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Lutte, sacrifice et acquis
Fête du travail - Histoire du mouvement syndical tunisien
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 05 - 2014


Une solide tradition de lutte et plusieurs martyrs
Presque centenaire, le mouvement social lié au travail salarié possède en Tunisie une solide tradition de lutte et a donné plusieurs martyrs, surtout sous l'occupation française (1881-1956).
Un quart de siècle s'est cependant écoulé entre le premier mouvement des travailleurs en Tunisie et la création, en décembre 1924, du premier syndicat tunisien, la Confédération générale tunisienne des travailleurs (Cgtt).
Le 8 septembre 1900 a eu lieu en effet, à Tunis, la première grève. Celle des cheminots qui étaient pour la plupart d'entre eux des Français. Ce n'est que le 1er mai 1904 qu'un vrai mouvement social eut lieu en Tunisie. Une semaine durant, les travailleurs de différentes nationalités avaient enchaîné grèves, manifestations et autres actions de contestation avec, comme principales revendications, la diminution des heures de travail et le repos hebdomadaire.
Juste après la fin de la grande guerre (1914-1918) et en avril 1919, les cheminots récidivent en observant une grève. Elle sera suivie en 1921 d'une seconde, venue quelques mois après celle des mineurs (avril 1920). Mais c'est en 1924 qu'une série de grèves ayant touché plusieurs secteurs suite à la détérioration notable du pouvoir d'achat des travailleurs, est venue inaugurer la naissance du mouvement syndical tunisien même si des syndicats français actifs depuis des années regroupaient sous leurs structures des travailleurs tunisiens.
Ephémère Cgtt
Deux dockers du port de Bizerte trouvèrent la mort le 11 septembre 1924, plusieurs autres furent blessés et 40 arrêtés suite aux mouvements de revendication qui éclatèrent le 13 août de la même année. Ce sont là les deux premiers martyrs du mouvement des travailleurs tunisiens qui va enfin, mais pour une très courte durée, avoir sa propre centrale syndicale suite à l'initiative du leader M'hamed Ali Hammi (1890-1928).
L'effervescence ne va pas tomber et en janvier 1925, c'est la région de Hammam-Lif qui va réagir contre les mauvaises conditions de travail et les bas salaires.
Après des semaines de négociations, les travailleurs de la cimenterie locale entrèrent en grève le 19 janvier. Au troisième jour, la grève se propagea à la carrière et fabrique de chaux de Borj Cédria (Potinville) à quelque sept kilomètres de la cimenterie. La solidarité qui s'ensuivit vint accentuer l'impact du mouvement qui subit la répression violente des autorités coloniales et vit la traduction en justice de plusieurs syndicalistes dont M'hamed Ali, puis la dissolution de la Cgtt.
Les syndicalistes tunisiens essayeront de se regrouper au sein d'une structure tunisienne, mais échouèrent plusieurs fois et durent se contenter de militer au sein des antennes tunisiennes de centrales françaises, dont la plus active était la CGT (Confédération générale du travail).
En 1937-1938, Belgacem Gnanoui et ses compagnons tentèrent de ressusciter la Cgtt, mais se heurtèrent à la volonté de l'occupant d'empêcher toute entreprise de ce genre. La Cgtt n'a donc pu se développer et finit par péricliter.
L'Ugtt mène le combat
La lutte ouvrière permit malgré tout d'obtenir plusieurs acquis, tels que le droit au repos hebdomadaire (1908), la journée de dix heures, l'interdiction du travail de nuit en faveur des femmes, l'interdiction du travail des enfants de moins de 12 ans, la prise en charge par les employeurs des accidents du travail et la création de l'inspection du travail (1910) ou encore le droit syndical (1932).
La journée de huit heures sera instaurée en 1933 et le congé annuel payé en 1936, année qui verra la limitation des heures de travail à 40 heures par semaine au lieu des 48 heures jusque-là en vigueur.
Le tournant que connut la CGT suite à son congrès de mars 1944 et qui fit qu'elle devint sous l'emprise des communistes poussa plusieurs syndicalistes tunisiens, dont le jeune Farhat Hached (1914-1952) qui inaugurera avec ses compagnons de lutte une nouvelle vision de l'action syndicale. Pour la première fois, lutte sociale et mouvement national ne feront plus qu'un.
Par la création en 1944 du syndicat autonome des ouvriers tunisiens du Sud, Hached voulait ainsi donner tout son poids au travailleur tunisien souvent marginalisé par les autres centrales rattachées à la France.
Avec son homologue du Nord créée en 1945 et la centrale des fonctionnaires tunisiens et sous l'impulsion de Hached et le soutien du cheikh Mohamed El Fadhel Ben Achour, les syndicalistes tunisiens se regroupèrent et fondèrent le 20 janvier 1946 à Tunis, l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt).
