La commission de sélection des candidats à l'Instance se réunit au cours de la semaine prochaine pour statuer sur les objections Avec l'expiration, vendredi 9 mai, du délai de soumission des oppositions sur les candidats retenus par la commission de tri parlementaire pour faire partie du Conseil directoire de l'Instance vérité et dignité (chargée de gérer le dossier de la justice transitionnelle), on s'attendait à ce que la commission se réunisse, hier, pour statuer sur les oppositions exprimées par les candidats récusés et pour examiner, également, les recours introduits à l'encontre des candidats retenus, mais dont la présence est jugée contraire à la loi organique portant création de l'Instance. Contacté par La Presse pour éclairer l'opinion publique, le constituant Oussama Sgheïr, membre de la commission de tri, précise : «Nous n'avons pas prévu de réunion pour aujourd'hui (hier) dans la mesure où nous attendons encore que nous parviennent les oppositions envoyées par la poste. La commission dispose selon la loi d'une semaine commençant samedi (hier) pour examiner les recours d'opposition à ses choix et décider de les accepter ou de les déclarer irrecevables. La commission se réunira au courant de la semaine prochaine et dans tous les cas nous serons dans les délais pour trancher». Quant aux principales oppositions, on apprend qu'elles concernent les candidats Khemeïs Chamari, Sihem Ben Sedrine et Khaled Krichi. Ceux qui s'opposent au maintien de la candidature de Khemeïs Chamari, dont en premier lieu le Réseau tunisien pour la justice transitionnelle (Rtjt), présidé par le Dr Kamel Gharbi, considèrent que la commission de tri n'a pas respecté l'article 22 de la loi sur l'Instance interdisant l'acceptation de tout candidat ayant «assumé un poste parlementaire ou au sein du gouvernement durant la période comprise entre le 1er juillet 1955 et la date de création de l'Instance». «La loi est claire et Khemeïs Chamari a occupé le poste de député de 1994 à 1996 avant d'être condamné à cinq ans de prison et expulsé du Parlement. Personne n'est en mesure de contester le passé militant de Khemaïs Chamari et sa grande expérience en matière de lutte pour la consécration des droits de l'Homme en Tunisie et à l'étranger. Cependant, la loi doit être respectée à tout prix. De plus, Khemaïes Chamari a occupé, après la révolution, le poste d'ambassadeur de Tunisie auprès de l'Unesco», renchérit le Rtjt. Quant à la candidature de Me Khaled Krichi, elle doit être rejetée pour la «simple raison qu'il a occupé, jusqu'à une date récente, le poste de porte-parole du mouvement Echchaâb avant de démissionner du parti. L'acceptation de sa candidature viole l'article 22 de la loi où il est clairement stipulé qu'il est interdit à tout candidat au statut de membre de l'Instance d'occuper une responsabilité au sein d'un parti politique». Juge et partie La candidate Sihem Ben Sedrine, dont le dossier a été déposée par le Centre international pour la justice transitionnelle (Cijt) qu'elle dirige elle-même, est récusée par certaines associations de la société civile qui lui reprochent son mauvais traitement de l'affaire de Radio-Kelma. «Avant que Radio-Kelma ne soit déclarée en faillite judiciaire, les journalistes y exerçant ont fait l'objet d'une injustice inacceptable de la part de Sihem Ben Sedrine et de son mari Amor Mestiri», soutiennent-ils. Maintenant que les oppositions ont été révélées, l'on se demande sur quelle base elles seront examinées. C'est l'article 25 de la loi organique créant l'Instance vérité et dignité. Dans cet article il est énoncé notamment : «La commission de nomination statue sur les litiges, dans un délai d'une semaine, à compter de la date de présentation de l'objection et après avoir entendu la défense du candidat visé». Est-il possible de récuser les décisions prises par la commission à propos des recours d'opposition ? Le même article précise : «Les décisions de la commission relative aux objections sont définitives et ne peuvent être révisées ni remises en question, sous quelque forme que ce soit, même par recours pour abus de pouvoir». En plus clair, la commission de tri fait fonction de juge et partie. Les auteurs de la loi ont réussi, en effet, à éviter à la commission le risque de voir ses décisions récusées par le Tribunal administratif, comme ce fut le cas pour la commission parlementaire chargée de sélectionner les membres de l'Instance supérieure indépendante des élections (Isie). D'ailleurs, le Tribunal administratif vient de se déclarer incompétent en la matière, en refusant de statuer sur les recours qui lui ont été soumis par certains candidats déboutés par l'ANC.