Téhéran signe un accord d'échange de combustible nucléaire avec le Brésil et la Turquie Le Temps-Agences- L'Iran a signé hier avec le Brésil et la Turquie un accord sur l'échange de combustible nucléaire censé dissiper les soupçons des Occidentaux sur la nature de ses activités sensibles et lui éviter de nouvelles sanctions. L'Iran a dit avoir accepté de transférer 1.200 kg d'uranium faiblement enrichi, soit la majeure partie de son stock connu, en échange de combustible destiné à son réacteur de recherche médicale de Téhéran. "L'échange aura lieu en Turquie", a dit le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Ramin Mehmanparast. Cet accord est fondé sur le projet d'échange de combustible soumis à l'Iran en octobre par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), dont la République islamique contestait certains volets. Téhéran exigeait notamment que l'échange ait lieu sur son territoire. L'impasse dans laquelle était resté le projet a conduit les grandes puissances à discuter de l'adoption d'un quatrième train de sanctions au Conseil de sécurité de l'Onu, l'Iran se refusant à suspendre ses activités d'enrichissement de l'uranium. Dans cette perspective, le Brésil et la Turquie avaient proposé le mois dernier, lors de la conférence de révision du Traité de non prolifération (TNP), de jouer les médiateurs pour relancer le projet d'échange destiné à apaiser les craintes des Occidentaux sur la nature militaire des activités iraniennes. Le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, a estimé que les sanctions n'avaient désormais plus de fondement. "L'accord d'échange montre que Téhéran veut ouvrir une route constructive (...) Il n'y a plus de fondements à de nouvelles sanctions ou pressions", a-t-il dit à la presse. Sitôt l'accord signé, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a appelé à la reprise des négociations avec les grandes puissances. "Il est temps pour les pays '5+1' d'entrer avec l'Iran dans des discussions fondées sur l'honnêteté, la justice et le respect mutuel", a-t-il déclaré. La dénomination "5+1" fait référence au cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et Russie) et l'Allemagne. Les Etats-Unis, en tête de la campagne occidentale en faveur de nouvelles sanctions, n'ont pas réagi pour l'heure. L'accord a été trouvé dimanche à l'issue de discussions entre Ahmadinejad, son homologue brésilien Luiz Inacio Lula da Silva et le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. Aux termes de ce texte, l'Iran devra envoyer son uranium faiblement enrichi d'ici un mois, a dit le porte-parole de la diplomatie iranienne, cité par la chaîne officielle Press TV. L'opération sera supervisée par l'AIEA. La quantité d'uranium faiblement enrichi concernée par l'accord serait suffisante pour alimenter une bombe atomique si le niveau d'enrichissement requis était atteint. L'accord initial, soutenu par les Etats-Unis, prévoyait le transfert de ce même stock d'uranium vers la Russie puis la France pour qu'il y soit converti en combustible. L'Iran avait donné son accord de principe en octobre, avant de réclamer des modifications jugées inacceptables par les autres parties. Si celui signé n'était pas mis en œuvre, la Turquie aurait l'obligation de restituer l'uranium "immédiatement et sans condition", a prévenu le ministre des Affaires étrangères Manouchehr Mottaki. La signature de cet accord marque une percée potentielle dans ce contentieux de longue date, le Brésil et la Turquie ayant comblé un "déficit de confiance", estime Trita Parsi, directeur du Conseil national irano-américain. Légende : L'accord a été trouvé à l'issue de discussions entre Ahmadinejad, son homologue brésilien Luiz Inacio Lula da Silva et le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. -------------------------- Lula : "Une victoire de la diplomatie" Le Temps-Agence- L'accord sur le nucléaire conclu hier entre l'Iran, la Turquie et le Brésil est "une victoire pour la diplomatie", a déclaré à la radio nationale le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva. "La diplomatie sort victorieuse aujourd'hui", a-t-il dit en réponse à une question sur l'accord conclu à Téhéran, juste avant de quitter l'Iran. "Il est possible avec le dialogue de construire la paix et le développement", a ajouté le chef de l'Etat brésilien. Selon Lula, l'accord a été obtenu grâce aux efforts particuliers des ministres des Affaires étrangères turc, brésilien et iranien qui s'étaient réunis jusqu'à quatre heures du matin. Il a fait l'éloge en particulier de son ministre, Celso Amorim. "La déclaration entre la Turquie, le Brésil et l'Iran contient tous les éléments pour un accord d'échange d'uranium contre des éléments de combustibles", a assuré pour sa part M. Amorim. Le chef de la diplomatie brésilienne a considéré que cet accord "devait être suffisant" pour éviter de nouvelles sanctions à l'Iran, envisagées par le Conseil de sécurité de l'ONU. "Nous ne voyons aucune raison pour que ce mouvement en faveur des sanctions continue", a-t-il souligné. -------------------------- France-Iran : Interrogations sur un « échange » de détenus Le Temps-Agences- L'imminence de la libération d'Ali Vakili Rad, un Iranien condamné en France pour l'assassinat en 1991 de l'ex-Premier ministre du Shah Chapour Bakhtiar, a ravivé hier le soupçon de tractations entre Paris et Téhéran pour le retour de la Française Clotilde Reiss. Le ministre français de l'Intérieur Brice Hortefeux devait signer hier un arrêté d'expulsion de Vakili Rad, ouvrant ainsi la voie à sa remise en liberté. La justice française doit se prononcer aujourd'hui sur la libération conditionnelle de l'Iranien, condamné à perpétuité en 1994 en France pour l'assassinat de Chapour Bakhtiar trois ans plus tôt. Contrepartie ou hasard de calendrier ? Dès le retour en France dimanche de la jeune universitaire française, retenue en Iran pendant dix mois pour avoir participé à des manifestations anti-gouvernementales, les interrogations se sont multipliées. La presse s'est immédiatement interrogée sur l'existence d'un "échange" de détenus, tandis que le porte-parole de l'opposition socialiste, Benoît Hamon a réclamé la "transparence" du gouvernement. "Je pense, comme beaucoup de Français (...) qu'il y a probablement eu des contreparties", a-t-il déclaré hier sur la chaîne I-Télé, évoquant la pratique de "négociations" dans des affaires de ce type. Paris comme Téhéran ont démenti tout lien entre la libération de la jeune femme et celles d'Iraniens détenus en France, notamment Ali Vakili Rad et Majid Kakavand, que Paris a refusé d'extrader aux Etats-Unis, malgré la concomitance de dates et le fait que Téhéran ait plusieurs fois relié ces affaires.