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Deux priorités : une nouvelle politique migratoire et la réforme des structures Interview : M. Houcine Jaziri, secrétaire d'Etat à l'Immigration et aux Tunisiens à l'étranger
• Nous ferons tout pour défendre nos émigrés bloqués en Italie ou prisonniers à Guantanamo et en Irak La Tunisie s'est toujours située au centre des mouvements migratoires et d'un certain point de vue, sa population est un produit des flux migratoires. Le dossier des émigrés clandestins demeure à la fois un sujet d'une grande complexité et de grande actualité. Des milliers d'émigrés sont, aujourd'hui, dispersés dans plusieurs pays européens et exposés à toutes les formes de discrimination. Les émigrés portés disparus en Italie ou repêchés en mer, les réfugiés étrangers qui ont fui la guerre en Libye, autant de dossiers qui nécessitent un traitement urgent, d'où la création d'un secrétariat d'Etat à l'Immigration et aux Tunisiens à l'étranger, chargé de redéfinir la politique migratoire en Tunisie, la dimension politique de la migration régulière et irrégulière et d'enquêter sur le sort de nos ressortissants tunisiens. M.Houcine Jaziri, secrétaire d'Etat à l'Emigration et aux Tunisiens à l'étranger, présente à La Presse la nouvelle politique de migration et la portée des mécanismes mis en place pour trouver des réponses adaptées à des questions qui exigent des solutions urgentes. Interview. A quels objectifs répond la décision de création d'un nouveau secrétariat d'Etat à l'Immigration et aux Tunisiens à l'étranger, et quelles seront les grandes actions à entreprendre ? Plus d' un million d' immigrés tunisiens, 10% de la population, résident à l'étranger. Une importante communauté, dont les préoccupations sont variées, les secteurs d'activités diversifiées et les conditions de vie diffèrent selon le milieu et le profil. Une communauté qui ne cesse de participer au développement du pays et qui mérite une attention particulière, notamment après la révolution. La question de l'immigration a imposé la mise en place d' une stratégie parrainée par plusieurs ministères mais qui ont péché par manque de coordination et de stratégies claires. Aujourd'hui, avec la création d'un secrétariat d'Etat à l'Immigration et aux Tunisiens à l'étranger, nous œuvrerons pour renforcer la coopération entre les différents départements ministériels, en l'occurrence les ministères des Affaires étrangères, de l'Investissement et de la Coopération internationale afin d'esquisser une vision commune qui définit une politique claire et stratégique. Avec la conjugaison des efforts de toutes les parties concernées, on a opté pour la mise en place d'une politique nouvelle de l'immigration. Une politique claire, qui prend en considération le rôle important que jouera la communauté tunisienne à l'intérieur du pays à travers son implication à la définition des grands choix politiques nationaux. L'Office des Tunisiens à l'étranger (OTE), qui avait dévié pour des considérations partisanes et politiciennes de sa mission, sera investi d'une mission de grande importance dans la mise en place de la nouvelle politique de l'immigration. Notre objectif assigné n'est autre que d'être à l'écoute de tous les Tunisiens où qu'ils se trouvent et de renforcer le dialogue avec eux. Nous avons programmé durant la prochaine étape de multiples visites dans les pays du Golfe, le Canada, le Maghreb, l'Europe, à l'effet de les sensibiliser à l'effort d'impulsion de l'économie nationale et la participation à l'œuvre du développement du pays. Concernant les « harragas » ou les émigrés portés disparus en mer ou en Italie, y a-t-il une volonté de créer une commission d'enquête sur cette question d'actualité et de trouver des solutions durables ? Nous travaillons aujourd'hui avec la collaboration des ministères des Affaires étrangères et de l'Intérieur pour résoudre le problème des corps disparus en mer et les émigrés en Italie et pour venir en aide à toutes les familles tunisiennes qui sont encore en deuil. Le chef du gouvernement a demandé récemment d'accélérer les négociations avec les autorités italiennes afin de trouver les solutions idoines, concernant aussi bien les disparus que les personnes en état d'arrestation dans les prisons italiennes. Nous entamerons nos recherches