La Ligue arabe a adopté dimanche des sanctions économiques sévères contre la Syrie pour la contraindre de faire cesser la répression sanglante de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad. Il s'agit des premières sanctions économiques d'une telle ampleur de la la Ligue arabe à l'encontre de l'un de ses membres. Ces sanctions, adoptées lors d'une réunion des chefs de la diplomatie arabes au Caire, comportent un gel des transactions commerciales avec le gouvernement syrien et de ses comptes bancaires dans les pays arabes. Ces mesures doivent entrer en vigueur "immédiatement", a précisé le Premier ministre qatari Hamad ben Jassem al-Thani, dont le pays préside un comité ministériel arabe sur la Syrie. Les sanctions comprennent aussi une interdiction de voyager dans les pays arabes pour des responsables syriens dont la liste reste à déterminer ainsi que la suspension des liaisons aériennes entre les pays arabes et la Syrie. La date de l'entrée en vigueur de cette dernière mesure sera fixée la semaine prochaine. Parmi les mesures adoptées figurent en outre le gel des transactions financières avec le gouvernement et la Banque centrale syriens et l'arrêt de financement de projets arabes en Syrie. Sur les 21 membres de la Ligue arabe --sans compter la Syrie suspendue des réunions --, 19 ont voté en faveur de ces sanctions, tandis que l'Irak et le Liban s'en sont dissociés. Selon cheikh Hamad, le chef de la diplomatie turque, Ahmet Davutoglu, qui a participé à l'ouverture de la réunion, a assuré qu'Ankara appliquerait les mêmes mesures contre la Syrie. L'économie syrienne est déjà affectée par des sanctions européennes et américaines et les mesures de la Ligue arabe risquent de l'ashpyxier davantage, la moitié des exportations et près d'un quart des importations de la Syrie se faisant avec les pays arabes. Avant de recourir aux sanctions, la Ligue arabe avait lancé deux ultimatums en une semaine, sommant Damas de cesser la répression et d'accepter l'envoi d'observateurs arabes. Le régime de Bachar al-Assad a ignoré ses ultimatums et samedi, son ministre des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a accusé les Arabes de favoriser une "intervention étrangère" en Syrie, après leur décision de faire appel à l'ONU pour les aider à trouver un règlement. "Tout ce que nous faisons, c'est pour éviter une solution venant de l'étranger", a riposté le Premier ministre qatari. Mais "si la communauté internationale voit que nous ne traitons pas la question de manière sérieuse, je ne peux pas garantir qu'il n'y aurait pas d'intervention étrangère", a-t-il précisé. "Pour nous, l'important est que le gouvernement syrien se rende compte qu'il y a une position arabe qui veut régler la question de manière urgente", a-t-il ajouté, réclamant "l'arrêt des massacres, la libération des prisonniers et le retrait des chars" des villes syriennes. "Notre principale préoccupation pendant les discussions était d'éviter que le peuple syrien pâtisse de ces sanctions et nous espérons que ce ne sera pas le cas", a pour sa part déclaré le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Al-Arabi. Il s'agit d'"une mesure sans précédent", a indiqué sans plus de commentaire la télévision publique syrienne en annonçant les sanctions arabes, tandis que plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés sur une grande place à Damas pour les dénoncer. Sur le terrain, la répression n'a pas connu de répit, avec 15 civils tués et plus de 25 blessés dimanche par les tirs des forces de sécurité syrienne, essentiellement dans les régions de Homs (centre) et de Damas, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). En outre, l'Armée syrienne libre (ASL), qui revendique quelque 20.000 déserteurs et dont le chef Riad al-Assaad est basé en Turquie, a multiplié ses attaques contre les forces de l'ordre, faisant une cinquantaine de morts depuis jeudi, selon l'OSDH. La répression de la contestation populaire lancée le 15 mars a fait plus de 3.500 morts selon l'ONU et entraînant des dizaines de milliers d'arrestations.