Voilà déjà une semaine que Aïn Draham se trouve sous un épais manteau de neige. A perte de vue, les montagnes et les falaises ressemblent à une chaîne d'icebergs étendue sur les hauteurs et les plaines. Au bord des routes, récemment dégagées, s'entassent des tonnes de neige sur plus d'un mètre, couvrant de vastes espaces agricoles et forestiers. De bon augure pour la saison, à ce qu'on dit. Mais, au premier plan, les habitants des environs se plaignent face à ce qu'ils considèrent comme une véritable catastrophe naturelle, catastrophe qu'ils n'ont pas connue depuis belle lurette. Faute d'une intervention rapide, puisqu'elle n'a eu lieu qu'avec un retard de quatre jours, ce phénomène naturel est devenu une calamité. Hier, samedi, tout était là, tout était mis en oeuvre. Mobilisation tous azimuts. Citoyens, engins d'équipements lourds étaient également présents, en pleine action, s'efforçant de déblayer les amoncellements de neige, d'évacuer les rues et de débloquer la circulation. Des opérations visant surtout à faciliter le passage des convois humanitaires et l'acheminement des aides vers leurs bénéficiaires. Au siège de la délégation, des jeunes bénévoles, tout feu tout flamme, sont en train d'inscrire sur une longue liste d'attente les noms des familles sinistrées afin qu'elles reçoivent leur part de vivres et de couvertures. L'opération s'est déroulée volontairement en l'absence des responsables locaux et régionaux, étant donné que, aux dires des habitants, le délégué a déserté son poste, en pleine crise, pour fuir les regards mécontents. Et au flux massif de ceux qui n'ont pas obtenu le moindre soutien en nature répond le flux des eaux, désormais, dans les ruisseaux, avec la fonte progressive de la neige. Ce sont des courants d'une eau glaciale qui envahissent les dédales de la ville. La fonte redonne cependant espoir à de nombreuses autres familles, jusque-là prisonnières dans leurs maisons, sur les flancs des montagnes. Des localités entières sont également restées isolées, jour et nuit, sans aucune possibilité d'accès. Avec, on ne l'oublie pas, des cas de décès enregistrés et ces cadavres d'animaux épars ici et là, victimes inertes d'un froid trop insupportable... Une situation que les natifs de la région ont qualifiée d'alarmante, déplorant le retard des aides et le caractère aléatoire de leur distribution : certains en ont bénéficié au détriment d'autres. D'où une anarchie qui s'installe de partout, perturbant par conséquent le rythme des dons. Devant la salle de sport polyvalente dont dispose la localité de Aïn Draham, des files indiennes se sont formées au petit matin, dans l'espoir de mettre fin à une attente d'au moins trois jours de promesses qui ne s'accomplissent toujours pas. Hélas, les caravanes et les convois d'aides prévus ont été déroutés vers d'autres contrées, elles aussi défavorisées et dont la situation est encore plus critique. Celles-ci sont encore dépourvues d'eau potable, de gaz, de pétrole à lampe et d'électricité. Le nécessaire absolu qui manque, révèle une vieille femme venant de quelque dix kilomètres de la ville... Finalement, arrivent les aides : il aura fallu attendre 16heures pour qu'un convoi arrive à destination. Dans la mesure du possible, l'Armée nationale s'est organisée pour mieux gérer la distribution. La foule est considérable. Chacun a droit à un petit paquet de denrées alimentaires et d'autres produits divers, mais pas de couvertures ni d'effets vestimentaires. Du coup, certains parmi eux ne manquent pas de réagir, affichant leur mécontentement. Car, selon eux, leur attente n'est pas à la hauteur de l'événement. Déception ! Par ailleurs, une cellule de crise travaille en parallèle avec un comité ad hoc, composé des membres de la société civile de la région. Sans aucune coordination, chacun travaille de son côté. Ce qui se répercute sur la distribution des convois et la gestion des aides, dont une partie ne parvient pas à leurs vrais destinataires. Pis encore, avant même leur arrivée, des aides ont été livrées à tort et à travers. Certains convois sont parfois pris d'assaut en cours de route. Une des raisons qui ont poussé les habitants à prendre leur mal en patience, et à adresser des critiques aux responsables en place. Le froid fait cinq victimes La vague de froid accompagnée de fortes chutes de neige a fait cinq morts dans le Nord-Ouest, quatre dans la région de Aïn Draham et un décès dans la localité de Ghoura (délégation de Ghardimaou), annonce le directeur général de la Protection civile.