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La Haica, garante de la pluralité des médias
La liberté d'expression, un acquis de la révolution
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 01 - 2000

La liberté d'expression est le plus précieux cadeau de la révolution. Pour le préserver, tout un processus a été enclenché dans le secteur de l'information et des médias qui a abouti à la promulgation des décrets-lois 115 et 116 le 2 novembre 2011. La Haica, instance constitutionnelle, a été créée, comme le stipule le décret-loi 116, afin de réguler le secteur de l'audiovisuel dans le but de garantir la pluralité médiatique ainsi que la liberté d'information et d'expression. Retour sur les objectifs, la spécificité et le devenir de la Haica
L'un des principaux acquis de la révolution est, indéniablement, la liberté d'information et d'expression. Au lendemain du 14 janvier 2011, les langues se sont déliées et la parole s'est libérée aussi bien dans la rue que dans les sphères politiques et médiatiques.
Du coup, des dizaines de partis se sont formés, les journaux ont proliféré et les médias audiovisuels se sont lâchés dans une sorte de concurrence anarchique à telle enseigne que parfois la propagande politique a supplanté la vraie information libre et indépendante.
Entre la tendance hégémonique et propagandiste de certains médias et les pressions subies au nom des idéologies ou au nom des pouvoirs politiques, ou encore au nom du sacré, les journalistes étaient pris en étau. Que faire, justement, pour protéger la liberté de l'information et d'expression dans les médias ? Comment éviter les dépassements, les infractions, le journalisme partisan de propagande où l'argent fait la loi ? Comment éviter le monopole et l'hégémonie médiatiques ?
Au lendemain de la révolution des journalistes militants et indépendants, des activistes des droits de l'Homme et de la société civile, des représentants du secteur de l'information connus pour leur intégrité et leur respect de la profession de journaliste et des juristes y ont réfléchi au sein de la Haute instance de la réalisation des objectifs de la révolution. C'est ainsi qu'un organisme consultatif a vu le jour en février 2011 : l'Inric (Instance pour la réforme de l'information et de la communication). Il a été présidé par le journaliste indépendant Kamel Labidi. Malgré les réticences et les campagnes de dénigrement des barons de la presse écrite et audiovisuelle et autres groupes de pression et d'intérêts, l'Inric a réussi à élaborer en étroite collaboration avec le comité juridique, initié par la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, les décrets-lois 115 et 116 organisant le secteur de l'information selon des standards internationaux. Cela afin de protéger et de garantir la liberté d'expression et l'indépendance des médias. Ces projets de loi ont été approuvés par la Haute instance et soumis au gouvernement transitoire de Béji Caïd Essebsi et au président transitoire Foued Mebazaâ. Publiés le 2 novembre 2011 dans le Journal officiel, ces décrets-loi n'ont été appliqués et activés qu'une année après, soit en novembre 2012, étant donné les réticences et tergiversations du gouvernement de la Troïka, sous Hamadi Jebali. Il a fallu pour cela que l'Inric s'autosaborde et démissionne en juillet 2012 tout en tirant la sonnette d'alarme sur les menaces qui pèsent sur la liberté d'information et d'expression. Le soutien de la société civile et du syndicat national des journalistes tunisiens, qui a lancé deux grèves en 2011 et 2012, a contribué à l'application quoique tardive, des deux décrets-lois.,
Tension
Ainsi, l'Inric a œuvré à ancrer un paysage audiovisuel pluraliste dans le but d'enraciner la démocratie et de rompre avec le monopole, notamment dans le domaine audiovisuel, en recommandant, en juin 2011, au gouvernement de Béji Caïd Essebsi l'attribution de licences de diffusion à 12 radios privées et associatives et à 5 télévisions privées.
Bref, si le décret 115, qui concerne la presse écrite, n'est que partiellement appliqué, après sa publication dans le Jort, le décret 116 est, lui, appliqué depuis plus de deux ans. Mais la Haica (Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle), instance constitutionnelle créée par le décret-loi 116 du 2 novembre 2011, n'a été mise en place que le 3 mai 2013. Elle a pour objectif «de réguler le secteur de l'audiovisuel, de garantir la liberté de communication, la qualité de l'information, l'exercice de la liberté d'expression, le pluralisme médiatique et le respect des règles éthiques et déontologiques du métier».
