Avant même que les bureaux de vote ouvrent leurs portes, les files d'attente étaient déjà constituées devant plusieurs bureaux du côté de l'Ariana. Les Tunisiens se sont levés tôt, pour accomplir leur devoir électoral, fortement convaincus que leurs voix sont précieuses pour l'avenir de leur pays. Du côté de l'Ariana, ce dimanche semble un jour «d'aïd» : circulation fluide, légers problèmes pour se garer, des familles, voisins se sont déplacés en groupe et massivement, pour se rendre aux bureaux de vote. Certains se sont même mis sur leur «31». Et pour cause. Dimanche 26 octobre 2014 est une journée historique pour l'avenir de la Tunisie. Les Tunisiens éliront leurs représentants au parlement pour cinq ans et mènereront ainsi la transition démocratique vers des institutions permanentes, pour une durée de cinq ans. Les élections législatives en Tunisie, les premières depuis la révolution du jasmin en 2011, constituent, en effet, une étape cruciale dans le processus de transition démocratique et augurent une nouvelle ère pour la consolidation de l'édifice démocratique. A l'Ariana, 55 listes sont candidates dont 38 partisanes, six en coalition et 11 indépendantes. Elles se disputent les quelque 362 mille voix d'électeurs éventuels, pour la conquête de six sièges. La bataille est rude entre les candidats, dont plusieurs sont des têtes d'affiche de ce scrutin. Mais, la plupart des citoyens, en file d'attente, semblent être fixés et leur choix est désormais fait. A l'école internationale de l'Ariana, Hajja Fatma est arrivée avec ses feux filles. Elle nous a déclaré : «Aujourd'hui, c'est un jour spécial. C'est aujourd'hui qu'on aura à décider de l'avenir qu'on souhaite à nos petits-enfants». Elle a ajouté que pour ce qui la concerne, sa vie est derrière elle. «C'est pour mes petits-enfants que je suis venue». Les citoyens ont afflué massivement, exprimant leur joie, drapeau national flottant, et le slogan patriotique «Vive la Tunisie» scandé par les électeurs, tous âges confondus. A l'école Sidi Fradj de la Soukra, l'affluence durant les premières heures a été exceptionnelle. Sur les 3002 électeurs inscrits, 785 ont accompli leur devoir électoral. Force est de reconnaître que les bonnes conditions au sein des bureaux de vote étaient réunies pour garantir une opération de vote dans le calme et surtout avec fluidité. Mieux, en citoyens responsables, les électeurs ont accordé la priorité aux personnes âgées et aux handicapés. C'est au bureau de vote de l'école Habib Thameur, à l'Ariana, que nous avons rencontré Salah, à la sortie du bureau, accompagné par son fils. Salah a des difficultés à marcher et est sur une chainse roulante. «Je ne pouvais en aucun cas rater cette journée historique. Il fallait absolument que je me déplace, en dépit des difficultés. Pour ce qui me reste à vivre, je voudrais que ma Tunisie continue à être cette exception du printemps arabe. D'où l'impératif de réussir la transition démocratique», a-t-il lancé, avec la satisfaction du devoir accompli. Et à son fils de renchérir, trois ans après la révolution qui a mis fin à la dictature de Ben Ali et une transition tumultueuse, nous sommes tous appelés aux urnes pour élire nos représentants au parlement. Des représentants permanents pour cinq ans qui auront le temps de porter le pays en avant». Le chef du Centre de vote Habib Thameur nous a assuré que l'affluence est bonne et qu'elle augure une bonne participation des Tunisiens. Pendant les premières heures du matin, les files d'attente étaient bien organisées et les citoyens attendaient patiemment d'accéder aux bureaux pour tremper le doigt dans l'encre et accomplir leur devoir. Par contre, au sein de ce bureau, plusieurs citoyens n'ont pas accepté de faire passer les personnes âgées, en priorité. Sauf les handicapés. Et, le chef du centre n'a pas réussi à les convaincre. Ambiance festive à Borj Louzir Du côté de l'école Hédi Nouira, à Borj Louz, l'ambiance était plus que festive. L'école est située en face d'un complexe résidentiel, et du coup, les habitants étaient dehors, en groupe entre voisins, évoquant l'avenir du pays, l'importance du vote. Klaxons de voitures, drapeau national, hymne national étaient au rendez-vous. Une ambiance qui rappelle le jour de l'aïd, où tout le monde se salue, discute même sans se connaître. En pénétrant à l'intérieur de l'école, on a remarqué que les files d'attente étaient différentes d'un bureau à un autre. Devant certains, les files étaient longues, alors que devant d'autres, il n'y a presque personne. C'est le dispatching, nous explique-t-on, qui nous a été donné par l'Isie. Par ailleurs, au sein de ce même bureau, certains électeurs n'ont pas réussi à trouver leur nom inscrits sur les listes. Leila et son époux ont confié que depuis 7 heures du matin, on court entre les bureaux de vote de l'Ariana. Nous n'avons pas réussi à trouver nos noms et cela nous énerve. Car, on veut voter. L'assistant du chef du centre de vote était à la disposition de ceux qui n'ont pas trouvé leur nom. Mieux encore, il cherchait avec eux leur nom sur les listes accrochées au mur. A notre interrogation sur l'absence des noms, il a précisé que certains électeurs sont sur les registres mais n'ont pas procédé à une inscription volontaire, en juin dernier. En d'autres termes, certains ont voté en 2011, sans être inscrits volontairement. Par contre, pour Imed, il ne trouve pas son nom quoi qu'il se soit inscrit en 2011 et qu'il ait confirmé en 2014. Et il affirme qu'en ayant composé le service mis à la disposion des électeurs, par l'Isie, (*195*numéro de la CIN diez), il a reçu la confirmation. Néanmoins, en voulant refaire l'opération, dimanche, le réseau est saturé, et il était difficile d'avoir une réponse. Dans l'ensemble des bureaux de vote, la sécurité était bien assurée. Militaires et force de l'ordre n'ont épargné aucun effort pour sécuriser les bureaux et garantir un bon déroulement de l'opération de vote. A cela s'ajoutent les observateurs nationaux, de la société civile et les observateurs étrangers, qui sont venus suivre les élections tunisiennes, considérées comme l'exception du printemps arabe, du moment que la Tunisie est aujourd'hui à la dernière ligne droite vers la stabilité de ses institutions. La réussite de cette consultation législative permettra l'ancrage du processus démocratique dans le pays et garantira le passage du stade d'institutions provisoires à celui d'institutions durables. Rappelons que près de 5,3 millions d'électeurs sont inscrits sur les listes électorales, qui devraient se diriger vers les 33 circonscriptions afin d'élire à la proportionnelle 217 députés parmi les quelque 1.300 listes candidates.