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La reine du corail
Tabarka
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 01 - 2000

Ancien port romain ouvert sur la rive nord de la Méditerranée, Thabarca, de son nom ancien, a de tout temps suscité les convoitises. Tant d'événements et faits ont jalonné sa longue existence depuis les Romains jusqu'à nos jours. Tabarka est la ville où la Kahéna avait choisi de se suicider et faire son adieu à sa chère Berbérie qu'elle avait défendue de toute sa force de l'invasion arabe. Tabarka, c'est la ville du corail, de la montagne, de la forêt, mais aussi de la pêche et de la plage. Sauf que ces richesses demeurent encore sous-estimées et par là sous-exploitées !
Thabarca, cette ville dont le nom n'a pas été altéré par l'histoire, garde dans le tréfond de la mémoire collective de ses habitants, la grande épopée de cette reine berbère, la Kahéna qui combattit les armées arabes venues occuper et islamiser le pays. Cette vaillante guerrière s'y réfugia, et, refusant la défaite, s'y suicida, laissant derrière elle une des plus grandes légendes de ce pays.
Un pan entier de l'histoire de notre Berbérie s'était écrit dans cette petite cité romaine située entre la Kroumirie et les côtes coralliennes baignant le littoral de Tabarka et s'était éteint avec Al Kahéna, symbole encore vivace de ce qui a toujours été la femme dans ce pays.
Millénaire, la cité fut au départ un port construit par les Romains d'où ils exportaient le blé de Vaga, l'actuelle Béja, les fauves d'Ifrikya et le marbre de Chemtou.
Tabarka, de par sa situation géographique, présente une double caractéristique, celle d'une cité côtière et de montagne à la fois, avec tout ce que cela implique comme richesses des deux milieux totalement différents, mais qui ont donné à cette ville toute l'importance qu'elle a toujours eue à travers l'histoire et de nos jours. C'est sans doute sa raison d'être.
Tabarka, c'est la montagne et la mer à la fois. C'est aussi le bois, la bruyère, le liège, la pêche et le corail.
La cité, à l'instar de toutes les contrées du pays, connut une grande prospérité du temps des Romains, elle fut pour sa part gagnée par le christianisme. Les vestiges d'une basilique en attestent. Dans les environs, les traces d'une nécropole ont été découvertes.
Thabarca l'ancienne fut décrite par Pomponius Mela, écrivain latin originaire d'Espagne (1e s.), auteur d'une géographie (De situ orbis ou de chorographia). Juvenal la mentionne. Pendant l'invasion vandale, la ville ou ce qu'il en restait devint le refuge des moines fuyant les envahisseurs. A cette époque sombre de l'histoire de tout le pays, Thabarca ne fut pas épargnée, elle dépérit et l'arrière-pays tomba en ruine. Le passage des Arabes après la défaite de la Kahéna et sa disparition n'était pas pour aider à la résurrection de la cité qui sombra dans l'anonymat. Les quelques vestiges qui résistèrent à l'homme et au temps devinrent des refuges pour les quelques survivants des habitants de Thabarca qui disparut ou presque de la carte. Mais il n'en demeure pas moins que sa célébrité resta intacte grâce notamment à la richesse en corail de son littoral, qui attirait les Génois et les Pisans d'Italie.
Célèbre pour son corail
Le privilège de la pêche du corail fut pour un temps accordé aux Pisans avant que les Génois ne s'installent dans la ville pour y édifier le fort en leur nom qui existe encore. Avec la famille Courbelli, la pêche au corail qui se faisait de Tabarka jusqu'au golfe de Bône (actuelle Annaba), connut un grand essor. On parle de quarante frégates corallines affectées à la pêche de ce précieux matériau dont on fabrique de beaux bijoux jusqu'à nos jours. Mais la ville devait être enlevée aux Génois par Ali Bacha qui s'installa au pouvoir après avoir assassiné son oncle fondateur de la dynastie husseïnite. Le fort fut investi et les principaux dignitaires s'y trouvant furent capturés. Mais cette page de l'histoire du corail tant convoité ne fut point fermée, la cession de sa pêche fut donnée en 1781 à la compagnie royale d'Afrique. Et la cité jusque-là oubliée et ne vivant que sur son passé, de renaître de ses cendres jusqu'à la veille de l'occupation française.
Une nouvelle ville fut créée par les Français, sur le flanc de la montagne au pied de l'ancien fort génois. Elle fut construite sur les ruines de l'ancienne Thabarca romaine à partir de 1882. Les richesses de la forêt environnante et celles de son littoral étaient pour l'essentiel dans cet intérêt dont elle fut l'objet pour l'occupant français qui dota la ville de l'infrastructure nécessaire pour la relier au reste du pays.
