Décidément, il faut être Houcine Laâbidi pour tenir bon et tenir tête. A qui ? A l'Etat. Et hier, cheikh Houcine nous le redit du haut de la tribune de prêche du vendredi : «J'y suis! Advienne que pourra !» Malgré le récent jugement en référé à son encontre. Détails. Le scandaleux feuilleton très mal vécu, depuis la sainte révolution, ne semble pas à ses derniers épisodes. Et la bataille administrative entre Houcine Laâbidi, l'imam rebelle, devait, comme on le sait, céder le pas à la bataille juridique. Le jugement en référé prononcé mardi dernier, nonobstant son caractère exécutoire dans les vingt-quatre heures qui suivaient sa proclamation, n'a pas pour autant amené l'imam malgré tout à jeter du lest. Puisqu'il n'a pas manqué ce vendredi à dire à ses fans et sympathisants : «Coucou me revoilà ! J'y suis ! J'y reste! «Il devait accaparer la tribune de prêche pendant près de deux heures (temps record déconseillé par notre charia). Heureusement que dans son discours, il a haussé le ton et tenu un langage virulent contre les terroristes, qualifiés d'ennemis de l'Islam. Ne pouvant se hasarder à dire le contraire au moment où ses jours et ses vendredis seraient comptés en tant que chef suprême d'un Etat à la Médina au sein de l'Etat ! A préciser que cheikh Houcine Laâbidi a interjeté appel contre le verdict prononcé en référé à son encontre. De leur côté, les autorités publiques, c'est-à-dire le ministère des Affaires religieuses, se sont contentées de notifier au récalcitrant l'énoncé de la sentence par acte d'huissier, le sommant d'évacuer sans délai la mosquée de la Zitouna. Pas de commentaire ! Pour notre part, nous avons cherché à en savoir plus sur ce dossier complexe (qui a donné du fil à retordre à plus d'un gouvernement) en approchant le cabinet de cheikh Othmane Battikh, ministre des Affaires religieuse, mais il semble que le mot d'ordre a été donné : motus et bouche cousue ! Aucun commentaire à faire à la presse au sujet d'une affaire devenue aujourd'hui du ressort exclusif de la justice. Cependant, l'on a apprend de source digne de foi que le pouvoir public tient à résoudre le problème par la douceur et sans recours aux procédés musclés et l'exécution du verdict manu militari. Craignant les fâcheux revers d'une éventuelle opération coup de poing. Surtout que la conjoncture politique et sécuritaire du pays est loin d'être au beau fixe et n'autorise par conséquent aucune aventure de ce genre. Une source d'embarras La même source nous révèle que la crise que traverse la mosquée de la Zitouna depuis déjà quatre an n'a cessé de gêner et d'embarrasser les dirigeants de notre pays vis-à-vis des chefs d'Etat et éminentes personnalités étrangères et musulmanes exprimant le désir parfois ardent de visiter l'un des plus prestigieux temples islamiques. Pour sauver la face et la bonne renommée de ces lieux sacrés, l'on a toujours trouvé le moyen correct et élégant de s'esquiver, empêcher de telles visites et éviter d'éventuels spectacles scandaleux et pouvant choquer les visiteurs étrangers. Une générosité dans le noir Pour sa part, le conseiller rapporteur en chef au contentieux de l'Etat, chargé de défendre le dossier en question nous révèle que des aberrations inouïes sont en train de se produire dans la mosquée de la Zitouna où cheikh Houcine Laâbidi se démène comme maître absolu, faisant fi de la loi et des us et coutumes les plus élémentaires. Selon notre interlocuteur, la partie adverse s'est constamment permise de procéder à la collecte de sommes vertigineuses d'une manière anarchique et sans le moindre contrôle de leur gestion. Vrai ou faux ? Interrogé sur la teneur des allégations de Houcine Laâbidi selon lesquelles il prétend détenir un dossier de corruption accablant certains anciens hauts responsables du ministère des Affaires religieuses, l'avocat chargé du contentieux de l'Etat nous répond: «Oui, tout à fait. Ce monsieur accuse l'un des anciens ministres des Affaires religieuses d'avoir empoché un don de cinquante mille dollars de l'ambassadeur d'un pays arabe frère. Celui-ci nie catégoriquement le fait. La justice en est saisie. Elle nous dira un jour prochain la part du vrai et du faux dans cette affaire. Et nul n'est à l'abri du châtiment lorsqu'il s'avère coupable». Le contrat de la gabegie Rappelons enfin que le scandale de la Zitouna n'aurait pas eu lieu si cheikh Houcine Laâbidi n'avait pas cosigné un contrat de gestion de la Zitouna avec trois ministres de la Troïka (Affaires religieuses, Education nationale et Enseignement supérieur). Dès le départ du gouvernement de la Troïka, ce contrat a été résilié par un document cosigné par les nouveaux ministres des trois mêmes départements. Ce document n'ayant pas été reconnu par Houcine Laâbidi, bonjour donc le bras de fer avec l'imam! Et bonjour les dégâts ! «D'où la bataille juridique qui a l'air de traîner. Jusqu'à quand ? Dieu seul sait...