Le président de l'Union déplore des décisions hâtives et unilatérales, faisant fi de leurs conséquences sur le secteur agricole et les agriculteurs Au cours d'une conférence de presse tenue hier au siège de l'Utap, le patron des agriculteurs et son staff ont dressé un bilan exhaustif des difficultés qu'ils rencontrent et qui empêchent l'Utap de jouer son rôle, celui de contribuer concrètement au développement du secteur agricole et à la préservation des intérêts des agriculteurs. Ces difficultés se résument au refus du ministère du Commerce de tenir compte des remarques et des propositions de l'Utap dans la prise des décisions essentiellement à propos de la fixation des prix des produits agricoles et de l'importation. « On nous invite aux réunions de concertation juste pour le décor car le ministère du Commerce n'est pas habilité à fixer seul les prix par exemple, mais notre présence ne sert à rien puisque les prix finalement fixés sont ceux établis préalablement par le ministère en question, c'était le cas pour le poulet, la tomate et d'autres produits encore », explique M. A. Ezzar. Dernier exemple de décision unilatérale du ministère du Commerce, celle d'importer des moutons pour l'Aïd El Kébir alors que « le cheptel répond largement aux besoins locaux », soutient le président de l'Utap. Selon les statistiques de l'organisation et du ministère de l'Agriculture, le cheptel local compte autour de 912 mille têtes d'ovin alors que les besoins pour l'Aïd du sacrifice avoisinent les 90 mille têtes. Pour le président de l'Utap, les décisions du ministère du Commerce ne répondent à aucune logique et surtout ne tiennent pas compte de la conjoncture du pays ni des conséquences de ces décisions sur l'économie nationale : «Comment peut-on expliquer que le ministère du Commerce choisit de sortir les devises des caisses de l'Etat pour financer des opérations d'importation coûteuses et inutiles alors qu'il ferme la porte aux exportations des fruits, des légumes, du poulet et des œufs notamment, produits qui enregistrent des excédents de production et qui pourrissent en raison du manque d'espaces de stockage comme c'est le cas actuellement de l'oignon ? », s'indigne M. Ezzar. C'est également le cas de la tomate. Préserver les stocks stratégiques La Tunisie qui était dans un passé très proche 9e exportateur mondial de tomate s'apprête à en importer pour combler le vide laissé par la baisse de 40% de la récolte de cette année. « Les agriculteurs font face à d'énormes difficultés tandis que le ministère du Commerce ne se gêne pas à appliquer la politique des deux poids deux mesures », ajoute le président de l'Utap. Et d'expliquer que le ministère du Commerce s'est empressé de répondre favorablement aux revendications des industriels en augmentant le prix de la boîte de tomate concentrée de 290 millimes, sans notre consentement, et traîne à accorder aux agriculteurs l'augmentation de 15 millimes sur le prix du kilo de tomate décidée en 2012 et à leur verser le reliquat de cette augmentation. Tout en annonçant la fin de l'interdiction d'exportation de la tomate destinée à la transformation, accord contracté lundi dernier avec le ministère du Commerce, le président de l'Utap insiste sur la situation délicate du secteur agricole et des agriculteurs. Il appelle à cette occasion le Groupement interprofessionnel des industries alimentaires à préserver les stocks stratégiques, notamment de la pomme de terre, et le ministère du Commerce à jouer son rôle de régulateur du marché, en l'occurrence en réservant plus de frigos de stockage pour les produits locaux dans le but de préserver les récoltes et les intérêts de l'agriculteur et, partant, du secteur agricole en général. Le président de l'Utap appelle également tous les intervenants à lancer au plus vite un dialogue national dans le but d'élaborer une véritable politique agricole et décider des garde-fous à mettre en place pour lutter contre la contrebande et le clientélisme qui ont porté un coup sévère au secteur avicole, « actuellement à 70% de son rendement », et à la culture des céréales puisque les intrants importés se vendent à des prix très élevés dans le marché parallèle. Le président de l'Utap et son staff ont finalement brossé le tableau d'une situation paradoxale où l'abondance de la production agricole ne bénéficie ni à l'agriculteur, ni au citoyen, ni au pays et au lieu d'être une bénédiction du ciel, elle a contribué à vérifier le constat d'échec des dirigeants.