» ou «Ya hawet» et on brandissait un dauphin. De nouvelles méthodes Aujourd'hui, les temps ont changé, le public est de plus en plus jeune et de plus en plus virulent. Il était devenu nécessaire d'encadrer des supporters très fougueux et d'origines diverses. A Bizerte, ce sont les «Bizertinos juniors» (Bj) qui sont les plus en vue ces dernières années, de jeunes supporters qui s'allient volontiers aux «Big boss» et aux «Druggi». Ils ont pour rôle d'encourager l'équipe cabiste pendant tout le match sans discontinuer, nous dit Ahmed Hamdoun, un jeune supporter des Bj. Il s'agit d'une mentalité argentine dite Barro Brava, ajoute-t-il, c'est-à-dire chanter tout en joignant le geste à la parole. «Nous sommes les premiers à avoir importé cette spécificité en Tunisie», affirme, fier, le jeune Ahmed. Les Bizertinos juniors ne manquent pas un seul match en déplacement. Ils s'y rendent en dehors de leurs bases par leurs propres moyens ou louent des véhicules pour transporter du matériel servant à l'animation dans le stade : tambours, trompettes… Tous ces jeunes sont soutenus sur le plan matériel par des responsables des «petites» catégories du CAB, tout particulièrement Mehdi Bousbih, Moëz Galaï, Yassine Yaâcoubi ou encore Sami Khémiri. Les ventes de maillots aux couleurs du CAB ou de CD sont d'autres ressources qui leur permettent d'effectuer les dépenses nécessaires. Le Bizertin Ahmed Hamdoun nous apprend également que les supporters cabistes entretiennent des relations amicales avec ceux de l'ESS, un peu avec le CSS et avec certains autres de l'EST. Les Bizertinos juniors ont de bons rapports avec les dirigeants du club nordiste, le respect étant mutuel. Ils encouragent en permanence, surtout la veille d'un match, les joueurs en leur souhaitant, sur Facebook, «bonne chance». Il prennent place au stade aux portes 9 et 10, avec les «Big Boss», la porte 11 était réservée aux «Droggui», apparentés «ultras», mais qui n'ont jamais eu cette mentalité dans leur comportement. Des stadiers, mais pas n'importe lesquels? La révolution doit toucher également la nature des responsabilités dans le stade. «Je pense que la présence de stadiers dans les gradins est une bonne idée. Toutefois, une formation préalable est plus que nécessaire car nous voulons qu'il y ait, dans les tribunes, des personnes intègres et cultivées, capables de diriger des groupes de supporters et surtout de gérer des situations difficiles», reconnaît Ahmed Hamdoun, qui demeure confiant pour l'avenir : «Si l'ambiance était tendue avant la révolution c'est parce que les gens étaient frustrés. Ça trichait beaucoup au vu et au su de tout le monde. Maintenant, les choses doivent obligatoirement changer et la tension par conséquent tomber. On verra plutôt une ambiance de fête, de kermesse à chaque rencontre. Les gens sont libérés. J'espère qu'on nous autorisera de nouveau la dakhla. Enfin, la présence de la police est indispensable mais sans provocation dans la main courante du stade».