Depuis hier, la galerie Kanvas abrite les œuvres de 12 artistes qui, à travers cette exposition, nous livrent leur fougue artistique et leur imaginaire affectif, tous genres et techniques confondus. Sous un aspect faussement naïf, les toiles de Mohamed Ben Soltane essaient de saisir des émotions et des caractères uniques et invraisemblables et de retrouver toute la candeur de l'enfance, grâce à la spontanéité et la simplicité des traits. Les figures minuscules d'hommes et de femmes, éparpillées sur la toile cirée en forme de nappes de table, sont comme des électrons qui occupent l'espace débordant d'énergie. Quant à Mohamed Ben Slama, il travaille ses œuvres en explorant de nouveaux chemins. Il peint des voyages, des invitations, des suggestions, des éventualités, installant une réelle émotion entre la peinture et le spectateur. Plutôt abstraite, sa peinture est comme une note de musique suggérée mais jamais jouée. Il invente dans ce vide ce qui lui plaît et nous laisse la place pour le voyage. On peut entrer dans le tableau, y circuler et y vivre plein d'aventures en mélangeant ce que l'on est et ce que l'on voit. On recherche un paysage dont les couleurs et la matière se laissent à peine entrevoir. Rien n'est défini ni définitif . Tout est évolution et mouvement dans l'instant fragile et éphémère. De son côté, Noutayl Belkadhi nous interpelle avec ses sculptures en cuivre et autres métaux représentant des animaux mythologiques. Une chasse est lancée à chaque fois où une bête bouge grâce à un mécanisme électronique, mais c'est le chasseur qui est sur la défensive! Imen Berhouma, elle , s'est servie d'éléments et de fragments altérés par le temps, recueillis ici et là, qu'elle a assemblés, confrontés, superposés et collés, déterrant ainsi leur âme, leur sensibilité. Leur rencontre fortuite sur la toile ou sur le papier laisse apparaître leur beauté qui devient finalement si évidente. Réunis, ils dégagent comme une sensation de bonheur, ils vibrent, irradient, affrontent à nouveau la lumière et...sortent de l'oubli. Le récit du noir et blanc Par ailleurs, des photographies, en noir et blanc, figent des bribes d'images et des instants qui peuvent heurter, réveiller ou révolter, des espaces abandonnés, vidés des êtres, des périphéries oubliées... Dans cette profusion d'images, se lisent la sensibilité esthétique et la charge émotionnelle contenues dans le filtre du regard des jeunes artistes dont certains racontent et que d'autres découvrent. En effet, on sent que Wassim Ghozlani, comme Lilia El Golli et Karim Ben Amor ont pris plaisir à jouer avec les cadrages et avec la juxtaposition des plans pour créer un passage entre la réalité de ce qu'ils ont perçu, l'espace d'une fraction de seconde, et le rêve, l'échappée onirique, voire impalpable, de l'image, pour rendre des atmosphères chaleureuses entre le silence des intérieurs et l'espace extérieur grouillant de monde, avec une alternance entre le jour et la nuit, le blanc et le noir... Chaque prise est en relation avec l'imaginaire de l'artiste dans son aspect fugace et sensible et la réalité environnante en ce qu'elle a de particulier, banal ou insolite. Mais tous ces fragments d'images, qui passent à travers le prisme de la sensibilité des photographes, sont l'expression des impressions ajoutées, rajoutées ou simplement posées sur la beauté intérieure de l'objet ou de la personne que l'œil, très observateur, a su capter. Une exposition qui vaut assurément le détour!