Avec une vraie route allant de Béja jusqu'à la nouvelle cité en passant par Nefza (ancien Djebel Labiadh) et Ouechtata connue pour ses orangeraies et ses fraises sauvages. Un autre tracé routier l'avait reliée au village de Aïn Draham et jusqu'à Jendouba (ancien Souk El Arbaâ) en passant par Fernana à l'ouest. A l'est, outre la route menant vers Sejnène, un axe ferroviaire la reliait avec la capitale en passant par Mateur. C'était l'âge d'or de Tabarka qui devint ainsi un lieu de villégiature pour les Français et fortunés autochtones des plaines céréalières de Jendouba, du Kef et de Béja. Un boom immobilier accompagna cette renaissance avec de nouvelles constructions longeant la plage du bas de la ville par son entrée sud jusqu'au port de pêche, lui-même reconstruit et remis sur pied après des siècles d'oubli. Des magasins et des commerces modernes virent le jour, avec des restaurants spécialisés en poissons et fruits de mer. A Tabarka, du côté de l'Hôtel de France, on déguste les meilleures langoustes et crevettes du pays sans parler des autres espèces de poissons dont la serre de fond qu'on ne retrouve nulle part ailleurs.
Aux côtés de ces activités citadines, bien d'autres ont vu le jour ou ont été ressuscitées avec l'essor qu'avait connu la pêche au corail et l'exploitation des richesses de la forêt. Un embryon d'industrie est ainsi né à Tabarka donnant à la cité l'allure d'une ville prospère.
La forêt et le corail
Le corail, dont la majeure quantité était exportée vers l'Europe, était un matériau à partir duquel on fabriquait de très beaux bijoux. Et jusqu'à nos jours, certaines boutiques de la ville exposent dans leurs vitrines ces bijoux, survivances des temps anciens et dont les touristes raffolent.
La bruyère, cette racine à partir de laquelle on fabrique de très belles pipes aux formes variées, constitue l'une des richesses de la forêt des montagnes environnantes. Du 1er octobre au 31 mai, des familles entières travaillaient en forêt à l'extraction de cette racine tant recherchée pour sa qualité unique, qui sert pour les embouchons des pipes.
Une autre activité vit aussi le jour à cette époque, celle du bois et dérivés. La forêt dense de la Kroumirie, avec ses pins d'Alep, ses pins maritimes au bois noble, ses chênes-lièges représente une richesse inestimable pour la région.
Le bois, dont on fait plusieurs usages, est découpé et stéré à Tabarka sur la route en allant vers Aïn Draham, avant d'être transporté vers l'intérieur du pays.
Le commerce du liège était aussi florissant, à Tabarka où se trouve une bouchonnerie.
C'est dire que cette ville, à l'histoire riche, et en dépit de quelques éclipses, est demeurée dynamique pour se tailler une place de choix dans cette région du nord-ouest.
Avec l'Indépendance, Tabarka a sans doute fait l'exception par rapport aux autres villes de la région en matière de développement. Deux hôtels virent le jour dans les années 1960-1970. Les Mimosas à l'entrée de la ville et le Club Al Morjène (le Club du corail) sur la plage côté est. Un grand festival, celui du corail, donnait à Tabarka une allure de fête totale pendant ses nuits estivales. Tous les grands de la chanson arabe sont passés par ce festival dont la renommée dépassait et de loin celle de Carthage, Abdelhalim Hafedh, Warda Al Jazaïria, Fahd Ballène, Mohamed Kendil, entre autres, et les monologistes les plus célèbres d'Egypte, Ismaïl Yassine et Abdessalem Enabolsi. Tous sont passés par ce festival qui drainait les amateurs de la chanson arabe de toute la Tunisie. Aujourd'hui, de ce festival, il ne reste que les souvenirs et la nostalgie de ceux qui l'avaient connu.
Les temps ont changé pour Tabarka en dépit de tout ce qu'on avait fait pour qu'elle occupe la place qui lui revient de droit sur le plan de l'activité touristique dans le pays. De nouveaux hôtels ont vu le jour, des résidences de luxe longent le rivage, un terrain de golf et un aérodrome furent construits, une Marina est née du côté du port. Mais rien n'y fit, le tourisme ne décolle pas. Il bat de l'aile au point que l'un des plus grands investisseurs dans le secteur s'est vu contraint de mettre ses hôtels à la vente. Grand dommage ! Car, pour cette ville, tout est biaisé dès le départ. Le tourisme qu'on a voulu y développer ne cadre pas avec ses spécificités géographiques et sa situation par rapport à son environnement proche. Rien n'a été fait pour développer un tourisme de montagne, un tourisme de chasse, un tourisme culturel qui associent à Tabarka, les sites historiques et les villes de la région du nord-ouest. Toute cette richesse a été complètement ignorée, et le résultat est là. Car le tourisme à Tabarka ne peut être calqué sur celui de Sousse ou de Hammamet ou même Djerba. Un autre tourisme est à développer dans cette région qui pourra devenir un vrai pôle d'attraction pour les visiteurs qu'ils soient tunisiens ou étrangers, non seulement pour ses aiguilles façonnées par la mer.
Aussi, ne faudrait-il pas songer à réhabiliter la voie ferrée, fermée depuis des années, pour encourager les amateurs des montagnes et de la forêt à prendre le train pour effectuer des traversées qu'ils n'oublieront jamais, de par le paysage qu'ils auront à traverser avec les Mogod trônant de toute leur splendeur sur la plaine des environs?
Bien des idées sont à creuser pour redonner de l'espoir à une région qui ne manque pas d'atouts.


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