Concert de l'Orchestre symphonique tunisien en compagnie de Bacem Anas Romdhani et du Daltin Trio, mardi dernier, au Théâtre de la Ville de Tunis. Une virtuosité musicale, une variété du programme, un sublimé d'énergie, et une salle en liesse, voici le panorama de cette soirée que dirige Hafedh Makni, et plus encore quand il marie son professionnalisme et sa rigueur à ceux des musiciens de l'Orchestre symphonique tunisien et leurs invités d'honneur : le violoniste tunisien Bacem Anas Romdhani et le Daltin Trio français. Un programme en deux parties majeures, apte à mettre en valeur les instrumentistes, a été mis en place par l'Orchestre. Après une entrée «tchaïkovskienne» triomphale, distinguée par une captivante et juste relecture des extraits de Casse-noisette (Marche, Danse de la fée dragée) et la Danse russe (Trepak), puis une somptueuse «Valse» de Hichem Makni, le jeune virtuose du violon Bacem Anas Romdhani fait son entrée sur scène et assure cette première partie du concert... l'occasion de faire connaissance avec un musicien au parcours remarquable... Bacem Anas Romdhani est un violoniste tunisien né en 1995. Il commença ses études de violon à l'âge de 5 ans au conservatoire Zyriab de Mégrine avec Rachid Koubâa, feu Sem Slimane et Hichem Makni.Il s'est produit plusieurs fois en soliste avant de participer au concert de clôture du Festival de Carthage d'août 2005. Bacem Anas s'est produit également avec le World Philarmonique Orchestra à Paris en 2006. Il obtient le 1er prix du violon au Concours international «Vatellot/Rampal» à Paris en 2007. Il donna ensuite des concerts en Suisse en 2012 et aux Pays-Bas en 2013. Après avoir terminé ses études de violon avec les professeurs Akiko Ono (Japon) et Simon Fisher (G.-B.) à la Yehudi Menuhin School (Cobham, Londres) qu'il a intégrée en 2007, il a rejoint la Guildhall School of Music and Drama à Londres en septembre 2014. L'enfant prodige est donc de retour au pays pour participer à ce concert exceptionnel à travers lequel on a découvert un archet long, diseur, et un sens du phrasé rare chez un jeune instrumentiste. Dès le début, l'interprète a pris l'assurance du virtuose sans renoncer à la part intime de son discours, jouant un Tchaïkovski mythique et impressionnant. Soutenu par un orchestre discipliné et sans faille, il offre un récital d'une maîtrise et d'une douceur infinies, implorant les cordes qui, sous la frénésie des va-et-vient de l'archet, libèrent toute la splendeur d'une ligne mélodique puissante et lumineuse hypnotisant littéralement l'auditoire. Le jeune violoniste multiplie les traits virtuoses et convoque un paysage musical aussi riche que varié, d'une ampleur et d'une profondeur saisissantes. Un métissage réussi... Le lyrisme, les subtils phrasés de cette conception semblent appartenir à un autre monde... On en gardera longtemps le souvenir, tout comme sûrement Bacem Anas celui d'un déluge d'applaudissements mérités. Après l'entracte, à un enchantement allait succéder un autre, de nature toute différente, avec Le Daltin Trio. Il s'agit d'une troupe créée en 2013 par les jeunes instrumentistes français Grégory Daltin, Julien Duthu et Sébastien Gisbert. Après plusieurs concerts en Trio dans différents festivals de jazz tels que Jazz sur son 31, Nuits de Nacre, etc., ils ont eu l'idée d'orchestrer et de travailler leur répertoire actuel, composé de reprises de la musique latino-américaine et de compositions, pour un effectif d'orchestre à cordes auquel viendrait s'ajouter une partie de percussions ainsi qu'un trio d'instruments à vent. Le programme de cette deuxième partie du concert est, donc, une véritable première dans le parcours du Trio ainsi que dans celui de l'Orchestre symphonique tunisien qui a travaillé sur le métissage de différents genres musicaux en s'inspirant du répertoire classique, du jazz, de la world music, etc. Il en résulte des lignes mélodieuses hautes en couleur et un métissage réussi et saisissant. Du jazz, du tango, de la valse ou même du reggae, tout a été tenté dans un magnifique et subtil dialogue entre orchestre classique (cordes, percussions, vents) et le Trio (accordéon, bandonéon, accordina, contrebasse et percussions) déclinant les rythmes comme autant d'émotions à partager. Raffinement inouï des couleurs, sensualité, sens narratif, à aucun instant le maestro ne perd de vue l'essence chorégraphique de la musique et distille une assez bouleversante poésie dans une parfaite complicité avec des musiciens et un Trio au sommet de leur art. Une longue standing-ovation méritée !