• Ces derniers mois, le Tunisien a vécu au rythme de la cherté de la vie. Avec le kilo de piment qui a atteint la barre des 2d500 et des tomates vendues à 3d le kilo, et des salaires qui n'ont pas évolué d'un iota, dur, dur d'être un père de famille et de subvenir aux besoins quotidiens. Mais voilà, avec l'arrivée de l'été, les prix des fruits et légumes ont enregistré une nette baisse. La Presse s'est déplacée jeudi et vendredi derniers, respectivement, au Marché central de Tunis et au souk de Nabeul pour prendre le pouls des prix. Il était 10h30. La halle des fruits et légumes au Marché central de Tunis est pleine de gens venus faire leurs courses. La satisfaction des consommateurs semble générale, en raison notamment du bon rapport qualité/prix des produits offerts. Selon M. Mohamed Ayari (marchand de légumes au Marché central depuis 30 ans), les prix des légumes ont chuté : «Tout est devenu moins cher par rapport aux prix du mois d'avril. Par exemple, le kg de pomme de terre est passé de 1d400 à 750 millimes». Un constat que M. Mustapha Kraïem, retraité habitant à la cité Ibn Khaldoun, ne partage pas : «Tout est encore cher. Les prix ont été multipliés par quatre. Lors de ma première année de retraite, avec ma bourse de 700 dinars, je pouvais me permettre d'acheter une bonne quantité de pommes de terre, ce qui n'est plus le cas.». Un peu plus loin nous avons rencontré M. Ahmed Hafhouf, gestionnaire: «Hélas, en Tunisie, il n'y a plus de classe moyenne. Avec l'inflation, la vie est devenue infernale. Certes, les prix ont enregistré une légère baisse, mais cela reste toujours insuffisant». Par contre, Mme Ahlem Mseddi, femme au foyer, voit les choses différemment : «Au Marché central, il y a de tout. Il faut admettre que la bonne qualité est plus chère, mais je n'arrive pas à comprendre pourquoi la pomme de terre est vendue à 750 millimes/kg alors qu'à la radio, on nous dit que le kilo a été fixé à 600 millimes?». Les grossistes en point de mire Sur ce point, Hassen Ezzedine, marchand de légumes au Marché central, estime que «c'est tout à fait normal que la pomme de terre soit vendue à 750 millimes vu qu'on l'achète du marché du gros à 650 millimes. Par contre, nul ne peut douter de la baisse des prix qui n'ont rien à voir avec ceux affichés en hiver. Par exemple, le piment a atteint 1d800 pour se stabiliser à 1dinar et maintenant, il est vendu à 850 millimes. Seuls les petits poids ont augmenté en passant de 1d280 à 1d495, car ils ont dépassé leur période». A la sortie de la halle, MM. Mounir Ben Amor et Hédi El Khezami, retraités, pensent que «les prix affichés chez les marchands sont anormaux et tout le monde accuse les grossistes qui jouent l'intermédiaire entre l'agriculteur et le consommateur. Certains expliquent toutefois cette envolée des prix par l'importance de la demande du côté de nos voisins libyens en matière de produits agricoles. Une demande qui a dépassé le quota habituel. De ce fait, plusieurs agriculteurs ont pris la fâcheuse habitude de vendre leurs productions à des exportateurs à des prix plus lucratifs que d'habitude. D'autre part, le bureau de la douane du côté de Ben Guerdane a décelé plusieurs activités de contrebande en ce domaine». Pour rééquilibrer la situation, les deux retraités proposent la mise en place d'un marché hebdomadaire qui encourage le commerce directement «du producteur au consommateur», comme c'est le cas dans certains pays, notamment européens, ou encore créer le concept des «hard discounts» où le consommateur peut trouver des produits alimentaires et agricoles bon marché. A Nabeul : des prix raisonnables A Nabeul, le constat est plutôt différent : en effet, au souk de la ville, qui se trouve à la périphérie du marché municipal, des agriculteurs et de petits grossistes présentent leurs étalages des fruits et légumes à des prix très abordables. Ils sont, de loin, moins chers que ceux proposés au Marché central de Tunis. Sauf pour les tomates dont les prix restent assez élevés avec 2 dinars le kilo, comme en témoigne Mme Naïma : «Au souk de Nabeul, tout est à la portée de tout le monde sauf pour les tomates dont le prix est toujours élevé par rapport à la normale». De son côté, Hatem Bel Haj Hmida, un habitué du souk de Nabeul, estime que ce bon rapport qualité/prix s'explique par le fait «qu'au souk de Nabeul, la quasi-majorité des vendeurs sont des agriculteurs. Donc il s'agit d'un marché en plein air : du producteur au consommateur. La présence des agriculteurs poussent les petits grossistes à pratiquer des prix très abordables. Sans oublier que durant cette saison, au Cap Bon, presque tous les produits maraîchères deviennent très abordables. Pour ce qui est des tomates, je pense qu'il faut attendre encore».