La Tunisie ne semble pas avoir tiré profit de la chute des prix du pétrole. Aucune amélioration n'a été enregistrée au niveau du déficit budgétaire, dont plus de 50% est généré par le déficit énergétique. En effet, la facture énergétique du pays est aujourd'hui encore «trop salée». Une situation que le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT) n'arrive pas à expliquer. Pis, il n'a pour le moment aucun élément de réponse Au regard du dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI), intitulé, «Perspectives économiques et régionales du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord », présenté jeudi soir, à l'auditorium de la Banque centrale de Tunisie (BCT), la Tunisie pourrait gagner 2 points dans le PIB, suite à la chute des prix du pétrole. Elle pourrait aussi générer des gains au niveau de la balance extérieure. Sans compter l'impact positif, au niveau budgétaire, qui se traduirait à travers la réduction de la subvention énergétique (0.9%). Le rapport fait état de gains intéressants pour la Tunisie, que ce soit au niveau de la croissance, de l'inflation, du déficit global et des réserves brutes à fin 2015. Or, Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale (BCT), a déclaré, à l'occasion de la présentation du rapport du FMI, que la facture énergétique est très élevée et qu'elle constitue la matrice du déficit tunisien, avec environ 60%. Un phénomène que le gouverneur de la BCT n'arrive pas à expliquer. «Le phénomène de facture énergétique «trop salée» est un phénomène de consommation de volume que le taux de croissance n'explique pas». Un phénomène inquiétant, a-t-il ajouté, que nous n'arrivons pas à expliquer. De ce fait, il faudrait engager un full audit énergétique d'urgence. Car on n'arrive pas à comprendre comment la facture ne cesse d'augmenter, alors que les prix du pétrole ont baissé de 50% depuis septembre 2014. Néanmoins, selon le dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI), intitulé, «perspectives économiques et régionales du Moyen Orient et de l'Afrique du Nord», la chute des prix du pétrole a des répercussions positives majeures pour les pays importateurs. Par contre, pour les pays exportateurs de pétrole, le choix est négatif. En effet, si pour le premier, cette chute à des niveaux exceptionnels permet de réduire, entre autres, la facture d'importation énergétique, les coûts des subventions énergétiques et contribue à l'amélioration de la position extérieure et budgétaire pour les seconds, les répercussions ne sont pas autant reluisantes. Au regard du rapport du FMI, présenté par Giorgia Albertin, représentante résidente pour la Tunisie, la chute des prix du pétrole se traduisent par une «perte des revenues d'exportation et budgétaires». Et d'ajouter qu'à court terme, les dépenses publiques pourront être maintenues grâce aux marges de manœuvre en limitant l'impact négatif sur la croissance dans plusieurs pays exportateurs de pétrole». En d'autres termes, précise la représentante résidente pour la Tunisie, à court terme, la plupart des pays peuvent utiliser les marges disponibles pour préserver les dépenses publiques, ce qui va atténuer l'impact sur la croissance (hors pétrole). Car, comme elle a expliqué, la croissance réelle dans les pays exportateurs de pétrole atteindrait 3%, en 2015, soit une révision à la baisse de 1%. Force est de constater que la chute des prix du pétrole, qualifiée d'assez exceptionnelle de par le monde, a conduit le FMI à réviser son rapport «Perspectives économiques régionales du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord» en moins de trois mois. Une chute qui a atteint 55% depuis septembre 2014. Il s'agit là du développement le plus important, qui serait désormais accompagné par une croissance mondiale des plus faibles. Aussi, le rapport du FMI fait-il état d'une révision à la baisse de la croissance mondiale. Elle se situerait, pour 2015, autour de 3.5%, soit une révision à la baisse de 0.3%. Il va sans dire que les révisions sont à des degrés différents d'un pays à un autre. Aussi, la zone euro maintiendrait son taux de croissance à 1.9%, avec une révision à la baisse de l'ordre de -0.2%, le taux de croissance de la Chine serait autour de 6.8%, soit une baisse de -0.3%. Quant à la Russie, elle serait en récession avec une croissance négative de -3.5%. La projection de la croissance pour les pays importateurs de pétrole de la région Moanap, elle, reste inchangée, soit 3.9% en 2015. Cela étant dit, le rapport souligne que l'impact des cours mondiaux sur les prix intérieurs des carburants reste faible dans plusieurs pays, ce qui limite l'impact positif sur les revenus disponibles et sur les coûts des entreprises. D'un autre côté, les effets positifs de la chute des cours du pétrole sur la croissance seront compensés par des chocs négatifs, soit la détérioration des perspectives de la zone euro, la baisse des prix des matières premières ainsi que des retards dans la mise en place des reformes. Certes, beaucoup d'incertitudes persistent, souligne Giorgia Albertin. Selon les données des marchés, les projections estiment que le pétrole ne serait plus, dorénavant, aussi cher même si les prix auraient tendance à évoluer. Ils se situeraient, toujours selon le rapport du FMI, aux alentours de 70 dollars le baril en 2019. «Il y a des composantes permanentes de plus de risque à la baisse qu'à la hausse, à moins qu'il y ait des changements géopolitiques, indique Mme Albertin. L'essentiel, souligne Chedly Ayari, c'est qu'il y a une tendance vers la baisse des prix de l'énergie. Ce qui constitue, à son sens, un tournant important. Nous allons vers une culture d'une énergie moins chère sauf accident géopolitique majeur. Cependant, cette situation présente un retour de manivelle. En effet, si les prix continuent à baisser, les investissements dans le secteur énergétique baisseront également. Dans ce contexte, le gouverneur a indiqué qu'environ un trillion de dollars d'investissement seront remis en cause. Par ailleurs, plus les prix du pétrole baissent, plus l'investissement dans le gaz de schiste n'est pas rentable».