La Tunisie se trouve aujourd'hui face à son avenir. Dans moins d'un mois, les Tunisiens et les Tunisiennes seront appelés à élire une Assemblée constituante pour se doter d'une constitution qui soit à la hauteur de leurs ambitions et de leurs espoirs. Ce que la femme tunisienne ambitionne, c'est de se doter d'une Constitution qui prolonge certes son histoire, mais en préservant ses acquis, en garantissant ses droits fondamentaux à la liberté, à l'égalité et à la dignité, et ce, dans l'exercice effectif de la citoyenneté. Cette tâche devra être menée au-dessus des intérêts partisans et au-delà des affiliations idéologiques. Des idées et bien d'autres ont fait l'objet d'un débat fructueux et d'une réflexion approfondie en présence des femmes qui ont participé, jeudi dernier, aux assises du séminaire portant sur le thème «Le rôle de la femme dans le processus de transition, entre la théorie et la réalité», organisé par la Ligue des Electrices tunisiennes (LET). Ligue fondée en 2011, après la révolution, par un groupe de femmes unies dans la conscience de l'importance du rôle des femmes dans le soutien de la pratique électorale. L'objectif assigné est de vivre dans une société démocratique qui garantisse l'égalité dans l'exercice du droit d'être électeur ou candidat. Cette rencontre a réuni les femmes têtes de liste aux élections de l'Assemblée constituante ainsi que les candidates qui ont mis en valeur les opportunités qui s'offrent aujourd'hui à la femme tunisienne sur la scène politique et le rôle accru qu'elle joue dans tous les domaines de la vie publique. Instruites, cultivées, jouant un rôle actif dans la société, les femmes sont l'amorce du processus de transition du pays. Depuis le 14 janvier, la femme a intégré de plain-pied la vie citoyenne et n'a cessé d'enrichir les débats et d'approfondir la réflexion sur des questions d'actualité et des affaires d'intérêt national, aussi bien au sein des partis politiques que dans le tissu associatif, jouant ainsi un rôle important dans les développements politiques de cette étape de transition. C'est dans ce contexte que s'inscrit l'initiative des fondatrices de la Ligue des électrices tunisiennes qui s'est fixée comme objectifs d'améliorer la capacité des femmes à la participation effective aux affaires publiques, en particulier à la politique, en tant qu'électrices et candidates. En plus, la LET veut aider les femmes dans leur contribution à la réalisation d'un exercice électoral fondé sur les principes et les normes des droits de l'Homme et le genre social. Mme Narjès Loukil, présidente de la Ligue des électrices tunisiennes, n'a pas manqué de rappeler que l'objectif primordial de la ligue est de créer une alliance entre les différentes candidates au sein de la Constituante pour qu'elles soient solidaires et prêtes à défendre les droits et les acquis de la femme ainsi que le Code du statut personnel. «Il est à noter que le nombre des femmes inscrites aux élections s'élève à 20%, dont 5% sont têtes de liste. Autre indicateur, les femmes âgées entre 18 et 30 ans représentent 51% des inscrites, convaincues de l'importance de la pratique électorale et conscientes de l'aptitude des femmes à être actives dans la communauté au niveau local, national et international, indépendamment des différences idéologiques et des appartenances partisanes. L'alliance que nous voulons créer doit renforcer la présence de la femme sur la scène politique, sachant qu'au sein du gouvernement de transition, le nombre des femmes aux postes de décision est très réduit. C'est pour cela que nous veillons au sein de notre ligue à renforcer la participation des femmes, notamment les têtes de lite et les candidates dans le processus électoral en cette période de transition. Elles seront appelées en effet à préserver les droits et les acquis de la femme en tant que partenaire active et agissante dans la gestion des affaires de la nation». De son côté, Mme Bochra Belhaj Hmida, tête de liste (Zaghouan) du parti Ettakatol, a évoqué l'importance de la contribution de la femme à l'édification d'une deuxième République et à l'application concrète de la politique de parité, qui constitue un défi majeur et une opportunité renouvelée pour la création d'un mouvement féministe où la concurrence s'avère rude. Cet impératif participatif n'est pas concrètement promu dans les médias, où la femme est totalement absente, comme si son militantisme, ses initiatives, sa participation politique, sociale, économique… laissaient prévoir une prédominance de la gent féminine sur la scène politique. Mais ceci ne peut que nous inciter à être davantage présentes et actives en cette période de reconstruction de l'avenir du pays. Il s'est avéré en ce sens que la règle de la parité a été ignorée par certains. Des questions se posent à ce sujet : où sont les femmes journalistes en tant qu'électrices ou candidates ? Est-ce que la femme n'a pas participé à la révolution ? Il est opportun de rappeler que la présence de la femme est fondamentale, pas seulement dans l'Assemblée constituante mais également dans tous les domaines politiques et de développement économique et social. «La Constitution de la révolution doit préserver les droits de la femme et garantir l'égalité totale entre l'homme et la femme», souligne Mme Moufida Belghith, tête de liste du réseau «Notre Constitution, notre avenir». A l'évidence, la loi de la parité doit être examinée à moyen et à long terme à travers la mise en place de législations adéquates, «pour que cette loi soit appliquée concrètement et qu'un système de quotas soit mis en place, inscrit dans la nouvelle Constitution», précise Mme Houda Kéfi, indépendante, tête de liste des indépendants démocratiques (Tunis 2). Pour elle, la femme est présente dans la réalité et absente en théorie. Présente dans tous les secteurs vitaux. C'est pour cela «qu'il faut renforcer les actions conjointes entre les différents acteurs qui s'intéressent à la participation des femmes en tant qu'électrices ou candidates aux élections et garantir par là même le plus grand nombre de sièges à la Constituante», ajoute Mme Kéfi.