Entre la Tunisie et la Sicile, les vestiges d'un passé commun reprennent forme. Après trois années de collaboration tuniso-italienne, le projet de sauvegarde et de mise en valeur de l'architecture domestique punique, hellénistique et romaine Aper a été clôturé au cours d'une conférence tenue en fin de semaine dernière. Entre la Tunisie et l'Italie, ce patrimoine est un héritage commun. Les responsables du projet qui ont pris la parole pendant la conférence n'ont pas manqué de le rappeler avant d'exposer les détails, les résultats et les perspectives du projet. Volets et étapes du projet Aper est un projet financé par des fonds de l'Union européenne, dans le cadre du Programme de coopération transfrontalière Italie-Tunisie. Les parties prenantes du projet — l'Université de Palerme, l'Université de la province d'Agrigente, l'Institut national du patrimoine et l'Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle — l'ont conçu afin d'illustrer le « chevauchement des cultures en territoire sicilien et tunisien». Pour ce faire, ils ont choisi des sites archéologiques témoins d'une architecture domestique punique, hellénistique et romaine aux traits communs des deux régions. Le quartier hellénistique-romain d'Agrigente en Italie, les sites de Kerkouane et d'Utique en Tunisie sont des sites imprenables, mais qui ne jouissent pas d'une grande visibilité touristique et culturelle. Cette visibilité passe par une sauvegarde et une mise en valeur des sites sélectionnés. C'est ici que se manifeste l'originalité du projet. En effet, trois maisons, une dans chaque site, ont été étudiées afin d'en proposer un modèle numérique de restitution, de l'intérieur comme de l'extérieur. Ces modèles ont été mis sur des supports rigides, ainsi que sur tablettes et smartphones, accessibles sur les sites respectifs. « Ces moyens offrent la possibilité à un large public de comparer l'état actuel et l'état antique des maisons. Ces applications contribuent à l'augmentation de leur attractivité et de leur compétitivité », explique le dossier de presse. Les modèles de restitution sont également l'œuvre d'une collaboration tuniso-italienne, puisqu'ils sont été réalisés par 10 jeunes architectes, 5 de chaque pays. Ces architectes ont été initiés à la recherche dans le domaine de l'architecture domestique hellénistique, punique et romaine. « Les architectes ont établi un diagnostic de l'état de conservation des trois sites, de leur accessibilité et de la protection des zones fragiles. Ils ont établi un plan de maintenance pour chaque site, en fonction des moyens financiers alloués et des ressources humaines disponibles », nous explique-t-on encore. La formation qu'ils ont reçue a été renforcée par deux ateliers, l'un à Agrigente et l'autre à Tunis, qui ont porté sur la conservation mais aussi la valorisation de ce patrimoine. Promotion du tourisme culturel Quels impacts peut avoir cette action sur les trois sites d'Agrigente, de Kerkouane et d'Utique? En plus des modèles de restitution, le public peut découvrir ces sites autrement, à travers des itinéraires qu'il peut suivre sur place, découvrant ainsi les spécificités de l'architecture domestique de l'époque. Trois brochures éditées dans le cadre d'Aper, une pour chaque site, peuvent les aider à joindre l'utile à l'agréable dans leurs visites. Pour accroître la visibilité des sites d'Utique et de Kerkouane, l'Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle a organisé des journées de sensibilisation à l'intention des communautés locales, des associations et des agences de voyages. L'affluence des visiteurs pourra en effet créer une dynamique économique à l'échelle de ces sites. Outre le volet scientifique du projet, Aper ouvre la voie pour la valorisation de ces sites. Chose qui se concrétisera si la volonté politique suit, avec des actions en faveur de la promotion du tourisme culturel, « facteur de développement économique et social dans une perspective solidaire et durable », souligne le dossier du projet. Pendant la conférence, la présentation des résultats du projet a été suivie d'une table ronde sur la coopération culturelle en Méditérrannée, afin que cette expérience se multiplie dans le futur.