Présidée par l'enseignant et universitaire Nouri Lajmi, la Haica a été appréhendée comme une instance de coercition et un organe contraignant notamment par certaines chaînes de télé privées. A preuve, certains dirigeants de médias refusent encore de signer les cahiers des charges alors que d'autres rejettent carrément les décisions et sanctions de la Haica. En atteste la fameuse séquence où l'on voit un animateur de la chaîne Ezzitouna, de surcroît avocat donc homme de loi, déchirer l'avis de sanction, une amende de 50.000 D, devant nos yeux ahuris. Comment accepter qu'une chaîne qui diffuse sans autorisation, ni licence, se comporte de cette manière illégale à l'égard d'une instance constitutionnelle ? Tout le monde a vu mais personne n'a réagi.
Stratégie
Mais il arrive aussi que la Haica suscite de vives réactions aussi bien des médias, des journalistes que de l'opinion publique concernant certaines de ses décisions. La dernière en date concerne son communiqué en rapport avec la diffusion des aveux des terroristes qui ont égorgé le jeune agent de l'ordre Mohamed Ali Charaâbi à El Fahs et le commentaire du porte-parole du ministère de l'Intérieur Mohamed Ali Laroui, les ayant qualifié de ‘‘terroristes''. Or, franchement, il faut appeler un chat un chat. Et l'on ne voit pas où réside le dépassement. Quoique Hichem Snoussi, membre de la Haica, a affirmé que l'avertissement n'a pas trait au terme ‘‘terroristes'', mais il estime, en gros, «que le porte-parole a outrepassé les limites de sa fonction en s'érigeant en juge et partie».
Nous n'avons pas manqué, par ailleurs, de poser la question à l'une des membres de la Haica, en l'occurrence Mme Rachida Neïfer, concernant cette dimension coercitive reprochée à l'instance et déplorée par certains dirigeants et acteurs des médias qui estiment qu'elle ne favorise pas la liberté d'expression.
La réponse est sans détour : «Il faudrait tout d'abord évaluer l'apport de la Haica depuis sa mise en place le 3 mai 2013 pour tirer par la suite les conclusions et savoir exactement si la Haica a renforcé la liberté ou a développé des moyens de coercition. Au contraire la stratégie mise en place par la Haica a été de défendre la liberté d'expression en favorisant le pluralisme car il ne saurait y avoir de liberté sans une pluralité des médias et sans son respect par chaque média». Concernant la pluralité des médias, elle ajoute que «la Haica considère qu'aucune régulation n'est possible sans l'existence de nouveaux médias audiovisuels qu'ils soient privés ou associatifs. Ces deux catégories de médias doivent établir entre eux une compétition saine et loyale de nature à favoriser la diversité du paysage audiovisuel sans oublier la réforme des médias publics qui devraient jouer inévitablement le rôle de locomotive tirant vers une information de service public de qualité».
Concernant le respect de la pluralité par tous les médias, notre interlocutrice explique que «l'expérience du monitoring électoral à l'occasion des législatives et de la présidentielle a été le déclencheur d'une réflexion et d'une concertation communes avec les décideurs et les différents directeurs de rédaction en vue d'asseoir les fondements d'une neutralité journalistique qui rompt avec la soumission aveugle comme du temps de l'ancien régime, mais qui s'élève aussi au-dessus de toute pratique démagogique, voire anarchique de la liberté».
Et d'ajouter : «Donc, si on conjugue les deux axes de cette stratégie, nous pouvons affirmer que la Haica a jusqu'ici essayé d'organiser la liberté d'information et d'expression tout en refusant, de façon catégorique, de s'ériger en censeur et encore moins de jouer le rôle d'un ministère de l'Information».
Et de prendre en exemple les multiples décisions de la Haica en faveur de la liberté et le bras de fer engagé avec l'Isie à propos de la diffusion des sondages sortie des urnes lors de l'élection présidentielle par les médias audiovisuels. «Lequel bras de fer, précise-t-elle, continue devant le tribunal administratif, or la Haica est déterminée à faire prévaloir la liberté d'expression en la matière et surtout à amener le juge à trouver un juste équilibre entre la liberté d'informer et le libre choix des électeurs d'être informés. Car réguler n'est pas user d'un bâton, mais disposer d'une balance qui permet d'assurer l'équilibre entre les différentes libertés en jeu».
Question de temps
Tout est question d'équilibre mais aussi de temps car pour Hichem Snoussi «la tension entre l'Instance et certains médias est en train de s'estomper au fil des mois. L'important c'est d'œuvrer à la réforme des médias en pratiquant la régulation dans le secteur de l'audiovisuel et l'autorégulation dans celui de la presse écrite.
Or, un environnement plus harmonieux au plan de la législation, de la volonté politique et des acteurs des médias, entre journalistes et dirigeants, rendrait plus facile le travail de l'instance».
