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Quel avenir pour les musées tunisiens ? (II)
Le 18 mai, Journée internationale des musées
Publié dans La Presse de Tunisie le 18 - 05 - 2011


Par Houcine JAIDI *
Les musées tunisiens, tous genres confondus, drainent un public et des ressources financières non négligeables. Certains parmi eux ont bénéficié de quelques réaménagements  (Utique) ou d'importants programmes de restructuration (en cours, au Bardo et à Sousse) qui, grâce à un prêt exceptionnel accordé par la Banque mondiale, leur donnera un nouveau souffle en matière d'accueil et d'exposition. Des réalisations relevant de différents ministères forcent l'admiration (le musée de Chemtou très bien conçu et centré sur la civilisation numide et l'exploitation des carrières de marbre, le Musée de la monnaie dont l'inauguration a été accompagnée de la publication d'un catalogue de haute qualité scientifique, le très pédagogique Musée militaire de Mareth…). Mais le patrimoine national exposé (ou qui devrait l'être) au public offre d'immenses opportunités de développement qui nous paraissent relever surtout de certains décisions :
1- Créer un Conseil national des musées qui sera chargé de la définition de la politique nationale en matière de muséographie. Ouvert à tous les ministères concernés par les musées (Culture, Défense nationale, Tourisme, Education nationale, Enseignement supérieur, Agriculture…), ce conseil servira de cadre de réflexion, de coordination, d'échange d'expériences et de planification. Cette structure sera appelée à travailler en considérant deux portées essentielles des musées : le rôle éducatifs en rapport avec les choix mémoriels et la dimension économique en matière de tourisme culturel et de développement régional.
2- Prendre les mesures urgentes qui s'imposent en matière de création ou de réouvertures de musées. En dehors du littoral Est de la Tunisie où, dans certaines régions, la seule volonté politique a fait que les musées ne sont séparés les uns des autres que par quelques dizaines de kilomètres, le territoire national souffre d'un sous-équipement flagrant en matière de musées. Des villes au passé multimillénaire comme Béja (métropole numide, romanisée, arabo-musulmane, beylicale, coloniale et actuelle) n'ont pas été jugées dignes du moindre musée. Des musées de sites tels que le Musée de Bulla Regia ou spécialisés tels que le Musée du cinéma, situé à quelques mètres de l'entrée principale du ministère de la Culture, et le Musée national de médecine dont des objets encombrent, d'une manière affligeante, le porche d'entrée de l'ancien local de la faculté de Médecine, ne peuvent pas rester éternellement fermés.
3- Combler les lacunes criardes en matière d'accueil et d'information. Le Musée des Finances qui aurait certainement gagné à être fondu dans le si intéressant Musée de la Monnaie — si ce n'étaient peut-être des querelles de chapelle entre des organismes des finances — a été fermé, ces derniers jours, pour travaux sans aucune annonce pour le public. Mais il y a pire : le Musée de La Place du Leader, qui donne sur un espace public à l'état déplorable, est en partie fermé au public, avec un rez-de-chaussée qui sert, en autres fonctions, de dépôt pour des meubles ramenés du premier étage. Le musée des PTT richement garni depuis la fin des années 1950 a un aménagement suranné qui, en certains endroits, se réduit à un simple entassement qui s'apparente plutôt au dépôt qu'à l'exposition muséale. Son irremplaçable collection de timbres est mystérieusement arrêtée au milieu des années 1990. Plusieurs musées écologiques inaugurés officiellement, depuis des années, par les plus hauts représentants de l'Etat souffrent d'un véritable embargo qui leur est imposé par une tutelle très discutable du ministère de l'Agriculture. L'olivier et le palmier, si importants dans l'histoire et dans l'économie de notre pays, méritent certainement des musées dignes de leur immense statut patrimonial. Les horaires strictement administratifs de visite appliqués dans de très nombreux musées sont une vraie entrave à l'accès du public. Un affichage des horaires, des notices clairement rédigées, un dépliant et un agent d'accueil qualifié ne sont pas des prestations à quémander par un public aux abois mais un droit inaliénable. L'usage des nouvelles technologies de l'information et de la communication (sites web, DVD, bornes interactives, vidéos…) devrait être généralisé sans délai. Beaucoup reste à faire pour que la reproduction des objets archéologiques s'apparente plutôt à l'art qu'à la pacotille. Seules les enquêtes scientifiques sont en mesure de faire connaître le profil des visiteurs, leurs observations et leurs attentes.
4- Mettre en place une formation solide en matière de conservation et d'animation muséale, qui soit ouverte sur les expériences étrangères les plus avancées Peut-on encore accepter qu'on s'improvise conservateur de musée et qu'on puisse accomplir cette tâche si délicate parallèlement à d'importantes responsabilités qui requièrent à leur tour une disponibilité entière ? La science la plus sûre dans n'importe quel domaine ne peut pas dispenser le conservateur du plus petit musée qui soit de la formation adéquate en matière de muséographie. Actuellement, les innombrables formations tunisiennes en matière de patrimoine (licences, mastères et doctorat) constituent une nébuleuse qui souffre d'un manque flagrant de visibilité et de cohérence. Des formations de très haute qualité qui se sont développées, au cours des dernières décennies, dans certains pays tels que l'Espagne si fière, à juste titre, de son mastère de muséographie de l'Université de Saragosse, semblent inconnues ou ignorées dans notre pays.
