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Education et enseignement : Ecoles et lycées, deviennent de moins en moins sécurisés
POINTS CHAUDS
Publié dans Le Temps le 13 - 04 - 2009


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Zouhaïer Maghzaoui, membre du syndicat national de l'enseignement secondaire : -La violence se propage et prend de l'ampleur-
L'école plonge dans un chaos, cette vérité désagréable en fait un espace difficilement gérable.
D'aucuns rétorqueraient que dans la réalité d'aujourd'hui, elle ne peut pas faire l'exception, puisque l'ambiance qui règne dans ce milieu ne lui est pas propre, elle sévit dans toutes les autres aires, dans la rue comme dans l'administration. L'école est en d'autres termes un miroir parmi tant d'autres reflétant les transformations profondes subies par notre société. Mais ces déviations généralisées ne doivent aucunement servir de prétexte pour justifier le dérapage que connaît cette institution suprême. L'intérêt particulier qu'on lui prête découle du rôle éminemment important qu'elle joue dans la société, elle est la base de ce grand édifice. Elle est la pourvoyeuse de citoyens, vu la baisse très sensible de l'autorité de l'instance familiale, c'est en son sein que se forgent essentiellement les caractères, que s'apprennent les valeurs, que se constitue l'humain, l'homme de demain. Donc, si elle faille à ce devoir, c'est la société dans son ensemble qui en souffre, qui en accuse le coup.
L'école, selon, tous les enseignants avec lesquels nous nous sommes entretenu, devient un espace à haut risque où ils ne se sentent pas en sécurité, puisqu'ils peuvent être agressés par des élèves ou par des étrangers qui y ont accès libre, ils y entrent quand ils veulent sans que personne ne se rende compte de leur présence, ils se promènent dans la cour et assistent au cours sans se faire remarquer surtout quand la classe est trop chargée ou au début de l'année lorsque le professeur n'a pas encore mémorisé les visages de ses élèves. « J'ai remarqué la présence d'un inconnu dans ma classe, nous dit Saïd, professeur d'arabe, je lui ai demandé s'il était un nouveau et de me donner son nom, il ne m'a pas répondu et s'est dirigé vers la porte pour sortir, alors je l'ai arrêté pour envoyer quelqu'un appeler le surveillant général pour prendre les mesures disciplinaires nécessaires croyant qu'il était un élève d'une autre classe qui accompagnait ses amis, mais il m'a poussé et insulté et s'est enfui à toutes enjambées. Après des enquêtes, on a appris qu'il n'était pas du lycée, il était inscrit dans un autre établissement qui n'est pas loin du nôtre. » Une scène similaire était vécue par Dalila, professeur d'éducation civique lors de la semaine bloquée. « Un élève était revenu à la salle après être sorti et déposé la copie, il a repris celle-ci qui était sur le bureau pour ajouter quelque chose, moi, j'étais au fond de la salle, j'ai alors accouru pour l'empêcher de le faire, il m'a poussée violemment et m'a projetée à terre, je me suis cognée à l'estrade et je me suis faite une entorse au pied, ce qui m'a obligée quelques jours de maladie. Il s'est avéré par la suite que l'élève en question n'était pas du lycée et qu'il était venu passer l'examen à la place de son ami. Heureusement que l'administration a depuis cet événement a mis en place des cartes d'identité scolaires portant les photos des élèves qu'ils sont obligés de présenter à chaque épreuve comme au baccalauréat. »

