• Le parcours d'un candide au pays des merveilles. Celles-ci ont un goût suspect au pays du Cèdre, au bord de l'explosion Après la débâcle de juin 1967, pendant que l'Egypte de Nasser se livre à une «guerre d'usure» sans merci pour reconquérir son Sinaï, Palestiniens et Israéliens s'affrontent au Liban, une poudrière au bord de l'explosion. La prise d'otages de Munich, Septembre noir, Tell Zaâtar, autant de dates marquantes dans le chemin de calvaire jalonnant la destinée d'un peuple condamné à l'exil. C'est dans ce contexte que Kamel Haddoux, étudiant algérien vivant à Paris, idéaliste et bon vivant, se lie d'amitié à un groupe kabyle d'opposition. Comme bon nombre de ses compatriotes, il soutient fermement la cause palestinienne. Il n'a jamais supporté qu'on réduise le drame palestinien à un conflit étriqué entre juifs et Arabes, entre Islam et judaïsme. Le monde, selon Kamel Haddoux, a toujours été traversé par une faille séparant les oppresseurs et les opprimés de toute la planète. Mais la singularité de la tragédie palestinienne, emblématique de tous les damnés de la terre, réside dans l'intolérable partialité de l'Occident. C'est précisément ce fait accompli qui a justifié l'engagement de Kamel ainsi que de tous les adhérents du RARE (Rassemblement des Algériens réduits à l'exil) contre l'insupportable «hogra» et la méprisante injustice des médias occidentaux qui, sciemment, ont fait porter aux Palestiniens la responsabilité de la Shoah, disculpant ainsi les véritables criminels de guerre que sont Vichy de Pétain et le régime hitlérien. Dans les coulisses de l'histoire Alors que Kamel rêve de découvrir Beyrouth, féérie des Mille et Une Nuits et «Paris du Moyen-Orient», et le label n'est pas abusif, il se voit nanti d'une mission «casse-cou» qu'il n'ose refuser: faire passer à Beyrouth et clandestinement une valise à double fond contenant de faux passeports. Nadir Benhila, le chef du RARE, l'assure qu'il n'y a aucun danger, que l'aéroport est une vraie passoire. Pourtant, Kamel se fait arrêter. Et c'est le point de départ d'une longue série de galères. Emprisonné puis relâché sous haute surveillance, recherché par Interpol, traqué par le Mossad et ses alliés au Liban, les «Kataèb» (Phalangistes), il a, à ses trousses, une formidable escouade de contre-espions, déterminés à lui faire la peau. Kamel est obligé de se cacher et de faire avec. De plus, il ne pourra regagner Paris et retrouver sa Lydie que lorsque le gouvernement libanais sera formé. Pris en charge par les Palestiniens, ce qui aurait dû être un aller-retour, un simple voyage d'agrément, se prolonge en vacances forcées, un enfer. Dans la tourmente des camps de Sabra, le quartier des déshérités palestiniens, siège du mouvement «Eylûl aswad» (Septembre noir) et dans la folle insouciance du Beyrouth by night de Hamra Street, d'Achrafieh, de la Baie Saint-Georges, d'Aley du Chouf druze et des fiefs de la montagne chrétienne des seigneurs féodaux, Kamel promène le lecteur dans un tourbillon étourdissant de paradoxes. Djilali Bencheikh, l'auteur, écrit en préambule‑: «Il ne s'agit ni d'une autobiographie ni d'une fiction totale. La plupart des protagonistes de cette aventure littéraire sont désormais disparus. C'est à leur souvenir que je dédie ce livre qui, j'espère, laissera trace pour les générations à venir. Des générations souvent privées du jardin du passé par le désert de l'occultation ou le bulldozer de la désinformation». L'auteur Djilali Bencheikh est né en Algérie à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Après des études d'économie à Alger puis à Paris, il se tourne vers la vie associative, le journalisme et enfin la littérature. Il est actuellement chef d'édition à la section française de Radio-Orient où il anime une chronique quotidienne de littérature intitulée «Au fil des pages». Auteur de romans et de nouvelles, il a publié aux éditions Elyzad Tes yeux bleus occupent mon esprit, prix Maghreb 2007 de l'Association des écrivains de langue française (Adelf). ————— Beyrouth canicule de Djilali Bencheikh, éditions Elyzad, Tunis, avril 2010.