Quoique le capital risque constitue une opportunité de financement des PME, les entreprises continuent à recourir au secteur bancaire. Pourtant, opter pour le capital investissement est de nature à booster l'investissement en apportant des fonds propres et en réduisant l'endettement des entreprises. L'activité de l'ensemble de l'économie tunisienne demeure essentiellement concentrée sur le secteur bancaire. Les PME ont plus recours à un financement par endettement qu'à un financement par capital risque. Et pourtant, d'autres canaux de financement, moins chers, moins exigeants et moins compliqués existent mais demeurent très peu exploités par les PME. En effet, Khaled Zribi, président du Conseil de la Bourse de Tunis, a précisé, à l'occasion d'une table ronde, organisée par la Chambre tuniso-française de Commerce et d'industrie (Ctrfi) et l'Association tunisienne de l'investissement en capital (Atic), que le capital risque ne représente qu'à peine 1% du financement des PME, contre 7%, pour la Bourse. Quant à la majorité du financement, il est assuré par l'endettement, soit par le recours aux crédits bancaires. Pourtant, ajoute Khaled Zribi, outre le capital risque, le marché alternatif de la Bourse présente des opportunités et un potentiel intéressant mais qui demeurent non exploités. D'ailleurs, l'objectif de la table ronde est justement de booster l'investissement en alimentant les fonds propres, sans alourdir l'endettement de l'entreprise, d'assurer un meilleur accès au financement pour les PME et d'identifier les difficultés inhérentes au recours au capital risque. Un moyen qui a assuré en 2013 le financement de 230 PME pour une enveloppe de l'ordre de 260 MD, soit un taux de pénétration de 0,3%. Ce qui est très faible comparé à d'autres pays. Une faiblesse confirmée par le président de l'Association tunisienne des investisseurs en capital qui a indiqué que la contribution des sociétés d'investissement à capital-risque (Sicar) et des Fonds communs de placement à risque (Fcpr) au financement des entreprises a, au cours des dernières années, baissé, en moyenne, entre 25 à 30%. Une régression qu'il explique notamment par le tarissement des viviers de «bons projets» à financer certes, mais aussi en raison d'une perception négative des uns et des autres. L'enquête réalisée par l'Institut d'économie quantitative (IEQ) confirme cette tendance. En effet, l'enquête qui a concerné 1.100 PME et une trentaine de sociétés à capital risque laisse apparaître que 8% uniquement des chefs d'entreprise ont eu recours à l'activité du capital risque. Par ailleurs, 43% des chefs d'entreprise interrogés évoquent la difficulté et le manque de clarté du cadre réglementaire. Quant aux Sicar, 35% des responsables concernés par l'enquête évoquent la difficulté des mécanismes de sortie. D'un autre côté, 55% des 36 entreprises à capital risque ont évoqué le manque de qualité d'entrepreneurs qui maîtrisent leur projet. Sans compter que 50% trouvent qu'il y a un manque de compréhension de part et d'autre et 46% estiment que les conditions de sortie sont contraignantes. Un cadre légal contraignant Depuis 1996, date de création des Sicar, l'accent a été mis sur la création d'entreprises, marginalisant ainsi la fin du cycle de vie de l'entreprise. «Il ne faut marginaliser aucune phase du cycle de vie de l'entreprise, il faut faire de telle sorte que l'entreprise puisse accéder au financement à chaque étape de son cycle de vie», a indiqué le président de l'Atic. Et d'ajouter que le capital investissement doit couvrir toute la chaîne de financement de l'entreprise allant du capital risque qui finance la création de l'entreprise au capital développement (entreprise en croissance), au capital transmission jusqu'au capital retournement (financer le redressement des entreprises en difficulté). D'un autre côté, les responsables des sociétés à capital risque ont précisé que les PME perçoivent mal le capital risque et pour cause. Car, contrairement à la banque qui est juste un bailleur de fonds cherchant le ratio de service de la dette et le principal, en exigeant des garanties réelles, l'approche du capital risque est différente. En effet, il n'exige pas de garanties mais il est plus regardant de l'équipe, des règles de bonne gouvernance et de transparence. Car, en définitive, le capital risque est un partenaire financier qui court les mêmes risques que l'entrepreneur. En tant que capital investissement ou private equity, ils sont plus regardants de l'équipe qui travaille sur le projet, des opportunités qu'il offre et des mécanismes de sortie. Car le private equity est une activité financière consistant pour un investisseur financier à entrer dans le capital d'entreprises innovantes en forte croissance, généralement non cotées, en vue de réaliser des plus-values à terme à sa sortie. Le cycle de vie d'un fonds de private equity est de 10 ans en moyenne, dont 5 ans d'investissement et 5 ans de désinvestissement. Il estime également que la baisse des libérations en capital des Sicar est due à la lenteur des procédures administratives avec pour corollaire une augmentation du délai entre l'approbation du financement du projet et la libération effective du capital par l'investisseur financier. Sans compter que le capital investissement est sans garantie; sans intérêt, et avec un délai de grâce pour le rachat d'actions largement suffisant pour que l'entreprise puisse atteindre l'objectif escompté. Et par ces temps qui courent où le crédit est moins facile, d'autant plus que les banques se recapitalisent et où le marché se professionnalise de plus en plus, le recours au capital risque serait plus fréquent. Il suffit juste d'améliorer la perception des deux partenaires, de modifier le cadre légal pour les souscripteurs aux capitaux à risque n'ayant pas uniquement d'objectif le dégrèvement fiscal, car cela brouille l'image du private equity.