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Les réformes institutionnelles doivent être entamées dès à présent Conférence de presse lecteurs : M. Juan E. Mendez, rapporteur spécial de l'ONU sur la torture et les traitements inhumains ou dégradants
Le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme à Tunis a organisé, hier, à Tunis, une conférence de presse portant sur la visite en Tunisie de M. Juan E.‑Mendez, rapporteur spécial sur la torture et autres traitements inhumains ou dégradants. M. Joseph Shekla, représentant du Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme, a précisé que la visite de M.‑E.‑Mendez est une réponse favorable à la demande du gouvernement provisoire; une visite qui a pour objectif de présenter audit gouvernement ainsi qu'aux futurs responsables du nouveau gouvernement des remarques et des recommandations à même de les aider dans leur mission pour un avenir meilleur. Prenant la parole, M. E. Mendez a exprimé sa reconnaissance envers le gouvernement provisoire pour l'avoir accueilli à un moment délicat car transitoire dans l'histoire de la Tunisie. Il a indiqué que les données qu'il détient à l'heure actuelle ne sont autres que des données préliminaires et qu'ultérieurement, l'on va procéder, en collaboration avec le gouvernement provisoire, à la rédaction d'un rapport final. La conférence de presse a focalisé sur trois axes majeurs. Le premier axe concerne la prévalence de la torture au cours de l'ancien régime. Le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme reconnaît la cruauté des actions de torture infligées tant aux individus qu'à la société et appelle à la rectification d'une situation qu'il ne nous est plus permis de passer sous silence. M. E. Mendez a indiqué, également, que la discussion doit être établie au niveau des mécanismes de la justice transitionnelle afin que cette dernière ait les fondements nécessaires à l'action réparatrice. «La réparation est à effectuer pour les victimes. Le gouvernement provisoire est appelé à compenser les victimes suivant les degrés de l'agression qui leur a été affligée», explique l'orateur. Il a souligné que les procès doivent être équitables et que l'amnistie au profit des gens ayant été accusés et maltraités à tort sous l'ancien régime devrait être le commencement d'un processus de réparation et de réhabilitation d'honneur. «Certes, nous ne disposons pas encore de toutes les données. Mais nous savons que la police politique a été dissoute et que les geôles ont cessé d'exister», renchérit M. E. Mendez. Compensations suivant le degré de l'agression Le second axe débattu lors de cette rencontre consiste en les crimes commis contre le peuple tunisien entre décembre 2010 et janvier 2011. Le rapporteur spécial sur la torture a indiqué que la commission des Nations unies pour les droits de l'Homme soutient le travail de la commission d'établissement des faits. En effet, les Nations unies veilleront sur l'accomplissement des mesures prises par le gouvernement provisoire afin de compenser les victimes. «Nous savons que le gouvernement provisoire a entamé certaines mesures. En fait, 300 personnes ont reçu chacune une avance de l'ordre de 20 mille dinars, et ce, dans l'attente de montants plus consistants. Les blessés ont reçu chacun trois mille dinars, ce que nous estimons comme un montant acceptable pour compenser les blessures moyennes. Toutefois, cette somme ne peut aucunement être suffisante pour compenser des blessures graves voire handicapantes», explique M. E. Mendez. Il a, en outre, indiqué que les données portant sur les procès ne sont pas accessibles pour l'instant et que le Haut commissariat des Nations unies des droits de l'Homme recommande la publication du résultat des enquêtes juridiques une fois celles-ci achevées. L'orateur relève, par ailleurs, un autre volet, à savoir celui des mesures qui doivent être prises à long terme pour éradiquer la torture et imposer le respect des droits de l'Homme dans un gouvernement élu démocratiquement. Pour ce, il est indispensable d'éclairer et de sensibiliser les futurs responsables quant à l'importance de faire face à la torture et d'inclure ce principe au sein de la nouvelle Constitution afin qu'il acquière le plus de légitimité possible. «Même si l'on parle de mesures à long terme, les réformes institutionnelles doivent être entamées dès à présent. Les tortionnaires doivent être soumis à un procès judiciaire mais aussi à un processus disciplinaire», fait remarquer M. E. Mendez. Il y a lieu de noter que l'orateur s'est entretenu avec les responsables de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, la réforme politique et la transition démocratique; un entretien qui converge vers des élections démocratiques et en toute transparence. «Nous allons présenter des propositions tant au niveau de l'Assemblée constituante qu'au niveau du gouvernement prochainement élu et aux ONG», note l'orateur. Certes, M.‑E.‑Mendez juge sincère le gouvernement provisoire dans sa lutte engagée contre la torture. Cela ne l'empêche pas de signaler que des cas de torture ont été enregistrés après la révolution. «J'ai pu constater plusieurs méthodes de torture à travers le monde. Mais certaines, exercées sous le régime de Ben Ali, s'avèrent des plus cruelles et des plus inhumaines», avoue l'orateur.