Outre les effets néfastes de la contrebande, il va falloir compter avec la hausse galopante des prix des moutons. L'Aïd Al Idha s'installe déjà dans nos murs où il a tôt fait de planter son décor. Ça et là, des points de vente de moutons émergent, éparpillés un peu partout dans les communes du pays. Et ça marche, semble-t-il, comme sur des roulettes. Notamment dans le Grand-Tunis où les rassemblements ovins poussent tels des champignons. «Comme vous le voyez, notre “saison" a commencé prématurément», lance, fièrement, un éleveur de moutons fraîchement arrivé à l'Ariana. «Des 50 têtes ovines que j'ai emmenées avec moi, j'ai déjà réussi à en vendre dix. Et cela a largement dépassé mes prévisions», jubile-t-il, tout en tenant à préciser que «contrairement aux rumeurs qui circulent, les prix affichés sont à la portée de toutes les bourses». Lui rendant l'ascenseur, un père de famille n'a pas caché sa déception. «Les prix, s'écrie-t-il, ont presque doublé par rapport à ceux de l'année dernière. Au grand dam des familles nécessiteuses ou à faible revenu». Lueur d'espoir L'heure est donc à la montée vertigineuse et presque incontrôlable des prix des moutons. C'est là, en tout cas, un aveu partagé par tous les premiers acheteurs qui ne cachent pas leur désarroi. Cependant, une éclaircie dans la grisaille pour les consommateurs, avec l'émergence des points de vente réguliers devant être aménagés par la société Ellouhoum pour l'écoulement des troupeaux importés de Roumanie. Ces bêtes ,outre leur qualité nutritive semblable à celle du mouton tunisien de pure race, seront vendues conformément à des tarifs fixés par l'Etat, et tenant compte du pouvoir d'achat du citoyen. En effet, ces prix varient de 250 à 700 dinars la tête, ce qui est de nature à contrecarrer la poussée des prix et les pratiques des tricheurs parmi les vendeurs. C'est d'autant plus prévisible que les mairies vont mobiliser, à l'occasion de l'Aïd, leur police municipale afin de mener la vie dure aux contrevenants. «Acceptons-en l'augure», lance une femme au foyer, qui conclut par ce vœu laconique : «Pourvu qu'on ne bêle pas idiot, cette année.» Le clou enfoncé Comme il n'y a pas de fumée sans feu, il faut dire que la hausse galopante des prix des ovins qui sévit jusqu'à présent a été essentiellement alimentée par le phénomène de la contrebande qui perdure encore à nos frontières avec la Libye et l'Algérie. Là où les troupeaux continuent de circuler et de passer clandestinement d'un pays à un autre, au moyen de stratagèmes diaboliques et de tours de bélier, pardon de renard, que nos vaillants douaniers et agents de la Garde nationale éprouvent toujours de la peine à faire avorter. D'ailleurs, la saisie jusqu'ici de plus de 2.000 têtes ovines auprès de contrebandiers ne peut constituer qu'une piètre consolation comparativement avec l'ampleur qu'a prise ce phénomène, tout au long des derniers mois.