L'étape préliminaire de l'élection de l'Assemblée nationale constituante a été entamée avant-hier, et ce, dans toutes les municipalités. Il s'agit, en effet, de l'inscription des citoyens sur la liste des électeurs. Cette étape, qui s'étale du 11 juillet au 2 août, s'inscrit dans le cadre de l'organisation des premières élections démocratiques dans l'Histoire de notre pays. Depuis l'Indépendance, les Tunisiens n'ont, certainement, pas jouit du droit de voter librement et de contribuer à l'évolution politique. La révolution du 14 janvier a rompu la chaîne dictatoriale, offrant aux citoyens le plaisir de choisir parmi les partis politiques ceux qu'ils jugent pertinents et de s'impliquer dûment dans la transition démocratique. Pour mener à bien l'organisation de cette phase, la Haute instance indépendante des élections a élaboré, en collaboration avec le Centre national d'informatique, un logiciel permettant d'informatiser les données relatives aux électeurs dans l'optique d'optimiser les prestations et de s'assurer de l'identité de chacun. Cependant, la ferveur électorale ne semble pas à son comble: les citoyens sont loin de se bousculer dans les bureaux d'inscription. Le perfectionnement de ces derniers s'avère inopportunément chamboulé par des problèmes techniques Reportage . Il est 11h10 en ce mardi 12 juillet. La phase d'inscription est à sa deuxième journée. La municipalité du Kram a consacré deux bureaux à cet effet, s'attendant, sans doute, à des électeurs en file indienne, impatients de s'assurer que leurs noms figurent bien sur la liste. En réalité, il n'en est rien. «L'affluence des citoyens serait peut-être progressive. Cela traduit, sans doute, une certaine insouciance mais aussi un déficit informationnel. Certains viennent pour des renseignements sur l'inscription, sur son utilité ou encore sur les étapes à venir. Aujourd'hui, et jusqu'à l'heure actuelle, seulement trois inscriptions ont été notées», indique M. Nafouti, chargé du bureau d'inscription électorale à la municipalité du Kram. Makrem Rjiba travaille à la marine nationale. Il vient de faire son inscription pour le droit de vote. Il n'a pas eu à attendre longtemps puisqu'il était le seul devant ce guichet. «J'ai su, hier, que l'étape d'inscription a été lancée. Je me suis précipité à cet effet car, en tant que tunisien, je suis impatient de pouvoir enfin donner mon avis et participer, ne serait-ce que par le vote, à la vie politique», indique-t-il. Makrem a eu la chance de se déplacer le deuxième jour à la municipalité du Kram. Il faut dire que le démarrage de cette phase n'a pas été optimal le premier jour. «Hier, nous avons connu un réel problème de connexion. Nous avons eu du mal à accomplir le travail. Toutefois, nous avons été à la disposition des citoyens pour leur fournir les informations nécessaires», précise M. Nafouti. Affluence progressive A la municipalité de l'Ariana, l'intérêt pour les élections de la Constituante semble pris plus au sérieux. Tout comme la municipalité du Kram, le premier jour n'a pas été fructueux. «Hier, nous n'avons enregistré aucune inscription. Mais aujourd'hui, une bonne liste d'électeurs a déjà été notée. La plupart d'entre eux semblent bien informés sur l'utilité de cette action. En fait, c'est en s'inscrivant que le citoyen prend connaissance du bureau de vote vers lequel il se déplacera le jour J. Nous avons misé sur le critère de proximité entre le bureau de vote et l'adresse personnelle, et ce, afin d'éviter l'encombrement dans certains bureaux de vote», souligne M. Hakam Ben Taher, chargé du bureau d'inscription à la municipalité de l'Ariana. Tenant une série de fiches d'inscription, il indique que les électeurs appartiennent à diverses tranches d'âge. Des jeunes ne dépassant pas les 20 printemps ont déjà répondu présent à cette première étape. Le souci de voter prend, chez certains, une dimension plus que importante. Transcendant sa définition en tant que droit et devoir à la fois, le vote s'avère, surtout, le seul moyen permettant de faire face aux dépassements et de protéger la révolution en tant qu'acquis fondamental favorisant la transition démocratique. Mme Aouatef Jalal, institutrice, est parmi les Tunisiennes qui croient en la modération politique et qui réfutent toute forme d'extrémisme susceptible de porter atteinte à l'harmonie sociale et à l'esprit modéré. «Il est impératif de voter afin de faire face aux menaces extrémistes de certains partis politiques», avance-t-elle. Problème technique, coupure d'électricité, etc. Si certaines municipalités ont réussi, enfin, à surmonter le problème technique du premier jour, la municipalité d'El Menzah, elle, a été paralysée le 11 et le 12 juillet à cause des interminables coupures d'électricité. Trois agents chargés de l'inscription et relevant de la Haute instance indépendante des élections prennent place au bureau. Une quinzaine de citoyens ont pris, également, place sur les sièges, prenant leur mal en patience et supportant péniblement l'ambiance suffocante due à l'interruption de la climatisation. «L'organisation de la phase d'inscription promettait d'être irréprochable. Et voilà que des coupures d'électricité imprévisibles et redondantes paralysent le bon déroulement de cette mission. Surtout que l'inscription ne peut être que informatisée. La Haute instance indépendante des élections, en collaboration avec le Centre national d'informatique, a consacré un serveur unique à tous les bureaux d'inscription. Ce serveur nous permet de détecter les données erronées et d'éviter la double inscription», explique M. Fathi Aâraydhi, responsable d'inscription. Dans la salle d'attente, certains s'adonnent à des conversations conviviales alors que d'autres attendent la reprise de l'électricité. M. Anis Fatnassi est résidant au Vietnam. Il accompagne sa mère pour l'inscription. Il vient de passer près de deux heures d'attente pour une prestation administrative et une inscription de vote. « Je pense qu'en tant que principe organisationnel, les choses se déroulent bien. Certes, je ne vois pas l'utilité d'une inscription du moment où l'on peut simplement voter en présentant sa CIN. Je pense, par ailleurs, que les élections seront extraordinaires. J'ai déjà voté par le passé; un droit que j'ai exercé non sans crainte puisque j'avais opté pour un parti autre que le RCD. Désormais, la peur n'a pas de place», indique notre interlocuteur. Il s'interroge, néanmoins, sur la possibilité, pour les Tunisiens résidant dans les pays d'Asie, d'exercer ce droit le 23 octobre. Assis sur un autre siège, Mohaymen Ben Saïd, banquier, attend le retour de l'électricité. Pour lui, l'inscription sur la liste électorale est nécessaire afin d'élire l'Assemblée constituante. «Certes, je ne connais pas tous les partis mais je soutiens tous les partis à vocation démocratique», souligne-t-il. Alors qu'une dame d'un certain âge réprimande l'agent chargé de l'inscription pour une coupure d'électricité dont il n'est pas responsable, un monsieur fait son entrée dans la salle. Il demande à faire l'inscription de son nom sur la liste des électeurs. Une fois informé de la coupure d'électricité, il rebrousse chemin en indiquant, simplement et civiquement, qu'il repasserait plus tard. Les bureaux d'inscription sont ouverts au public de 8h00 à 18h00.