La justice transitionnelle est une question qui a fait couler beaucoup d'encre et suscité plus d'un débat et plus d'une controverse. Elle est en effet tellement complexe et délicate qu'elle exige, a priori, une série de réflexions approfondies. Dans le droit fil du traitement des différents cas, parmi les familles des martyrs et blessés de la révolution ayant droit à une réparation équitable, le ministère des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle s'est engagé, dès la semaine dernière, dans une série d'entretiens et de concertations avec les partis politiques et les différentes composantes de la société civile. L'objectif est d'impliquer toutes les parties prenantes dans l'œuvre de justice, en favorisant un nouveau terrain d'entente et de réconciliation. «Il s'agit d'une question assez compliquée qu'on ne peut aborder sans prendre l'avis de tous, et sans s'organiser selon une approche de consultation participative. Ce qui impose plus de transparence et de clarté». C'est ce qu'a déclaré Mme Maya Jeribi, secrétaire générale du Parti démocratique progressiste (PDP), à l'issue de sa rencontre, hier matin, avec M. Samir Dilou, ministre des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle, au siège de son département au Bardo. Elle a indiqué avoir transmis au ministre les préoccupations d'un certain nombre de Tunisiens face à la lenteur du traitement des dossiers des martyrs et blessés de la révolution, en lui rapportant qu'ils souhaitent que les procédures soient accélérées. Elle a mis l'accent, d'autre part, sur la nécessaire réconciliation avec les acteurs économiques: une condition sine qua non pour booster la machine de l'investissement et du développement régional. Elle souligne également l'intérêt d'instaurer une nouvelle culture des droits de l'Homme et de l'acceptation de l'autre dans sa différence, dans le cadre de la pluralité et du respect mutuel. «Etant donné que la diversité des points de vue est une source de richesses et non pas de discorde». Mais, fait-elle remarquer, la concrétisation de la justice transitionnelle n'est pas du ressort exclusif du gouvernement. Elle constitue plutôt une responsabilité partagée et une action commune, engageant toutes les parties concernées. Mais, qu'entend-on par justice transitionnelle? Qui peut en profiter ? Quels critères doit-on adopter pour la réaliser? Et comment passer à la réconciliation nationale ? Autant d'interrogations que la secrétaire générale du PDP n'a pas manqué de soulever pour dire qu'il est impératif de traiter ce dossier dans la transparence et la célérité requises. Reçu également, M. Ahmed Brahim, premier secrétaire du Mouvement Ettajdid, affirme qu'il existe un accord de principe pour accélérer le processus de la justice transitionnelle et le traitement des dossiers des martyrs et blessés de la révolution. Il s'agit, pour lui, d'une condition préalable pour pouvoir tourner la page d'une étape de dictature et d'injustice. De son côté, M. Samir Dilou a affirmé que ces rencontres reflètent la volonté de son département d'être à l'écoute des propositions et recommandations des différentes parties, toutes sensibilités politiques confondues, et de faire en sorte que le processus de la justice transitionnelle soit une responsabilité participative. Sa réalisation, a-t-il ajouté, dépend d'une volonté politique qui devrait ainsi se traduire par un cadre législatif à travers l'institution du statut de la justice transitionnelle, et ce, conformément à l'article 24 de la loi provisoire organisant les pouvoirs publics. Dans une phase ultérieure, une instance nationale indépendante sera créée pour se charger de la justice transitionnelle. A ce niveau, toutes les parties prenantes sont appelées à livrer leurs points de vue et leurs propositions pour s'acheminer vers une conception commune.