Le port obligatoire du casque
Fatma, professeur d'anglais travaillant dans un lycée de la banlieue nord nous fit également part de ses inquiétudes quant à l'insécurité sévissant dans cet établissement. « Je suis réputée pour être sévère, donc je n'ai pas de problèmes pour maîtriser ma classe, et pourtant ces dernières années je commence à connaître des difficultés à cause du tapage se produisant dehors dans la cour et les couloirs et dont l'écho parvenant en classe sème le désordre : les élèves entendant des chants, des youyous ou de gros mots ne peuvent pas ne pas réagir par des mots ou par des rires. Les heures de cours deviennent pour moi un vrai calvaire surtout l'après midi vers la fin de la journée où nous sommes livrés à nous-mêmes, à partir de dix-sept heures, l'administration est désertée, il n'y a plus personne, ni directrice, ni surveillant général, ni censeur , ni fonctionnaires, ni surveillants, tout le monde rentre chez soi, le problème est plus grave pendant l'hiver où il fait noir à six heures, ce qui veut dire que qu'on risque fort d'être agressé par un élève sans qu'on ne puisse l'identifier. Travailler à cette heure de la journée est vraiment une aventure, enchaîna-t-elle.» Abdelouahab, professeur de maths travaillant dans le même lycée, un chevronné redouté par ses élèves en raison de sa forte personnalité, confirma ce que dit sa collègue. « Les conditions de travail deviennent infernales, affirma-t-il, car la maîtrise de la classe n'est plus chose aisée, l'ambiance risque d'être perturbée à tout moment par les élèves qui se promènent dehors à l'intercours et même pendant le cours. Notre travail ne consiste plus seulement à enseigner, mais aussi à faire le surveillant dans les couloirs, personnellement, je ne peux pas faire la sourde oreille quand j'entends des élèves chanter ou proférer de gros mots, j'interviens toujours, je suis obligé de le faire, car je fais comme si de rien n'était, la zizanie s'installerait dans ma classe et je risque de ne plus être respecté par mes élèves, après tout, ces élèves qui commettent ces forfaits devant ma salle m'ont manqué de respect. En plus de l'énervement et de la perte de temps que me causent ces écarts de conduite, des fois je connais des altercations avec des élèves insolents qui refusent de décliner leur identité ou d'attendre l'arrivée d'un surveillant qui est la plupart du temps introuvable, il va falloir que nous portions des casques pour nous protéger contre les éventuelles agressions, termina le professeur avec une légère teinte d'humour. »

Le renvoi salutaire
L'autre problème soulevé par nos interlocuteurs, les professeurs, se rapportent au comportement des directions régionales concernant certaines décisions disciplinaires. « Il est inadmissible, nous dit indigné, Ghazi, professeur de français que des élèves renvoyés définitivement du lycée soit réinscrit au cours de la même année scolaire dans un autre lycée, ces mesures sont contraires à la circulaire 91/ 93 émanant du cabinet du ministère de l'Education qui stipule que l'élève renvoyé ne peut bénéficier d'une dérogation qu'au début de l'année scolaire suivante et à condition de remplir les conditions de redoublement. Il y a un élève dans notre lycée qui était traduit devant le conseil d'éducation et qui a reçu cette sanction la veille des vacances d'hiver, à la rentrée, il était inscrit dans un lycée d'une réputation meilleure et qui se trouve à quelques kilomètres, c'est-à-dire qu'il n'était renvoyé en fait qu'un seul jour, le samedi, le dernier jour du trimestre ! Même si on s'obstine à violer ladite circulaire, du moins tâchons de donner le sentiment à l'élève d'avoir subi une punition en l'inscrivant, par exemple, dans un lycée qui se trouve plus loin de sa demeure que le premier, punissons au moins par la distance. Dans ce cas d'espèce, la sanction est vaine, elle n'a pas produit l'effet persuasif escompté qui en est la finalité, au contraire, elle s'est avérée salutaire pour l'élève, puisqu'elle lui a permis d'accéder à un lycée meilleur. Imaginez ce que pourrait bien dire ou faire cet élève à son professeur, l'auteur du rapport le jour où il le rencontrerait. » Cette hypothèse formulée par notre interlocuteur s'est vérifiée dans la réalité. Baya, professeur de philo nous révéla qu' « un élève renvoyé d'un autre lycée qui se trouve à proximité du nôtre est allé insulter la professeur qui l'a traduit devant le conseil d'éducation et a failli l'agresser, il voulait lui montrer que finalement elle était incapable de le punir, étant donné qu'il est inscrit dans un autre lycée au cours de la même année. Ce jour-là, il avait cours avec moi et il s'était absenté, mais il a prétendu le contraire misant sur l'inexistence du registre d'appel, heureusement, nous dit-elle, que j'ai fait passer une feuille de présence, autrement il aurait tout nié et réclamé son innocence. »

