Le premier tour de la présidentielle s'est joué dans un mouchoir de poche pour les deux protagonistes du second tour. Béji Caïd Essebsi, candidat de Nida Tounès, dépasse son dauphin, le président sortant Moncef Marzouki, de quelque 188 mille voix, soit 6,03% des voix. Ils totalisent tous les deux plus de 71% du vote exprimé pour les vingt-cinq candidats en lice Le premier tour de l'élection présidentielle a rendu son verdict. Les faits, les chiffres sont là et ils sont têtus. Place aux analyses, voire, pour les protagonistes et leurs séides les plus acharnés, aux états d'âme. Premier constat, le plein jeu démocratique a prévalu. Tout à l'honneur du pays, de l'Instance supérieure des élections et des associations et réseaux de la société civile à l'affût. Grâce encore et surtout aux forces de l'ordre et à l'armée nationale. Leur diligence a été exemplaire dans la garantie des attributs d'un scrutin transparent et régulier, malgré quelques écarts çà et là. Deuxième constat, le premier tour de la présidentielle s'est joué dans un mouchoir de poche pour les deux protagonistes du second tour. Béji Caïd Essebsi, candidat de Nida Tounès, dépasse son dauphin, le président sortant Moncef Marzouki, de quelque 188 mille voix, soit 6,03% des voix. Ils totalisent tous les deux plus de 71% du vote exprimé pour les vingt-cinq candidats en lice. Troisième constat, par-delà les performances des candidats passés au second tour, la véritable déroute électorale subie par d'autres sérieux candidats lors du premier tour interpelle à plus d'un titre. Pour Néjib Chebbi, Mustapha Ben Jaâfar, Kamel Morjane et Slim Riahi, plus que de revers, il s'agit bel et bien d'une hécatombe en bonne et due forme. Quatrième constat, le premier tour de la présidentielle a tout l'air d'un second tour des législatives du 26 octobre dernier. Les deux camps dominants ont réédité leur afflux à quelques milliers de voix près. Nida Tounès recueille 9.443 voix de plus que ce qu'il en a eu lors des élections législatives. De son côté, Moncef Marzouki recueille 10.619 voix de plus que les voies obtenues lors des législatives par la coalition Ennahdha-CPR-Courant démocratique, dont il est le représentant lors du premier tour de la présidentielle. En somme, les deux candidats ont fait du surplace. Cinquième constat, le jeu du report des voix sera plus opérationnel lors du second tour de la présidentielle prévu le 14, le 21 ou le 28 décembre prochain. Les trente pour cent du vote exprimé lors du premier tour seront dispatchés, même amoindris, entre les deux protagonistes. Déjà, la recherche des alliés et le racolage des voix battent leur plein dans les deux camps. Jusqu'ici, les intentions des alliés potentiels demeurent secrètes, voire à peine esquissées ou balbutiées. Mais les états-majors des deux parties ne s'acharnent pas moins pour organiser le ban et l'arrière-ban en vue de la bataille décisive. Cela porte précisément sur l'immense gisement des 255.529 voix obtenues au premier tour par Hamma Hammami (Front populaire), des 187.923 voix recueillies par Hechmi Hamdi (Mahabba), des 181.407 voix de Slim Riahi (UPL), des 41.614 voix de Kamel Morjane (Moubadara), des 35.025 voix de Néjib Chebbi (Al-Joumhouri) ou des 21.929 voix de Mustapha Ben Jaâfar (Ettakattol). Un gisement de plus de 723.000 voix, dont les deux protagonistes sont particulièrement friands en somme ! La démocratie, dans sa séquence élections, c'est aussi l'arithmétique des chiffres. Mais aussi et surtout les mathématiques des affinités électives des uns et des autres. Raison pour laquelle, dès hier en milieu de journée, les tractations de coulisses ont commencé à battre leur plein. Qui sera le futur heureux élu, jouissant de la magistrature suprême à Carthage ? L'affaire sera tranchée dans quelques semaines, certes. Mais déjà, se profile l'épineuse question de la prochaine coalition gouvernementale. Et tout porte à croire que le parti Nida Tounès s'apprête à monnayer le partage des portefeuilles ministériels en fonction du positionnement des uns et des autres au second tour de l'élection présidentielle. La démocratie s'apparenterait dès lors au jeu redoutable et pervers du donnant-donnant sur fond d'engagements gagnant-gagnant. D'ici là beaucoup d'eau aura coulé sous les ponts des alliances et des mésententes déclarées, secrètes ou sournoises. Et vive la démocratie.