Mais malgré tout, l'intervenant estime que le bilan de la Haica est positif puisque le paysage politique audiovisuel englobe aujourd'hui 35 radios et télés publiques et privées, alors que d'autres, licences de diffusion seront octroyées février 2015.
En outre, la Haica possède maintenant un service monitoring et a élaboré des cahiers des charges, cela sans compter l'avis conforme de la Haica avec la participation des acteurs médiatiques et de la société civile pour la nomination des directeurs et responsables des médias publics.
Maintenant, quel sera le devenir de la Haica qui deviendra l'ACA (Autorité de communication audiovisuelle). L'indépendance de cette instance sera-t-elle garantie ? Quels seront les nouveaux critères pour la désignation de ces nouveaux membres ? Pour répondre à ces questions nous avons donné la parole à Kamel Labidi, ancien président de l'Inric : «J'ai des craintes concernant la nouvelle ACA, car il y a des résistances à la régulation du secteur de l'audiovisuel de la part d'un groupe de pression qui fait obstruction à la mission d'une instance indépendante.
Le problème c'est que la nouvelle Constitution prévoit la désignation des membres de l'ACA, or il ne faudrait pas qu'elle soit moins indépendante que la Haica. Le risque est de voir les formations politiques représentées en son sein car le choix des futurs membres de la nouvelle instance aura lieu à l'ARP (Assemblée des représentants du peuple). Il est donc nécessaire que les nouveaux critères pour le choix des membres de l'ACA privilégient la compétence et l'indépendance.
Il faudrait que le gouvernement, l'ARP, les acteurs des médias et la société civile prennent conscience de la nécessité d'un texte de loi qui réglemente la désignation des membres de l'ACA. Il faudrait résister aux pressions comme cela a été le cas concernant les décrets-lois 115 et 116 quand les patrons de chaînes qui ont cohabité avec le régime de Ben Ali les ont qualifiés de «liberticides» comme si la liberté d'expression était leur premier souci du temps de Ben Ali où régnaient le monopole et le profit sans aucun cahier des charges.
Le risque c'est de voir les partis politiques glisser vers le soutien aveugle des patrons des chaînes audiovisuelles commerciales car, lors du différend entre Nessma-TV et la Haica, Nida Tounès, Ennahdha et même le Front populaire nous ont donné l'impression de soutenir la chaîne privée qui a fait peu cas du texte de loi 116 et des cahiers des charges.
Quand, par ailleurs, Ezzitouna-TV continue à diffuser sans licence et qu'elle détruit publiquement un avis officiel de la Haica sans réaction des partis politiques, de la justice et de l'opinion publique, on ne peut qu'avoir des craintes. Il faudrait que la prochaine ACA soit forte ainsi que les médias publics qui, normalement, n'ont pas de calcul commercial et propagandiste. Ce n'est qu'en renforçant les médias publics que le secteur audiovisuel pourra s'améliorer. Aux médias publics de jouer leur rôle de locomotive comme dans tous les pays démocratiques».
«Ne pas rater une occasion historique»
La future ACA aura, donc, un rôle de régulation à l'instar de la Haica afin de garantir la liberté d'information et d'expression et un équilibre dans le secteur entre la liberté des uns et des autres. Et il ne s'agit pas, comme l'affirme Mme Rachida Neifer, de «privilégier une liberté sur d'autres, car, selon elle, l'équilibre entre différentes libertés est une quête continue de la Haica, et, normalement, de la future ACA, car percevoir la liberté d'expression comme une querelle entre les patrons des médias et la Haica c'est rater une occasion historique que le peuple tunisien a, lors du 14 janvier, offert aux citoyens et qui consiste dans la levée de la mainmise du pouvoir politique sur la liberté d'information et d'expression. C'est pourquoi la nouvelle loi organique prévue par la Constitution pour organiser la régulation de l'audiovisuel, à l'avenir, devrait être un prolongement des acquis consacrés par le décret-loi 116 et un renforcement de l'ACA et des mécanismes de régulation en donnant à la nouvelle instance davantage de prérogatives en matière de régulation. Car si l'ACA ne bénéficiera pas de prérogatives réelles cela représenterait un retour des acquis du décret-loi 116 d'autant que le vrai danger n'est autre que l'argent politique.
Il faudrait donc garantir la transparence et l'indépendance des médias par la régulation dans le domaine de l'audiovisuel et l'autorégulation dans le secteur de la presse écrite».
A suivre donc...


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