Des thèmes relevant du vécu de la population comme l'ordre sécuritaire, les coupures d'eau, l'amoncellement des déchets, les règlements des agents de propreté ont été débattus hier à l'Assemblée constituante. Dans le cadre de cette séance mensuelle des questions au gouvernement, qui a duré près de six heures, se sont relayées les interventions des ministres et celles particulièrement virulentes de certains députés de l'opposition. Compte rendu. Le ministre de l'Enseignement supérieur, Moncef Ben Salem, a révélé dans son intervention que les résultats du baccalauréat sont en deçà des estimations qui étaient de l'ordre de 80 mille réussites alors que le chiffre réel est de l'ordre de 60 mille uniquement. Quant aux procédures d'orientation, le ministre précise qu'elles obéissent à des «paramètres précis, publiés sur internet», vérifiables et appliqués équitablement pour tous, sur un pied d'égalité. Et ce, malgré «les interventions fréquentes» faisant pression sur les services du ministère, précise-t-il. La question des coupures d'eau a été largement traitée par les députés. Chaque constituant s'est chargé de porter les doléances de sa région. Constat ; un grand nombre de gouvernorats ont été touchés et le sont encore. Les raisons de cette crise sans précédent sont multiples, répond le ministre de l'agriculture : la défectuosité des équipements, le manque de coordination entre la Steg et la Sonede, le manque de moyens de la société nationale chargée de la distribution de l'eau potable. Le constituant Samir Taieb a précisé à ce titre qu'il faut traiter les problèmes en profondeur, au lieu de limoger les compétences nationales en les « rendant responsables de tous les maux ». Faisant référence aux directeurs de la Sonede qui ont été «injustement» révoqués. En ajoutant que le temps est peut-être venu pour créer un ministère de l'eau. Cette revendication est partagée par plusieurs autres constituants. Questionnements sur fond de crise Le ministre de l'Agriculture a ajouté dans sa réponse que les estimations de la Sonede prévoyaient en 2014 le déclenchement de cette crise d'eau potable, que d'ici là «des projets seraient mis en place pour pallier ce manque». Or malheureusement les prévisions étaient erronées et les coupures se sont déclenchées bien avant que les projets ne voient le jour. Le ministre de la Santé Abdellatif Mekki a consacré l'essentiel de son intervention aux incidents « graves » ayant eu pour théâtre l'hôpital universitaire Hédi-Chaker de Sfax, en précisant que cette «affaire a été politisée plus qu'il n'en faut». Pour ajouter que le ministère a agi dans le cadre de la transparence en faisant preuve de patience face à «un blocage qui dure depuis six mois», à cause du sit-in observé par quelques membres du personnel. Le ministre de la Santé a dénoncé vivement les altercations survenues entre les forces de l'ordre et des membres du personnel de la santé à l'hôpital. Les forces de l'ordre avec les magistrats dépêchés sur les lieux avaient dû se retirer, pour y retourner le lendemain, soutenus par les militaires. Le ministre affirme que ces pratiques violentes d'empêcher le directeur général de l'hôpital d'accéder à son poste n'ont rien à avoir avec les revendications syndicales. Et que «le bureau syndical n'a pas à intervenir dans les décisions de l'Etat dans les nominations». Le ministre de l'Education, M.Abdellatif Abid, a été interpellé sur des questions ayant trait à l'amélioration d'un système éducatif défaillant, la gestion des grèves des enseignants, le rapprochement des conjoints. Plusieurs constituants ont dénoncé un certain «favoritisme et manque de transparence» dans le placement des enseignants à peine embauchés, lorsque d'autres attendent depuis des années d'être nommés dans leurs régions respectives. La constituante Karima Souid s'est adressée pour sa part au ministre du Tourisme pour lui demander des explications sur la fermeture des cafés et restaurants durant le mois de Ramadan dans «un pays qui se dit touristique». Elle lui a demandé également d'éclairer l'opinion sur la situation financière des établissements hôteliers. En requérant des tarifs promotionnels pour les Tunisiens résidant à l'étranger qui viennent passer leurs vacances dans leur pays d'origine. Le ministre de l'Intérieur a été apostrophé plusieurs fois par des députés qui ont fustigé le « laxisme de l'Etat » face aux dépassements graves d'un «salafisme violent et organisé». La récente agression du leader Abdelfattah Mourou n'est pas un cas isolé, insistent-ils. La députée Lobna Jeribi a dénoncé pour sa part « cette pratique curieuse d'imposer aux femmes dans certaines unités industrielles et certaines régions de porter le voile » en demandant des explications et à l'Etat d'intervenir. M.Ali Laraiedh a précisé que l'application de la loi se fait à l'endroit de tous, sans exception aucune, que la situation sécuritaire de l'ensemble du territoire est mieux maîtrisée que par le passé, mais que beaucoup reste à faire. Il a jouté que désormais les forces de l'ordre commencent à comprendre les missions qui leur sont imparties après une perte de repères. Parmi les critiques d'ordre général adressées aux membres du gouvernement, le manque de vision dans la gestion des affaires de l'Etat et les réflexes réactifs sans s'appuyer sur aucune stratégie préalablement réfléchie et arrêtée. La séance a été levée à 18h, elle se poursuivra aujourd'hui.