5- Soumettre les responsables des musées à une obligation de résultat en matière de gestion scientifique. Le seul catalogue global d'un musée archéologique disponible en Tunisie (mais qui n'est plus à jour) est la catalogue du Musée Alaoui publié sous le Protectorat français. Mêmes nombreux, les inventaires partiels qui figurent dans des publications éparses ne remplacent jamais un catalogue global. De très nombreuses pièces archéologiques tunisiennes de premier plan ne sont présentées que dans des catalogues d'expositions qui ont été organisées dans des pays étrangers et qui ont bénéficié, à l'époque, d'une mobilisation spéciale de la part de l'administration tunisienne de tutelle.
6- Faire de l'animation des musées un objectif de tous les jours, particulièrement lorsqu'il s'agit de grands rendez-vous nationaux ou internationaux. Un musée qui n'offre pas régulièrement des animations nouvelles se momifie. La création des événements muséaux multiplie indéfiniment les visiteurs nationaux et étrangers ainsi que les revenus. Il serait trompeur de prétendre que tout événement est forcément coûteux. Une visite thématique guidée par un médiateur qualifié peut drainer une foule considérable. Une telle manifestation peut prendre une plus grande envergure si elle est déclinée sous une version plus élaborée. Prenons l'exemple d'un itinéraire dans le Musée national du Bardo où on montrerait (et expliquerait comme il se doit) à des visiteurs motivés la représentation des oliviers dans les pavements de mosaïques, les pressoirs à huile, les lampes ainsi que les vases de céramique qui sont en rapport avec le produit. Cette visite peut être précédée d'un exposé concernant l'oléiculture en Tunisie, à travers les âges, et suivie par une dégustation d'olives et d'huiles d'olive provenant de différents terroirs, proposée par des producteurs ou par l'Office National de l'Huile. Un pareil programme pourrait meubler utilement et agréablement une fin de semaine ou les soirées interminables de l'été et du mois de Ramadan.
7- Rapprocher le patrimoine des créateurs en incitant les artisans, les artistes et les designers à venir dans les musées afin d'y puiser des idées pour leurs travaux est une autre manière d'animer les musées. La bonne réussite de l'expérience de la mosaïque artisanale ne devrait pas rester unique. Dans la sculpture, la poterie et le verre soufflé, il y a des champs de création qui sont encore vierges. Une exposition d'objets modernes inspirés d'objets anciens ou médiévaux et accompagnée d'une conférence peut constituer un moment de réflexion féconde qui ouvrirait des perspectives artistiques et économiques insoupçonnables.
8) Les expositions provisoires sont à multiplier. Mais elles ne doivent pas seulement servir à présenter, dans nos musées, des objets appartenant à des pays étranger. Des pièces essentielles de notre patrimoine archéologique qui font partie des collections du Musée du Louvre, du British Museum, de Leyde et d'autres musées européens gagneraient — faute de pouvoir les récupérer — à être présentées aux Tunisiens. Ce serait la juste contrepartie des nombreuses expositions qui ont emmené certaines de nos meilleures pièces archéologiques aux quatre coins du monde.
9- Encadrer les promoteurs des musées privés qui, même tout petits, peuvent être très attractifs de par leur originalité. Aux dernières nouvelles, l'odyssée du projet de Musée du Bélier est en passe de trouver une fin heureuse et la collection de poterie d'un collectionneur privée devrait être bientôt exposée dans le cadre d'un monument historique restauré aux frais du propriétaire de la collection. Si elles se confirmaient, ces nouvelles constitueraient un déblocage de situations malheureuses qui ont trop duré et donneraient de l'espoir à des promoteurs qui parlent de projets très originaux tels qu'un musée de la marine ou un musée des voitures.
10- Associer les cadres scolaires au rapprochement des musées du public jeune. Cela ne pourra se faire qu'avec des services pédagogiques qualifiés qui disposeraient, dans les musées, des outils de communication nécessaires. Le programme mort-né de visites guidées de musées et de sites archéologiques, initié il y a une vingtaine d'années, a mis au grand jour les redoutables écueils qu'il ne faut pas sous-estimer. Une programmation sérieuse et soutenue par la détermination des autorités de tutelle ne manquera pas d'amener dans les musées tunisiens les bonnes foules d'élèves et d'étudiants auxquelles sont habitués les musées archéologiques du Caire, d'Alger et de Rabat.
Le lecteur aura remarqué que proposer ce qui précède n'est pas envisager l'inconcevable, penser l'impensable ou exprimer l'indicible. Il ne s'agit en fait que de propositions dont la mise en application ne tient qu'à une volonté politique qui accepterait de consentir à quelques investissements — surtout en matière de qualifications professionnelles — qui ne manqueront pas, à terme, de rapporter beaucoup tant sur le plan financier que sur celui du développement durable, sans compter les précieux acquis culturels. Mais à la base de toute démarche il faut considérer, avec le professionnalisme, l'humilité et l'écoute qui prouvent le respect qu'on doit au public, trois données essentielles  :  la muséologie est une discipline à part entière qui enregistre des avancées quotidiennes et qui agit dans un domaine aux enjeux importants dans le développement de la société ; l'attente des Tunisiens et des visiteurs étrangers d'un savoir muséographique bien assimilé et bien servi par ses dispensateurs est très légitime ; le développement du tourisme culturel se caractérise par une grande complexité qui interdit d'en parler à la légère et qui fait que son décollage, comme celui du tourisme écologique, ne sera jamais aussi simple ni aussi rapide que celui du tourisme balnéaire, du tourisme médical et de la thalassothérapie pour lesquels notre pays peut se prévaloir, à juste titre, de quelques succès.


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