Aussitôt créée, aussitôt au créneau. L'Ugtt s'attela à la tâche en prônant d'abord le dialogue. Devant l'indifférence des autorités coloniales elle décréta une grève générale à Sfax (le 28 juillet) puis des manifestations et des marches pacifiques un peu partout dans le pays.
Afin de solliciter la solidarité internationale, l'Ugtt demanda son affiliation à la Fédération syndicale mondiale (FSM). Demande qui ne sera satisfaite qu'au début de l'année 1947. Celle-ci verra aussi la conduite de plusieurs grèves dont celle ayant eu lieu dans les grandes villes du pays du 2 au 6 août et au cours de laquelle du sang tunisien coula sous les balles de l'occupant. Soit quatre morts et un blessé à Djebel Jelloud à Tunis et une trentaine de morts et 150 blessés à Sfax.
L'engagement national devint alors clair et l'Ugtt clama haut et fort que sa lutte inclut aussi la défense des droits du pays avec ses ressources aussi bien humaines que naturelles et financières et la promotion de la démocratie.
Ayant constaté la partialité de la FSM et son alignement au bloc socialiste, l'Ugtt démissionna de ladite structure pour devenir un peu plus tard membre de la Confédération internationale des syndicats libres (Cisl). Cela permit à l'Ugtt, grâce au charisme et à l'engagement de Hached, de représenter des syndicats d'Afrique du Nord puis de tout le continent.
Devenu l'un des pilier du mouvement national et en raison de la pression internationale qu'il a su diriger contre la puissance coloniale, Hached fut lâchement assassiné le 5 décembre 1952 près de Tunis sur ordre de l'Etat français. Ce dernier fera tout pour se dérober de ses responsabilités et cela continue jusqu'à aujourd'hui. Une partie des archives compromettantes fut remise en 2013 à la famille du martyr mais la lumière sur ce crime d'Etat n'a pas été totalement faite.
Le martyre de Hached se transforma aussitôt en vraie dynamo du mouvement national et la flamme du peuple tunisien entre en insurrection depuis janvier 1952.
Avant cette tragédie, l'Ugtt avait développé tout un programme pour le développement du pays qui servira plus tard, et suite à l'indépendance de la Tunisie, à la doter de précieux outils de travail.
Contre la dictature
Faisant front commun avec le parti du Destour qui conduisait le mouvement national, mais gardant jalousement son indépendance, l'Ugtt participa aux élections du 25 mars 1956 pour la création de la Constituante. Celle-ci abolira, le 25 juillet 1957, la monarchie et dota le pays de sa troisième Constitution historique, première de l'époque contemporaine (promulguée le 1er juin 1959).
L'Ugtt restera une citadelle pour la lutte sociale et contre la dictature. Nous citerons ici la fameuse lettre du grand militant et leader national et syndical Ahmed Tlili (1916 - 1967) adressée à Bourguiba, lui reprochant son autocratie et le système policier qu'il a mis en place. Dans cette lettre historique datée de janvier 1966, le secrétaire général de l'Ugtt n'avait pas mâché ses mots.
L'Ugtt subira la plus grande répression de son histoire, suite aux événements sanglants du 26 janvier 1978 décrétée journée de grève générale. Evénements qui puisent leur origine du bras de fer de l'Ugtt-gouvernement Nouira et exacerbés par la découverte d'un plan pour assassiner le leader Habib Achour (1913-1999) compagnon de Hached et l'un des piliers du congrès du Destour de 1955 à Sfax qui permit au clan de Bourguiba d'évincer celui de Ben Youssef et d'instaurer ainsi le leadership incontestable de Bourguiba sur le mouvement national.
L'Ugtt jouera aussi un rôle décisif dans la chute de la dictature du clan Ben Ali (1987-2011) et accéléra les événements ayant abouti au renversement du dictateur Ben Ali le 14 janvier 2011.
Elle se distinguera par la suite par ses positions en faveur des catégories défavorisées décréta deux grèves générales, la première suite à l'assassinat le 6 février 2013 du leader de la gauche Chokri Belaïd et la seconde suite à l'assassinat le 25 juillet 2013 (fête de la République) du leader du Mouvement du peuple et constituant Mohamed Braham.
Mais son grand apport sera de conduire en compagnie de son homologue regroupant les patrons, l'Ordre des avocats et la Ligue des droits de l'Homme, le dialogue national. Processus qui a permis au pays d'avoir une feuille de route pour la transition et l'instauration d'un gouvernement d'indépendants.
Luttes et sacrifices qui lui ont valu d'être proposée puis inscrite en tant que prétendant au Prix Nobel de la paix pour 2014.
Grâce à la chute de la dictature, le mouvement syndical tunisien a accédé lui aussi au pluralisme. Réalité qui reste fragile et qui fait que les nouvelles centrales se sentent marginalisées et réclament à qui veut les entendre leur droit à participer à toutes les négociations qui touchent les droits des travailleurs.


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