Une ambiance de stade
La question des retenues pose également des problèmes pour les professeurs. « Ce sont des punitions qui n'ont jamais lieu, nous affirma Hatem, professeur d'anglais, puisqu'il n'y a pas de surveillants pour diriger ces séances, on manque d'effectif, il n'y en a même pas assez pour assurer la discipline dans le lycée, de plus, nous n'avons pas une grande salle de permanence pouvant accueillir tous les élèves retenus. La retenue est une punition fictive, on perd notre temps à remplir inutilement des formulaires qui sont jetés à la poubelle, enchaîna-t-il. »
L'autre grief formulé par les professeurs touche aux tenues portées par les élèves. « C'est comme si nous étions dans un stade, déclara Samia professeur de physique, ils endossent presque tous les maillots de leurs clubs préférés et certains d'entre eux portent même des shorts, les filles, elles, se promènent en décolleté sans se gêner. Je me demande pourquoi on n'impose pas le port d'un uniforme unique pour les deux sexes comme dans certains pays développés qui nous servent de modèles dans plusieurs domaines, pourquoi ne pas leur emboiter le pas sur ce plan ? questionna-t-elle. » Enfin, certains enseignants dénoncent le manque de vigilance et de rigueur de la part de certaines administrations de lycées où on ferme les yeux sur la vente des cigarettes aux élèves par la buvette, ce qui est strictement interdit par le cahier des charges.
Faouzi KSIBI
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Zouhaïer Maghzaoui, membre du syndicat national de l'enseignement secondaire : -La violence se propage et prend de l'ampleur-

Pour mettre au point certaines questions relatives à la discipline régnant dans l'école d'aujourd'hui, nous nous sommes adressé à M. Zouhaïer MAGHZAOUI, membre du syndicat national de l'enseignement secondaire.
Le Temps : Comment évaluez-vous l'ambiance générale qui règne au sein des établissements scolaires ?
M. Zouhaïer MAGHZAOUI : Bien que l'année scolaire touche à sa fin, nous avons remarqué que la violence se propage et prend de l'ampleur, l'exemple type que l'on peut avancer c'est celui du meurtre du lycée de Gafsa où des intrus, des élèves renvoyés s'y sont introduits et ont assassiné un élève. Cet événement dramatique et tant d'autres nous interpellent, ils méritent qu'on médite dessus d'une manière profonde et responsable afin s'essayer d'en déceler les raisons et de remédier à la situation en y apportant les solutions adéquates, car les relations entre les différentes parties se sont détériorées : entre les professeurs et les élèves et leurs parents, entre ces derniers et l'administration, entre celle-ci et les premiers...

Qui est responsable, selon vous, de ces tensions ?
Les raisons en sont multiples. Il y a d'abord la surcharge des classes, il est très difficile pour ne pas dire impossible pour un enseignant d'imposer la discipline et faire régner l'ordre dans une classe de trente huit ou de quarante élèves, cela requiert une grande mobilisation aussi bien physique que mentale de sa part, ce qui est très épuisant. L'autre facteur perturbateur c'est bien sûr le nombre trop insuffisant de surveillants par lycée, il est très en-deçà de la moyenne qui est de l'ordre d'un pour cent élèves. Ces derniers souffrent également de l'absence d'une protection sociale, vous savez que plusieurs d'entre eux vivent des problèmes dans leurs familles, leur prise en charge par une assistante sociale leur serait d'un grand apport et les aiderait à dépasser certaines de leurs difficultés et à avoir un meilleur rendement scolaire. La présence d'un psychiatre dans l'établissement scolaire est également souhaitable pour assister les élèves souffrant psychologiquement. Toutes ces difficultés qui rendent l'atmosphère au sein de l'école très tendue peuvent être aplanies si toutes les parties impliquées dans l'opération éducative se concertent et que chacune y mette du sien, mais malheureusement, l'autorité de tutelle refuse de négocier de toutes ces questions avec son associé, le syndicat général de l'enseignement secondaire.

Est-ce que vous estimez que le régime disciplinaire actuel est inopérant ?
Absolument, il date du début des années quatre vingt-dix, et depuis sa mise en vigueur, il n'a pas fait l'objet de révision bien que la réalité de l'école n'est plus ce qu'elle était avant, d'ailleurs c'est la société dans sa totalité qui a changé, donc ce régime disciplinaire ne répond plus aux exigences actuelles, il n'a pas suivi les transformations profondes que nous connaissons. Et en dépit de ce décalage et des lacunes qu'il contient, il n'est pas respecté par l'autorité de tutelle. L'impunité et le manque de rigueur face aux écarts de conduite ne peuvent qu'affecter négativement la qualité de l'enseignement : des élèves indisciplinés sont incapables de se concentrer sur leurs études et d'accéder à une bonne formation.


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