de nos enfants tunisiens dans un cadre légal et nous userons toutes nos possibilités avec l'Etat italien pour identifier ces disparus. Nous ferons tout pour défendre nos émigrés bloqués aussi bien en Italie, les prisonniers à Guantanamo et en Irak. C'est une question très sensible et un dossier qui nécessite des efforts soutenus et beaucoup de temps pour son traitement. Nous venons de commencer l'examen de ce dossier avec les départements ministériels concernés et la société civile, et notamment avec la diplomatie italienne pour faciliter les procédures et les dispositions, conformément aux normes internationales et aux exigences de la politique de voisinage, pour pouvoir ramener nos enfants. Le secrétariat d'Etat à l'Immigration et aux Tunisiens à l'étranger envisage de mettre en place un réseau de coopération et de concertation avec la société civile pour maintenir le contact avec les Tunisiens à l'étranger, de renforcer les liens avec les organisations internationales et d'approfondir le dialogue sur les dossiers ciblant la colonie tunisienne. Quels sont les objectifs assignés suite à cette coordination ? Nous avons fixé comme objectif primordial de travailler en étroite collaboration avec le tissu associatif, tout en étant conscient de l'impact du rôle accru que pourra jouer la société civile en cette période difficile. La société civile sera un partenaire qui pourra nous soutenir dans cette action, aussi bien à l'intérieur du pays qu'à l'extérieur. C'est une démarche que nous avons adopté pour que la colonie tunisienne réagisse au programme du nouveau secrétariat à l'Emigration et aux Tunisiens à l'étranger. Notre association ne peut que générer des résultats tangibles, quand les cadres et les compétences tunisiennes accepteront volontairement de nous soutenir pour assurer la relance économique et faciliter la conclusion d'accords de partenariat et de coopération. Nos instances d'accompagnement et de veille apporteront l'assistance et l'encadrement adéquats à nos compétences à l'étranger, en leur facilitant les procédures administratives et douanières. La démarche que nous avons l'ambition d'engager émane d'un souci légitime d'enraciner chez cette frange le sentiment d'appartenance à la Tunisie. Quelle nouvelle politique migratoire prônée par votre département au cours de la prochaine étape ? Toutes nos actions sont menées conjointement avec l'Union européenne, les pays du Golfe, le Canada, les Etats-Unis, à travers la conclusion de partenariats avec des institutions mondiales comme la Banque mondiale. L'objectif étant de centraliser notre politique migratoire et de développer le rôle de la Tunisie dans ce domaine. La Tunisie n'est pas uniquement une terre de passage migratoire. Les événements en Libye ont montré qu'elle a été également le refuge de centaines de milliers de migrants de différentes nationalités qui ont fui la guerre pour s'installer dans le Sud tunisien durant des mois, trouvant protection, hospitalité et accueil dans le cadre du respect de la dignité de ces personnes. Quant à nos relations avec l'Occident et d'autres pays, nous affrontons des problèmes compliqués pour trouver des pistes de partenariats, dénicher les opportunités d'investissement et résoudre quelques problèmes aigus. J'estime que, pour ce genre de questions complexes, la Tunisie ne peut pas trouver toute seule des solutions sans concertation et coopération avec les pays frères et amis. Quel serait le devenir des biens et des espaces publics tunisiens à l'étranger ? Avez-vous défini un programme de restructuration et de ré-exploitation de ces espaces ? Tous les espaces à l'étranger sont pour tous les Tunisiens. Nous tenons à donner un nouveau souffle à ces espace pour les exploiter pour d'autres fins, et les transformer en des espaces socioculturels, des « maisons de la Tunisie ». Notre stratégie sera axée sur le renforcement d'une nouvelle politique migratoire centralisée et sur l'engagement d'une réforme globale du rôle et des missions des structures d'accompagnement d'encadrement et d'orientation mises en place. A cela s'ajoute le renforcement de l'enseignement de la langue arabe dans les pays de résidence. Nous avons déjà défini, avec le concours du ministère de l'Education, un programme commun d'enseignement et d'amélioration de la langue arabe.